Moins de protéines et de potassium dans l’aliment : une stratégie pour réduire l’impact sur l’environnement des poulets de chair

La production avicole, en croissance constante, est confrontée à des enjeux environnementaux majeurs, notamment les pertes d’azote (N) sous forme de gaz comme l’ammoniac (NH₃) et de protoxyde d’azote (N₂O). Ces pertes ont des impacts négatifs sur l’environnement à des échelles locales, comme l’eutrophisation ou l’acidification des sols, mais également à des échelles globales, comme le changement climatique. Dans ce contexte, cette étude porte sur l’effet de la réduction de la teneur en protéines brutes et de la balance électrolytique* (c.a.d. l’équilibre entre différents sels minéraux, dont le potassium) de l’aliment des poulets de chair sur le bilan azoté, la composition de la litière et les émissions gazeuses des élevages.

Deux essais successifs ont été menés sur 888 poussins mâles de souche « Ross 308 » élevés jusqu’à 35 ou 37 jours d’âge, répartis dans 12 chambres à environnement contrôlé conçues pour mesurer les émissions d'ammoniac (NH₃) et de protoxyde d’azote (N₂O).
Quatre régimes alimentaires ont été testés : un régime témoin (T), un régime avec une teneur réduite en protéines brutes et potassium (PB-) et deux régimes avec la même teneur réduite en protéines, mais avec une balance électrolytique corrigée par ajout de potassium (PB-K+) ou de sodium (PB-Na+). Dans les aliments PB-, le tourteau de soja a été presque intégralement remplacé par du tourteau de colza et des céréales (-67 à -91 %).

Les résultats ont montré que :

• Le régime PB- a permis de diminuer l’excrétion azotée d’environ 32 % et les émissions de NH₃ par poulet de 47 % (PB-K+) à 72 % (PB-).
• Le taux de volatilisation de l’azote (part de l’azote excrété transformée en gaz) a aussi diminué, atteignant 10 à 19 % dans les régimes PB- contre 30 % dans le régime T.
• La quantité de N₂O émise n’a pas été significativement modifiée par les différents régimes alimentaires.
• Le pH de la litière a été réduit par la diminution de la balance électrolytique (régime PB-), ce qui participe à une moindre émission de NH₃.
• Les teneurs en azote, en sodium et en potassium, ainsi que le pH des litières ont été significativement affectés par les régimes testés.
• La consommation d’eau des animaux était réduite de 16-19% dans les régimes PB- et PB-Na+ par rapport au régime témoin.
• Les performances zootechniques ont été légèrement dégradées par la réduction de la teneur en protéines : réduction du gain de poids et de l’efficacité alimentaire d’environ 5-6 %, mais sont restées supérieures aux standards commerciaux.

La réduction de la teneur en protéines brutes dans l’alimentation des poulets de chair, surtout lorsqu’elle est combinée à un ajustement de la balance électrolytique, constitue une stratégie efficace pour réduire les pertes azotées sous forme de NH₃ dans les élevages.

Cette étude a été menée en collaboration entre INRAE et l’Université Laval (Québec, Canada) dans le cadre du Laboratoire International Associé Nutri-Mod.

*Les électrolytes sont des sels minéraux présents sous forme d’ions chargés positivement (ex. sodium ou potassium) ou négativement (ex. chlore). Ils sont indispensables au bon fonctionnement de l'organisme et sont impliqués dans de multiples fonctions biologiques (équilibre hydrique, maintien du pH sanguin, etc.).