Agroécologie Temps de lecture 2 min
Raisonner ensemble cultures de rente et cultures intermédiaires
Les cultures intermédiaires, implantées entre deux cultures de rente, sont un levier de reconquête agroécologique grâce aux services qu’elles apportent. Les travaux du laboratoire Agroécologie, innovations et territoires (AGIR) du centre INRAE Occitanie-Toulouse montrent tout l’intérêt de raisonner conjointement cultures et intercultures pour maximiser l’intérêt de ces services.
Publié le 19 juin 2025

Entre deux cultures de rente, les périodes d’intercultures peuvent être longues, jusqu’à 8 ou 9 mois entre une culture d’hiver (blé, orge) et une culture de printemps (tournesol, maïs, soja). Plutôt que de laisser le sol nu, des cultures intermédiaires sont implantées. Elles apportent de nombreux services favorables à l’écosystème, comme piéger et fixer l’azote et autres éléments nutritifs, protéger les sols et améliorer leur structure, apporter de la matière organique, faciliter le désherbage, lutter contre certains bioagresseurs…
Pour sélectionner les cultures intermédiaires qui apporteront les services attendus et pour concevoir des mélanges adaptés aux différentes cultures, il est nécessaire d’acquérir davantage de connaissances sur leurs caractéristiques, leurs intérêts. De 2020 à 2024, INRAE, Terres Inovia, l’entreprise Nataïs et le semencier MAS Seeds ont évalué les performances agronomiques et environnementales de plusieurs successions de cultures intermédiaires et de cultures de rentes de printemps.
« Nous avons étudié des cultures intermédiaires composées d’une seule espèce, ou en mélange de 2 ou 3 espèces, implantées avant des cultures de maïs popcorn et de tournesol », détaille Lionel Alletto, chercheur INRAE au laboratoire AGIR.
Des essais ont été conduits en laboratoire pour évaluer les potentiels de régulation de deux bioagresseurs du tournesol : l’orobanche et le verticillium. D’autres ont été réalisés en parcelles expérimentales pour évaluer les performances agronomiques et environnementales des cultures intermédiaires sur les cultures du maïs popcorn et de variétés de tournesol.
De réels services agronomiques
Ces travaux ont montré qu’une bonne qualité d’implantation des cultures intermédiaires est déterminante pour assurer la fourniture optimale de services écosystémiques. Les mélanges associant des espèces des familles des crucifères et des légumineuses semblent particulièrement efficaces pour réguler les adventices et améliorer la nutrition azotée de la culture suivante.
Certaines cultures intermédiaires aident à réguler les bioagresseurs du tournesol présents dans le sol, en permettant par exemple la diminution de la germination des graines d’orobanche et de verticilliose. Elles peuvent par ailleurs favoriser les interactions entre les plantes et les mycorhizes, champignons symbiotiques des racines améliorant la nutrition hydrominérale des plantes.
Les cultures intermédiaires peuvent aussi apporter une réponse au stress. Ainsi, elles atténuent le stress hydrique pendant la période végétative du tournesol qui les suit, mais elles perdent de leur efficacité en période post-floraison. Les cultures intermédiaires n’influencent pas de la même manière la dynamique de libération d’azote. Il faut donc être attentif à choisir les cultures intermédiaires adaptées à sa rotation, certaines espèces comme le seigle forestier, pénalisant par exemple plus les cultures de tournesol et de maïs popcorn qu’elles ne leur apportent de bénéfices. Ceci en diminuant par exemple la qualité sanitaire des grains de maïs popcorn et la productivité du tournesol.
Ces travaux ont ouvert de nouvelles opportunités de collaboration avec des entreprises semencières, et initié des projets visant à approfondir la compréhension des mécanismes de régulation de l'orobanche par les cultures intermédiaires. Il s’agira de cibler et de cribler des cultures intermédiaires spécifiques pour optimiser leurs services écosystémiques, notamment en matière de régulation de bioagresseurs difficiles à gérer, et mieux raisonner les éventuels compromis à établir. Ces avancées promettent de renforcer l’intégration des cultures intermédiaires dans des systèmes agricoles en vue d’une réduction de la dépendance aux intrants (engrais, pesticides) et une amélioration globale de la fertilité des sols.
Références :
Souques, L., Langlade, N.B., Debaeke, P., Labadie, M., Deschamps, N., Lackdari, R., Marchand, D., Lecloux, E., Tapy, C., Alletto, L., 2025. Phenotypic traits of sunflower varieties depend on the composition of cover crops. Field Crops Research. 321, 109692. https://doi.org/10.1016/j.fcr.2024.109692
Souques, L., Alletto, L., Blanchet, N., Casadebaig, P., Langlade, N.B., (2024). Cover crop residues mitigate impacts of water deficit on sunflower during vegetative growth with varietal differences, but not during seed development. European Journal of Agronomy 155, 127139. https://dx.doi.org/10.1016/j.eja.2024.127139
Wojciechowski, A., Seassau, C., Soerensen, L., Alletto, L., Lamichhane, J.R., 2023. Effects of cover crops on maize establishment, root mycorrhizal colonization, plant growth and grain yield depend on their botanical family: A global meta-analysis. Agriculture Ecosystems & Environment 356. https://DOI10.1016/j.agee.2023.108648