Agroécologie 5 min

Des biomarqueurs de la période de réceptivité à "l'effet mâle" dans la salive des jeunes truies

Dans l’objectif de développer des méthodes alternatives aux traitements hormonaux pour la synchronisation des cycles des jeunes truies (cochettes) mises à la reproduction pour la première fois, des biomarqueurs de la réceptivité à « l’effet mâle » ont été recherchés dans leur salive. En effet, l’exposition des jeunes truies au verrat favorise la synchronisation de la première ovulation. Une étude du métabolome* et du stéroïdome* salivaires a permis d’identifier neuf biomarqueurs potentiels, notamment la progestérone et trois de ses métabolites, qui pourraient permettre de mieux repérer les cochettes réceptives à l’effet mâle.

Publié le 08 février 2021

illustration Des biomarqueurs de la période de réceptivité à "l'effet mâle" dans la salive des jeunes truies
© Christophe de Heaulme - Agrobioscience

Dans les systèmes conventionnels, les éleveurs de porcs utilisent des hormones synthétiques pour synchroniser les cycles des truies mises à la reproduction pour la première fois (appelées aussi cochettes). Ce principe de synchronisation est nécessaire pour la conduite dite « en bande », qui présente de nombreux avantages sanitaires et organisationnels (simplification du travail de l’éleveur). Toutefois, les résidus hormonaux retrouvés dans les déjections et la viande ont un impact négatif sur l’environnement et la santé humaine. Ainsi, l’utilisation des hormones est interdite en élevage biologique, ce qui rend difficile la synchronisation des cycles sexuels, en l’absence actuelle d’autres méthodes. Il est donc nécessaire de trouver des méthodes alternatives non hormonales pour la synchronisation des cycles sexuels des animaux d’élevage, si l’on désire garder le système de la conduite en bandes dans les systèmes biologiques, mais aussi pour améliorer les performances environnementales des systèmes conventionnels.

Juste avant la puberté, les cochettes deviennent sensibles à la présence du mâle, laquelle induit dans certains cas la première ovulation. Ce phénomène est appelé « l’effet mâle ». Il pourrait donc constituer une alternative intéressante aux hormones pour déclencher la première ovulation des jeunes femelles. Les cochettes n’étant pas toutes pubères au même âge, la méthode reste pour le moment peu efficace et coûteuse en temps de travail et en manipulations d’animaux. Notre objectif est d’améliorer l’efficacité de l’effet mâle pour l’entrée en reproduction des jeunes femelles. Pour cela, les chercheurs de l’UMR PRC (en collaboration avec les unités GENESI et PEGASE, l’ITAB et l’IFIP1) ont recherché des biomarqueurs de la réceptivité à l’effet mâle dans la salive des cochettes. Les prélèvements de salive présentent l’intérêt d’être une méthode non-invasive pour les animaux et qui a déjà été pratiquée avec succès dans deux études antérieures (Goudet et al., 2019a et b).

Des échantillons de salive ont été prélevés sur 30 cochettes croisées Large-White × Landrace âgées de 140 à 175 jours. Les cochettes ont été exposées à un verrat et soumises à une détection des chaleurs 2 fois par jour à partir de 150 jours d’âge.  Parmi les 30 cochettes, 10 ont été détectées en chaleur (période d’ovulation ou oestrus) 4 à 7 jours après la première exposition au verrat et ont été ainsi considérées comme réceptives à l'effet mâle ; 14 ont été détectées en oestrus plus de 8 jours après le premier contact avec le verrat, et 6 ont été considérées non réceptives. Nous avons comparé le métabolome* et le stéroïdome* des échantillons de salive de 6 cochettes réceptives et de 6 cochettes non réceptives, en collaboration avec l’université de Tours et l’INSERM. Pour chaque cochette, nous avons analysé la salive collectée 25 et 11 jours avant l’exposition au verrat, ainsi que le premier jour de cette exposition.

Prélèvement de salive sur une cochette par D Grivault à l’aide d’une SALIVETTE®

Vingt-neuf stéroïdes et 31 métabolites ont été détectés dans la salive des cochettes. Les concentrations salivaires de 6 stéroïdes et de 3 métabolites étaient significativement différentes entre les cochettes réceptives et non réceptives : la salive des cochettes réceptives contenait des concentrations plus élevées en progestérone et glycolate 25 jours avant l’exposition au mâle, en 3α5β20α-hexahydroprogestérone, 3β5α20β-hexahydroprogestérone, déhydroépiandrostérone, androstènediol, butyrate et succinate 11 jours avant l’exposition, et en 3β5α-tetrahydroprogestérone le premier jour de l’exposition.

Ces neufs biomarqueurs potentiels de la réceptivité au mâle et donc de l’aptitude à démarrer une gestation pourraient permettre d’identifier les cochettes qui seront réceptives à l’effet mâle dès 11 à 25 jours avant leur exposition et ainsi améliorer l’efficacité de la stimulation. Parmi eux, la progestérone et certains de ses métabolites sont les plus prometteurs du fait de concentrations plus élevées et moins variables et d’un différentiel plus marqué entre cochettes réceptives et non-réceptives. La suite du travail va consister à valider ces observations sur des effectifs plus importants puis à simplifier les méthodes d’analyses pour les rendre plus rapides et moins coûteuses.

 

* Le métabolome est l'ensemble des métabolites (petites molécules telles que les peptides, acides aminés, acides organiques, sucres, etc.) qui peuvent être trouvés dans un échantillon biologique.
* Le stéroïdome est l’ensemble des stéroïdes trouvés dans un échantillon biologique.

 

1 Ce projet a été financé par un crédit incitatif du département PHASE puis par le programme AgriBio4 du CIAB d’INRAE.
Il est le fruit d’une collaboration entre l’UMR PRC (Physiologie de la Reproduction et des Comportements) et les unités GENESI (Elevages porcins innovants) et PEGASE (Physiologie, Environnement et Génétique pour l'Animal et les Systèmes d'Élevage) ainsi que l’ITAB (Institut technique de l'agriculture biologique) et l’IFIP (Institut du Porc).

sylvie André

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Ghylène Goudet contact ScientifiqueUMR Physiologie de la Reproduction et des Comportements

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