INRAE, Institut responsable en matière d’expérimentation animale

L’utilisation des animaux à des fins scientifiques a été, et reste encore nécessaire de nos jours dans la perspective d’améliorer la santé humaine et animale, mais aussi pour la recherche fondamentale et agronomique ou la préservation des espèces et de l’environnement. Mais elle ne va pas sans un questionnement éthique et des efforts constants pour trouver des méthodes alternatives fiables. INRAE, comme tout établissement de recherche, applique rigoureusement la réglementation française, elle-même dérivée de la réglementation européenne, qui encadre de façon stricte l’expérimentation animale. L’Institut participe aussi aux structures nationales inter-instituts dans ce domaine et notamment au centre FC3R (France Centre 3R) dédié à cette problématique, créé en France fin 2021, à l’instar de ceux qui existent dans de nombreux autres pays d’Europe.

Transparence sur l’expérimentation animale

Tout citoyen a droit à une information complète et claire sur les raisons et les conditions de l’utilisation d’animaux à des fins scientifiques.

C’est pourquoi chaque dispositif expérimental agréé renseigne annuellement une base de données européenne avec le nombre d’animaux utilisés par espèces et les objectifs des projets. Les statistiques nationales sont publiées sur le site du ministère de la Recherche (MESRI).

De plus, les résumés non techniques de chaque projet de recherche utilisant des animaux sont rendus publics.

Pour aller plus loin, près de 40 acteurs publics et privés de la recherche française, dont INRAE, ont signé en février 2021 une charte de transparence, initiative coordonnée par le GIRCOR (Groupe interprofessionnel de réflexion et communication sur la recherche). Cette charte précise les engagements des signataires en matière d’information et d’échanges avec le public sur le recours aux animaux à des fins scientifiques. Voir l'article sur le site du GIRCOR.

INRAE signe la Charte de transparence sur le recours aux animaux

Les établissements signataires de la charte ont pris quatre engagements :

  • Expliquer les raisons et les conditions du recours aux animaux à des fins scientifiques et réglementaires,
  • Diffuser l’information auprès du grand public et des médias sur les différents supports de communication des établissements, y compris sur les sites internet institutionnels.
  • Faciliter les échanges d’information avec le grand public et des médias selon des dispositifs qui vont être mis en place.
  • Produire chaque année un document sur les progrès en matière d’information du public.

Charte Transparence Animaux pour la Science - 22 février 2021.pdf pdf - 484.80 KB

Création du FC3R (France Centre 3R)

Pour soutenir l’application de la réglementation « 3R », un centre de référence intitulé France Centre 3R (FC3R), a été créé en 2021, à la demande du ministère de la Recherche, sous forme d’un Groupement d’intérêt scientifique (GIS). INRAE en est l’un des membres fondateurs, aux côtés des autres acteurs majeurs de la recherche publique française. Le FC3R, localisé à l’École Nationale Vétérinaire de Maisons-Alfort, a pour mission de favoriser la formation et la communication autour des 3R, et de soutenir le développement de méthodes préservant les animaux (méthodes non invasives, modèles cellulaires, etc.). Lire l'article.

Principe directeur de la réglementation européenne et nationale : les « 3R »

La réglementation européenne en matière d’expérimentation animale, transcrite en droit français, repose sur le principe dit des « 3R » : REMPLACER, REDUIRE, RAFFINER.

REMPLACER

 REMPLACER le recours au modèle animal par des méthodes alternatives :

  • méthodes in silico : modélisation informatique, deep learning...
  • méthodes in vitro : cultures de cellules, organoïdes, ...  

Lire l'article : Alternatives à l’expérimentation animale, ouvrage publié en 2020, Editions QUAE.

Deux exemples de remplacement :

  • Mise au point d’un dispositif in vitro pour l’étude de la piqûre de tique, prix Alfred Kastler 2015. Lire l'article. 
  • Mise au point d’une technique d’amplification in vitro des prions permettant de réduire l’utilisation d’animaux, prix Alfred Kastler 2017.  Lire l'article.

Trois exemples où le remplacement n’est actuellement pas possible :

Certaines recherches ne peuvent être conduites que sur les organismes entiers. C’est le cas par exemple lorsque l’on étudie le développement de maladies impliquant tout l’organisme, ou encore pour certaines études concernant l’alimentation ou pour les travaux sur le comportement animal.

  • Vaccin nasal contre la covid-19 testé in vivo en essais pré-cliniques sur modèle murin. Lire l'article.
  • Mangeoires électroniques permettent de mesurer la consommation alimentaire individuels de poulets élevés en groupe et au sol. Lire l'article.
  • Lien entre le microbiote intestinal, le stress et la mémoire sur un modèle caille. Lire l'article.

