Tempêtes en forêt : une étude révèle leur potentiel impact climatique et économique

L’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 pour la France, formalisée dans la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC), repose sur des efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre et sur l’augmentation de l’absorption du carbone, dans laquelle le secteur forestier joue un rôle essentiel en stockant le carbone dans les arbres, les sols, l’humus, etc. La gestion forestière peut affecter les capacités de stockage du carbone en fonction des modalités de prélèvement et de valorisation des produits bois, qui permet la prolongation du stockage.

Dans la trajectoire pour atteindre la neutralité carbone, les événements extrêmes, et notamment les tempêtes, sont peu pris en compte. En détruisant des forêts, celles-ci peuvent impacter l’activité économique des propriétaires forestiers, mais également les puits de carbone (risque dit de non-permanence). Ces menaces, de faible probabilité mais de forte intensité, doivent donc être mieux comprises pour être gérées et anticipées.

Des scientifiques d’INRAE et d'AgroParisTech ont exploré cette incertitude liée aux risques de tempêtes, aussi bien du point de vue économique pour les différents acteurs forestiers que du point de vue climatique pour le stockage de carbone.

Ces derniers ont simulé l’impact potentiel des tempêtes sur les ressources en bois, sur l’activité économique des acteurs de la filière (propriétaires forestiers et consommateurs de bois), et sur le stockage de carbone, à l'horizon 2050. Pour cela, ils ont utilisé un modèle du secteur forestier français (FFSM) et des données issues de modèles climatiques sur les tempêtes européennes pour réaliser 300 simulations prenant en compte l’incertitude intrinsèque des régimes de tempête.

Les analyses révèlent que les tempêtes peuvent avoir des effets économiques hétérogènes : les propriétaires forestiers non affectés par ces événements bénéficient de prix du bois augmentés, tandis que le rétablissement économique pour les propriétaires affectés dépend de l’ampleur des dommages causés par la tempête, qui varient eux-mêmes entre les régions touchées. Pour les auteurs, une des pistes serait d’étudier différentes stratégies de stockage et de valorisation du bois endommagé pour limiter les effets économiques négatifs des tempêtes, et d’envisager la possibilité d’un mécanisme de mutualisation assurantielle entre les zones touchées et non touchées.

D’un point de vue climatique, les tempêtes impactent fortement les puits de carbone du secteur forestier, augmentant le risque de ne pas atteindre les objectifs d’atténuation climatique. En effet, dans 25 % des simulations les chercheurs ont observé une diminution moyenne de 24 % de la séquestration du carbone. Par ailleurs, dans 5 % des cas les stocks de carbone mettaient au moins 5 ans à se reconstituer après une tempête.

Ces résultats montrent la nécessité de prendre en compte ces risques à faible probabilité mais à fort impact dans les stratégies d'atténuation fondées sur la forêt, et suggèrent qu’une priorité doit être donnée à la baisse des émissions. En effet, dans un contexte de changement climatique, les régimes de perturbation pourraient s’intensifier.