L'ombre des arbres : un refuge bénéfique pour le bien-être des animaux au pâturage

La présence d’arbres dans les pâturages, entre autres services, offre aux animaux un abri naturel contre le soleil et la chaleur. Cette étude montre que l’ombre est activement recherchée par les brebis, même en dehors des jours de forte chaleur, mais qu’il est nécessaire de définir un seuil de densité acceptable pour préserver la quantité d’herbe disponible et ne pas altérer les performances animales.

Publié le 27 juin 2025

© C. Ginane

Les systèmes agroforestiers peuvent procurer de nombreux services en élevage, en particulier pour les systèmes valorisant les ressources pâturables et soumis aux contraintes climatiques. C’est dans ce cadre que cette étude a été conduite dans le but d’évaluer les effets des arbres et de l’ombre qu’ils apportent sur le comportement, le bien-être et les performances de brebis au pâturage.

L’étude a été conduite à l’Herbipôle (63) et a porté sur trois prairies permanentes de 0,8 ha chacune, comportant soit :

  1. 1 arbre (représentant 0,8 % de la surface de la prairie) - Témoin (T),
  2. 60 arbres/ha (40 %) – Densité modérée (D),
  3. 150 arbres/ha (81 %) – Densité élevée (D+).

Durant trois années consécutives, chaque prairie a été pâturée en continu par dix brebis de race Romane et leurs deux agneaux (jusqu'au sevrage), au printemps et en été.
L'activité et le positionnement des brebis par rapport à l'ombre ont été relevés sur un total de 12 jours ensoleillés (6 à 7,5 h/j) au cours des trois ans (mai à août). Ces mêmes jours, les fréquences respiratoires des brebis ont été enregistrées. La station météorologique INRAE Climatik, située à proximité, a permis de caractériser le climat durant les journées d'observation. Les performances des brebis et de leurs agneaux, ainsi que la biomasse et la qualité de l’herbe disponible ont été mesurées au cours de la saison de pâturage.

Les brebis ont été logiquement plus souvent observées à l'ombre dans les prairies les plus arborées (44 % des scans sur T, 73 % sur D et 83 % sur D+). Toutefois, la recherche de l’ombre a été plus active dans les prairies les moins arborées, comme le montrent les indices de sélectivité de Jacobs[1] (0,93 sur T, 0,59 sur D, 0,12 sur D+), mettant en relation la proportion de temps passé à l’ombre avec celle de la surface des prairies couverte par les arbres. Selon les valeurs et les seuils des indices classiques développés sur bovins, les jours d'observation auraient engendré peu de stress thermique. Malgré cela, les brebis ont augmenté la proportion de temps passé à l’ombre avec la dégradation des conditions climatiques (augmentation du risque de stress thermique) de 122 % sur T, 44 % sur D et 11 % sur D+. Les fréquences respiratoires ont été légèrement inférieures dans les prairies arborées (55 mouvements/min sur D+, 63,3 sur D, 76,4 sur T), mais sont restées à des niveaux indiquant un niveau faible de stress. En termes d’activités, les brebis ont choisi l’ombre prioritairement pour le repos et la rumination, pouvant passer jusqu'à 100 % de ces activités à l'ombre, y compris chez les brebis T.
La recherche active de l'ombre des arbres par les brebis, même en l’absence de fortes chaleurs, traduit leur intérêt pour cette opportunité au pâturage. Ce comportement pourrait constituer un indicateur d’inconfort chez les animaux et constituer un élément de vigilance et d’alerte pour détecter et prévenir un stress thermique.

Concernant les performances des animaux, la présence des arbres a surtout pénalisé la reprise de poids et d’état corporel des brebis après le tarissement, de façon plus ou moins marquée selon l’année. La biomasse beaucoup plus faible de la prairie (-50 % en moyenne sur D+ relativement à T) a probablement joué un rôle majeur et n'a pas été compensée par l'amélioration de sa qualité. Cependant, même en l'absence d’aliment complémentaire de l’herbe pâturée, toutes les brebis ont assuré une croissance correcte et similaire de leurs agneaux, quels que soient l'année et le traitement.

Les perspectives de ces recherches sont de mieux comprendre les interactions entre les diverses composantes de ces systèmes et les motivations de l’animal à leur égard. Elles permettront d’identifier les modalités et la gestion de ces composantes permettant de maximiser les bénéfices tout en limitant les risques pour l’animal et pour l’éleveur.


[1] Jacobs J (1974). https://doi.org/10.1007/BF00384581

Cette étude a été financée par l’ADEME, dans le cadre du projet PARASOL  http://www.parasol.projet-agroforesterie.net/

Références :  Ginane, C.; Bernard, M.; Deiss, V.; Andueza, D.; Béral, C., 2025. Shade use, welfare and performance of ewes grazing in temperate silvopastures differing in tree density. Peer Community Journal, 5: 24.  https://doi.org/10.24072/pci.animsci.100303

Sylvie André

rédaction

Contacts

Cécile Ginane

Contact scientifique

UMR Herbivores

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