illustration Patrick Pastuszka, l’âme du pêcheur d’innovation
© INRAE B. Nicolas

Biodiversité 7 min

Patrick Pastuszka, l’âme du pêcheur d’innovation

L’air marin a inspiré le forestier. Landais d’adoption, Patrick Pastuszka a fait de l’amélioration variétale du pin maritime une vraie « success story ». Ingénieux de vocation, il a poussé l’unité expérimentale Forêt Pierroton qu’il dirige à la pointe des besoins de la filière et de la recherche internationale. Avec force et bonhomie, essences naturellement mélangées chez cet explorateur de ressources.

Publié le 13 décembre 2016

Sur le campus Forêt-bois de Pierroton, Patrick Pastuszka en impose autant par sa carrure que par la bienveillance dont il fait preuve. « Animer des projets, agir pour le collectif, j’en ai toujours eu envie », raconte-t-il avec le grand sourire franc qui le caractérise. Au bout de la ligne de ce passionné de pêche, pointe l’idée qui a conduit ses plus belles réussites : « combler le vide entre les chercheurs et les professionnels de terrain. »

Sève des forêts landaises

Vulgariser les recherches pour les professionnels

Après 10 années en tant qu’ingénieur au Laboratoire d’amélioration des conifères, Patrick Pastuszka prend la direction de l’unité expérimentale (UE) Forêt Pierroton en 1994. « La forêt landaise fait vivre l’économie de la région. Le pin maritime est une espèce endémique remarquable, qui produit beaucoup dans des conditions difficiles. » Dans sa pépinière, il développe la conception des vergers à graines : « les graines récoltées fournissent aux professionnels le matériel amélioré à planter. Pour chaque génération, on parle de « VF » : « V » pour vigueur, « F » pour forme, respectivement critères de vitesse de croissance et de qualité. » Un travail d’innovation au long cours, aujourd’hui utilisé dans plus de  95 % des reboisements de pin maritime en Aquitaine. « La VF3, en production depuis 2011, sera utilisée pour les besoins des 15 ans à venir. Mais on est déjà en train de faire des propositions de VF4. »
Renforcer le dialogue avec les acteurs de la filière est en effet une de ses préoccupations majeures. Il y a 20 ans, il se lance dans la création du Groupement d’intérêt scientifique « Groupe pin maritime du futur », qu’il continue de présider. À l’origine axé sur la thématique seule de la génétique, il a su fédérer tous les acteurs opérationnels de la Recherche & développement des secteurs public et privé autour du mot « sylviculture ». « Nous collaborons aussi activement avec les chercheurs, en particulier Annie Raffin et Céline Méredieu (1) ». Un programme exemplaire et une grande fierté pour Patrick Pastuszka : « c’est un outil formidable au service de la vulgarisation des recherches pour les professionnels ».
Il en a conscience, pour rester au premier plan des programmes de recherche et de transfert, il faut maintenir les équipements à un haut niveau. Une vision stratégique dans la durée, dont il nourrit la Commission nationale des unités expérimentales (CNUE) de l’Inra qu’il anime depuis 2007. Au fil des ans, ses dispositifs innovants sont devenus équipements d’excellence !

Entraîneur de collectifs

Pépinière d'idées !

« Une belle réussite technologique ! On a pu continuellement se moderniser grâce aux contrats ou projets dans lesquels on s’implique. »
Avec Xylosylve, l’un des six plateaux techniques de l’EquipEx Xyloforest, Patrick Pastuszka part à la pêche au gros. Un projet d’1,8 millions d’euros, un site de 40 hectares, dont l’objectif est de mettre au point les systèmes de production sylvicoles de demain. « C’était la première vague des Investissements d’avenir. Nous avons eu la chance de ne pas partir de zéro en fédérant des initiatives et collaborations qui existaient déjà. »
Pour nouer ses liens avec la recherche, Patrick peut compter sur sa force motrice inépuisable et une botte secrète. « J’ai ma propre tasse dans les coins cafés de plusieurs unités », plaisante-t-il. Un lieu d’échange privilégié, où les discussions font naître de grands projets. Comme en témoigne Laurent Augusto, directeur de recherche (2). « Patrick a impulsé la création de cette plateforme, également inscrite dans le cadre du programme Icos (3). » Une installation in situ de systèmes de mesure du fonctionnement biochimique et biogéochimique des sols. « Il a de grandes qualités humaines et techniques, et s’inquiète toujours de l’environnement de travail de son équipe.»
En 2011, Patrick ferre le projet européen Reinfforce, réseau d’arboretum du Portugal à l’Ecosse pour suivre la santé et la croissance des espèces d’arbres de la façade atlantique de l’Europe, dans le contexte du changement climatique. « L’UE a apporté beaucoup au niveau méthodologique. Notre site rassemble 35 essences de feuillus et de résineux, issus de 150 provenances. Il est entièrement géré par l’un de nos techniciens » précise-t-il. Car son unité regroupe 20 agents sans niveau hiérarchique intermédiaire. Chacun est responsable de dispositifs techniques ou de réseaux expérimentaux. « C’est un bonheur pour moi de conduire une équipe jeune, motivée, qui contribue beaucoup au succès de l’UE ! »

À l’image des succès de sa carrière, le Laurier n’a de sens pour lui que s’il est partagé. « Ce qui me fait plaisir, c’est qu’il honore une dynamique collective. » La véritable récompense d’un animateur hors pair, dont la force de cohésion n’a d’égale que son insatiable volonté de dépasser la ligne de but de son terrain d’expérimentation.

 

Et après ?

«L’Inra est un bel institut qui m’a permis d’exercer plusieurs métiers et de côtoyer beaucoup de gens formidables ! » Une carrière bien remplie, et une source permanente de satisfaction : « on m’a fait confiance sur des postes à responsabilités et on m’a accordé les moyens nécessaires pour travailler. » L’important pour demain, c’est transmettre à ses successeurs les outils et infrastructures dont ils auront besoin pour qu’ils puissent continuer de contribuer au développement de l’Institut : « il faut que les acquis perdurent et que l’UE assure au mieux les missions dont l’Inra a besoin. » Un passage de témoin qui le conduira d’ici quelques années à sa vie de jeune retraité, avec pour objectif avoué : « rester calme ! »

 

(1) Unité mixte de recherche Biodiversité, gènes et communautés (Biogeco), Inra Bordeaux-Aquitaine, site de Pierroton
(2) Unité mixte de recherche Interaction sol plante atmosphère (ISPA), Inra Bordeaux-Aquitaine, site de Pierroton
(3) Lancé en 2008, ICOS (Integrated Carbon Observation System) est un projet européen d’infrastructure d’observation à long terme des gaz à effet de serre, développé par le CEA, l’Inra, et le CNRS-Insu. Initiative européenne portée par la France et intégrée aux 35 projets de Très grands Instruments de recherche (TGIR).

Equipe Patrick Pastuszka
Patrick Pastuszka, Laurier de l'Innovation technologique pour la recherche INRAE 2016, entouré de son équipe de l'unité expérimentale Forêt Pierroton à Cestas, centre Bordeaux-Aquitaine.

 

 

Julie CherigueneRédactrice

Contacts

Patrick PastuszkaUE0570 UEFP Unité Expérimentale Forêt Pierroton

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