Bioéconomie 5 min

Matériaux imprimables 3D pour l’obtention de pastilles comestibles à propriétés thérapeutiques

Le développement de la fabrication additive permet d’envisager l’obtention de pastilles biorésorbables à fonctionnalités thérapeutiques. Les biopolymères végétaux sont des ressources potentielles, en particulier la zéine, une protéine du maïs, plastifiée par du glycérol et un Principe Actif-Liquide Ionique, qui présente des propriétés physiques adéquates pour cibler des applications dans le domaine pharmaceutique.

Publié le 21 mai 2024

illustration Matériaux imprimables 3D pour l’obtention de pastilles comestibles à propriétés thérapeutiques
© Laurent Chaunier-Anne-Laure Réguerre-INRAE

La Fabrication Additive par Extrusion de Matière (FA-EM) est un procédé d’impression 3D qui permet de viser la réalisation de pièces à façon pour contrôler la libération de molécules d’intérêt thérapeutique. La mise au point de matériaux comestibles et biorésorbables est un défi, et certains biopolymères végétaux sont pertinents pour de telles applications. La zéine, une protéine extraite des grains de maïs, peut être plastifiée par du glycérol et un Principe Actif - Liquide Ionique (PA-LI), constitué d’un mélange de Lidocaïne et d’Ibuprofène.

Impression 3D de matrices comestibles et résorbables à fonctionnalités thérapeutiques obtenues à partir d’une protéine de maïs plastifiée par le glycérol et un Principe Actif - Liquide Ionique

Les caractéristiques thermo-rhéologiques de ce biopolymère ont été mesurées, ainsi que son aptitude à l’impression 3D. Un four a été conçu pour permettre de réaliser le suivi in situ de la fusion-adhésion de deux filaments juxtaposés de ce biopolymère, pour des températures variant de 100°C à 140°C (Fig.1), en micro-tomographie X, sur la ligne ANATOMIX du Synchrotron SOLEIL. Les deux filaments extrudés sont juxtaposés sur un portoir en aluminium. Le four est descendu autour du portoir sur lequel reposent les échantillons, permettant la rotation contrôlée des filaments et l’obtention de scans-3D au cours de leur fusion-adhésion à haute température.

Deux matériaux à base de zéine ont été extrudés pour réaliser ces essais : (i) zéine plastifiée par 20% de glycérol ajouté comme seul plastifiant (matériau A) ; (ii) zéine plastifiée par 10% de glycérol et 10% de PA-LI (matériau B). La mesure de la vitesse d’adhésion entre les filaments est réalisée par la détermination de l’angle de fusion-adhésion θ, pour un front de fusion de longueur 2.x, entre deux filaments extrudés de diamètre 2.r.

Impression 3D de matrices comestibles et résorbables à fonctionnalités thérapeutiques obtenues à partir d’une protéine de maïs plastifiée par le glycérol et un Principe Actif - Liquide Ionique

Les deux compositions présentent des vitesses de frittage visqueux augmentées avec la température entre 100°C et 140°C (Fig.2). Dans le cas du matériau A, plastifié par le glycérol uniquement, après une phase de latence d’une minute, correspondant à la mise en température des filaments, la vitesse de frittage augmente de 3,2.10-3 rad/s à 100°C, à 9,3.10-3 rad/s à 140°C. La même tendance est mesurée avec le matériau B, mais pour des vitesses faibles et augmentant seulement de 0,8.10-3 rad/s à 100°C à 6.10-3 rad/s à 140°C (Fig. 2). Ces résultats sont liés aux viscosités plus importantes mesurées dans le cas du matériau B, de l’ordre de 65% supérieures à celles du matériau A. La co-plastification par le glycérol combiné au PA-LI (matériau B), est moins efficace pour réduire la viscosité du fondu que l’ajout de glycérol seul.

Les matériaux à base de zéine thermoplastique présentent des capacités d’adhésion mises en évidence lors des essais de micro-tomographie X. Ils permettent la réalisation de pastilles imprimées en 3D, notamment pour des pastilles denses avec un taux de remplissage élevé (>95%), favorisant l’adhésion des filaments (Fig.3). En revanche, pour des pastilles aux structures cellulaires plus complexes, des défauts apparaissent au-delà de 3 couches déposées pour la composition co-plastifiée (B), aux capacités de frittage moins importantes. Une des perspectives de ce travail est la compréhension des mécanismes de co-plastification de la zéine. De plus, la détermination des capacités d’adhésion de couches superposées est aussi une perspective déterminante pour un meilleur contrôle des paramètres d’impression et l’amélioration de la conception de modèles numériques de pièces imprimées 3D.

Figure 3. Pastilles imprimées 3D à base de zéine plastifiée (Matériau A, en haut ; Matériau B, en bas ; ⌀Pastille=20mm (a-). Impression 3D de pastilles à structure complexe : matériau A (b-) et matériau B (c-)

PARTENAIRES SCIENTIFIQUES : T. Weitkamp (ligne de lumière ANATOMIX du Synchrotron SOLEIL, Saint-Aubin), S. Florin-Muschert (Inserm U 1008/ Laboratoire de Pharmacotechnie industrielle/ UFR3S - Pharmacie, Université de Lille) et Lydie Viau (UTINAM Institute, UMR CNRS 6213, Université de Bourgogne Franche-Comté, Besançon).

FINANCEMENT : La thèse de Mélanie Thadasack a été réalisée grâce à un financement INRAE-Région Pays de la Loire.

PUBLICATION ASSOCIEE:

Thadasack, M., Réguerre, A-L., Leroy, E., Guessasma, S., Lourdin, D., Weitkamp, T., & Chaunier, L. (2023). Tuning pharmaceutically active zein-based formulations for additive manufacturing. Additive Manufacturing, 103849. https://doi.org/10.1016/j.addma.2023.103849

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