Dossier revue
Société et territoiresMontpellier : à la reconquête du foncier agricole
Isabelle Touzard est vice-présidente de Montpellier Méditerranée Métropole, déléguée à la transition écologique et solidaire, biodiversité, énergie, agroécologie et alimentation. Entretien.
Publié le 24 juillet 2024
Pourquoi Montpellier Méditerranée Métropole s’intéresse-t-elle à l’agriculture urbaine et périurbaine ?

Il y a beaucoup de concurrence sur le foncier agricole dans notre région. Les urbains souhaitent acquérir des terrains de loisirs, nous avons besoin de terres pour développer les énergies renouvelables, notamment le photovoltaïque, ou encore des maîtres d’ouvrage cherchent des terres pour faire de la compensation environnementale imposée pour toute nouvelle construction d’infrastructure. De ce fait, le prix des terres cultivables augmente et devient inaccessible pour les agriculteurs. Les propriétaires privés attendent que leurs terrains prennent de la valeur en devenant constructibles, ce qui entraîne un enfrichement de terres pourtant de bonne qualité. Sur les 11 000 hectares de surfaces agricoles que compte la Métropole, 3 000 hectares sont en friche dont 400 hectares environ sont irrigables. Au-delà des risques incendie, de « cabanisation » et de dégradation des paysages, ce développement des friches réduit la capacité à produire et nourrir la ville, et c’est aussi une perte de biodiversité car on supprime la mosaïque de milieux et de cultures (vigne, jachères, bois, cultures, etc.) qui offre un habitat diversifié à la faune. Notre volonté est de mettre en œuvre des actions pour reconquérir ces terres, les mettre à disposition des agriculteurs, promouvoir l’agroécologie qui préserve l’environnement, et relocaliser l’alimentation pour que les habitants de la Métropole aient un accès à une alimentation saine et durable.
Quelles sont vos actions ?
Nous finalisons notre plan local d’urbanisme intercommunal où ont été préservées des terres pour l’agriculture et où seuls les agriculteurs peuvent construire du bâti pour leur exploitation. On accompagne également les communes de la Métropole dans leurs projets d’installation d’agriculteurs et agricultrices en lien avec l’approvisionnement des cantines et des marchés.
Nous finalisons notre plan local d’urbanisme intercommunal où ont été préservées des terres pour l’agriculture et où seuls les agriculteurs peuvent construire du bâti.
On souhaite promouvoir l’agroécologie pour concilier les activités agricoles et la restauration des écosystèmes, avec par exemple des haies, des fossés, des murets, des noues (fossés peu profonds) pour favoriser la biodiversité et maintenir ou rétablir les continuités écologiques. INRAE nous accompagne d’ailleurs dans la mise en place de pratiques agroécologiques notamment dans un contexte de rareté de l’eau en se fondant sur les apports de l’hydrologie régénérative qui consiste à restaurer et améliorer les cycles naturels de l’eau dans les écosystèmes. Nous développons aussi un projet singulier en zone périurbaine en France. Nous travaillons à la création de deux associations de foncier agricole (AFA) qui géreront les terres agricoles détenues par les communes, par la Métropole, par d’autres propriétaires institutionnels et quelques propriétaires privés. Ces AFA agiront comme des syndics mais pour le foncier ! Elles porteront et géreront des appels à projets pour louer ces terres à des éleveurs de brebis et de chèvres, à des maraîchers ou à des producteurs de céréales et de légumineuses.
Enfin, nous nous engageons dans le développement de nouvelles filières, lentilles et pois chiches, dont la culture consomme peu d’eau. Pour cela on garantit aux agriculteurs un prix d’achat de ces produits en partie achetés par la cuisine centrale de Montpellier qui fournit les cantines de la ville.
Quel est le point fort de votre stratégie ?
Pour mener à bien ces actions, nous travaillons avec INRAE et tous les acteurs concernés par ces problématiques : les chambres d’agriculture, la SAFER, les Civam, le réseau InPACT, les collectivités, les consommateurs, etc. pour réfléchir collectivement à la manière de développer encore l’appui à la diversification des exploitations agricoles, dans une perspective d’adaptation au changement climatique. Et il s’avère que la coordination entre tous ces acteurs est un facteur clé de réussite !
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Élodie Regnier
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Rédactrice
Direction de la communication