REDUIRE, RAFFINER, REHABILITER

REDUIRE le nombre d'animaux au minimum indispensable pour obtenir des résultats fiables, en utilisant des études statistiques, des méta-analyses et la mémoire des expériences déjà réalisées, même si elles n'ont pas été publiées.

RAFFINER : Respecter le bien-être des animaux et minimiser la douleur (analgésie) et le stress, en s'appuyant sur les connaissances produites par les recherches dans ce domaine. 

REHABILITER : Un 4ième "R" est en voie de développement : placer les animaux qui peuvent l’être après les expérimentations dans des structures d'accueil fiables.

INRAE veille à l'application de la réglementation sur l’expérimentation animale et accompagne ses collectifs dans une démarche de progrès continu

Principes approuvés en Conseil scientifique d’INRAE en 2019. Lire l’article.

Résumé de la réglementation :

  • Les dispositifs dans lesquels sont hébergés les animaux et dans lesquels se déroulent les expérimentations ont obtenus un agrément d'établissement utilisateur d’animaux délivré par les autorités préfectorales. Ils font l'objet de contrôle par les services préfectoraux
  • Les projets sont conçus et réalisés par des personnels formés et qualifiés, qui ont validé une des formations réglementaires obligatoires agréées par le ministère de l’Agriculture (de 1 à 3 semaines selon le niveau d'intervention auprès des animaux) et qui mettent à jour leurs connaissances par formation continue (minimum de 3 jours sur 6 ans glissants).
  • Les projets sont soumis à autorisation ministérielle sur la base de l'avis d'un comité d'éthique de composition réglementaire.

 

Les modèles animaux à INRAE

Pour répondre aux questions scientifiques, INRAE utilise une grande diversité d'espèces animales

Des animaux modèles pour la recherche fondamentale (compréhension des mécanismes biologiques) : poissons (poisson-zèbre, médaka), miniporcs, lapins, rongeurs (souris et rats). En France, la souris est l’animal le plus fréquemment utilisé (près de 64 % des utilisations). Viennent ensuite les rats (9,1 %), les lapins (8,8 %) et les poissons (7,3 %, toutes espèces confondues) (Statistiques nationales, 2020).

Des espèces d’élevage : bovins, caprins, ovins, équins, lapins, oiseaux (poules, dindes, cailles, canards), poissons (truite principalement), porcins, pour la recherche agronomique, la santé animale dans une démarche One Health, la reproduction et la génétique, l'alimentation, le comportement et le bien-être animal, les systèmes d'élevage agroécologiques.

Des espèces de la faune sauvage captive ou non : blaireaux, cervidés, grenouilles, poissons, pour les recherches sur la biodiversité, la préservation de l’environnement et la conservation des espèces sauvages.

Des progrès dans l’optique « Remplacer »

Start-up Clinic’n’Cell : méthode de test de compléments alimentaires sur des cellules humaines en culture.

Effets du bisphénol S à doses environnementales, démontrés in vitro, sur le développement des ovocytes et des embryons de brebis.

Effet anti-inflammatoire des feuilles d’artichaut sur le foie : approche ex vivo sur des cellules de foie humain en culture.

Méthodes non invasives

Biomarqueurs : l’analyse des micro-ARN dans le sang des truites arc-en-ciel donne des indications sur leur croissance musculaire et détecte les ovulations.

Biomarqueurs : l’identification de biomarqueurs dans la salive des jeunes truies permet de détecter celles qui déclenchent leur ovulation en présence du mâle, et ainsi d’éviter les traitements hormonaux utilisés pour synchroniser les cycles.

Imagerie, modèle miniporcs : la disparition d’un détecteur sanguin de glucose chez des animaux obèses serait impliquée dans l’apparition du diabète de type II.

Exemples d'expérimentations sur les animaux d’élevage

Modèle bovin : trois techniques de mesure in vivo des émissions individuelles de méthane expliquées en vidéo.

Modèle poulet de chair : les poulets qui explorent le moins les parcours de plein-air sont aussi les poulets qui analysent le mieux leur environnement.

Modèle porc : INRAE et la filière porcine travaillent à améliorer l’élevage et la valorisation des mâles entiers pour éviter la castration des porcs.

Des structures spécifiques et coordonnées

INRAE a mis en place un dispositif d’accompagnement de ses collectifs pour le respect de la règlementation. Il comporte plusieurs axes qui sont coordonnés :

Les Comités d’éthique en expérimentation animale (CEEA, imposés par la réglementation nationale) : les comités d’éthique ont une composition réglementaire et sont agréés par le MESRI (environ 125 CEAA en France). Ils évaluent si le projet de recherche est éthiquement recevable proposent des ajustements si besoin, avant transmission au MESRI qui délivre les autorisations pour 5 ans maximum.

« L’objectif à terme est de se passer des modèles animaux, mais ce n’est pas encore possible quand il s’agit d’étudier le fonctionnement d’un organe ou le développement d’une maladie dans l’organisme entier. Dans une démarche de transparence, les résumés non techniques des projets sont accessibles sur le site du MESRI. C’est très important pour faire comprendre au public pourquoi il faut recourir à l’expérimentation animale pour certaines recherches et comment minimiser les dommages causés aux animaux ». Le responsable INRAE impliqué dans la concertation entre les CEEA d’Ile-de-France.

charte_nationale_dethique_de_lexperimentation_animale.pdf pdf - 598.24 KB

Les Structures Bien-être animal (SBEA, imposées par la réglementation nationale) : les SBEA sont composées de concepteurs des projets scientifiques, de responsables des soins et du bien-être des animaux et de vétérinaires. Ces structures sont chargées de l’application sur le terrain de la réglementation en matière de protection animale. Elles veillent au bon déroulé des projets validés par le MESRI selon les recommandations des comités d’éthique. Chaque site exprimental agréé d'INRAE dispose, selon sa taille, d' une ou plusieurs SBEA (plus de 50 SBEA à INRAE, de l‘animalerie de laboratoire à de plus grandes structures).

« Les SBEA sont les « yeux » des comités d’éthique sur le terrain. Nous cherchons à améliorer les pratiques en continu. En cours actuellement : l'élaboration en commun d'une grille d’évaluation du bien-être animal inspirée de la grille Welfare Quality, mais plus simple et plus facile à utiliser. Ou encore, des conseils pour enrichir le milieu de vie des animaux. Nous commençons aussi à développer le medical traininig : il s’agit d’un ensemble de techniques basées sur l’apprentissage car dans certains cas, des manipulations courantes peuvent créer du stress et de l’inquiétude chez les animaux ». La responsable des SBEA d’INRAE.

La Délégation à la sécurité biologique 

« Nous nous assurons de la conformité réglementaire et conseillons les unités sur la réglementation. Nous visitons les unités, identifions les points à améliorer et les axes de progrès, et diffusons les bonnes pratiques que nous observons. Nous développons un système d’information pour faire connaître ce qui se fait et répondre aux questions des agents, unités, centres et départements. Les placements d’animaux après expérience par exemple, sont plus faciles à mettre en œuvre qu’on ne le croit. C’est une pratique qui se développe en partenariat avec des associations comme GRAAL ». Le délégué Sécurité biologique d’INRAE.

La Charte sanitaire : INRAE s’est doté d’une charte pour assurer la sécurité sanitaire des animaux, en particulier des animaux d’élevage, de manière harmonisée dans toutes les unités expérimentales.

 « La mise en œuvre de la Charte Sanitaire repose sur un réseau constitué de correspondants présents au sein de chaque dispositif expérimental et de 8 animateurs par espèce qui ont une formation de vétérinaire. Ensemble, nous veillons à améliorer le statut sanitaire de chaque élevage et la maîtrise des risques, par l’échange de pratiques, par des campagnes d’auto-évaluation et par la définition de plans d’action. Le collectif contribue aussi au développement du système d’information qui rassemble les données sanitaires : observations, traitements, gestion des pharmacie ».L'animateur de la charte sanitaire d'INRAE.

Voir la vidéo sur la prévention de la peste porcine africaine dans les unités expérimentales d'INRAE :

 

INRAE engagé dans les recherches sur le bien-être animal

INRAE conduit de nombreuses recherches sur les comportements animaux et le bien-être des animaux d’élevage. L’Institut a ainsi produit des expertises scientifiques collectives sur la Douleur animale et la Conscience animale (lire aussi cet article : La conscience animale en BD).

Ces connaissances permettent de mieux comprendre les émotions et la perception de la douleur chez les animaux et peuvent être mises à profit dans le champ de l’expérimentation animale. INRAE est pilote sur l’évaluation du bien-être chez les espèces d’élevage.

En outre, INRAE est l’organisme porteur du Centre national de référence pour le bien-être animal (CNR BEA). Lire l’article. Le CNR BEA a pour mission de diffuser une information scientifique et technique validée sur le bien-être animal, de réaliser des expertises sur le sujet et d’identifier les manques en termes de formation.

Lire aussi l'article : Le bien-être animal, valeur cardinale