Dossier presse

Eau potable

Questions 14 à 20

Publié le 13 avril 2023

14. Peut-on suivre en temps réel les consommations des acteurs ?

Le suivi quantitatif des consommations a progressivement été rendu obligatoire pour l’ensemble des prélèvements d’eau par l’imposition d’un compteur, permettant de relever visuellement l’index de consommation. Cette relève manuelle nécessite donc du temps, ce qui explique que la facturation des usagers domestiques est le plus souvent semestrielle ; cela conduit aussi par exemple les gestionnaires qui instaurent des mesures à des pas de temps plus fins (quotas hebdomadaires par exemple) à demander aux agriculteurs un relevé, charge aux gestionnaires d’effectuer des contrôles aléatoires pour bien vérifier leur exactitude.

Depuis une dizaine d’années, certains gestionnaires déploient des compteurs communicants, permettant d’enregistrer ces index à des pas de temps prédéfinis et de les transmettre à distance (radiorelève ou télérelève). Ils ne sont néanmoins pas « intelligents », car ils ne peuvent agir en réduisant le débit ou en stoppant l’amenée d’eau. Outre le fait que la relève est facilitée et moins coûteuse, ils permettent d’avoir une plus grande fréquence de relevés et donc un meilleur suivi des consommations.

Comme pour tout instrument de mesure, 4 phases sont à distinguer pour explorer leurs potentialités et leurs limites : la mesure, le transfert, l’analyse et le retour à l’usager. Elles conditionnent la capacité d’un suivi en temps réel. Une des principales contraintes à l’heure actuelle est technique : la durée de vie de la pile, liée au nombre de mesures prises et de transferts d’informations. D’où le fait que les compteurs actuellement en service transmettent des informations généralement une fois par jour. Et l’analyse de la donnée recueillie nécessite aussi un traitement avant diffusion. Ces différentes contraintes expliquent que l’on ne puisse pas encore suivre en temps réel les consommations des acteurs, un délai variant entre 2 à 4 jours étant observé.

Mais si le suivi en temps réel n’est pas encore possible, ces compteurs améliorent significativement la connaissance que l’on a du réseau (détection de fuites possible, notamment en ajoutant des compteurs sur des branches du réseau) et permettent au gestionnaire un suivi à un pas de temps plus fin de la consommation. Le gestionnaire peut alors mieux gérer son système de distribution, mais aussi instaurer des mesures incitant les usagers à réduire leurs consommations durant les pointes (information ou signaux tarifaires adaptés).

Les compteurs devraient aussi pouvoir rendre plus actifs les usagers dans leur maîtrise de la consommation, la plupart des systèmes proposant un retour à l’usager (sous forme d’un compteur téléporté, soit à l’intérieur du logement, soit sur un site internet dédié), permettant le paramétrage d’alertes. Mais on observe une faible adoption de ce service (entre 2 et 8 % des usagers concernés s’en servent).

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15. Quels sont les moyens existants de concertation autour du partage de l’eau ?

L’eau étant un bien commun, son partage équitable entre tous les acteurs doit faire l’objet de concertations sur les usages, y compris la part d’eau laissée à la nature, à l’échelle des territoires.

C’est l’un des objectifs des schémas d’aménagement et de gestion des eaux (SAGE), outil de planification institué par la loi sur l’eau de 1992, visant à une gestion équilibrée et durable des eaux à l’échelle locale d’un bassin hydrographique. Il s’agit de concilier le développement des activités humaines et la protection des milieux aquatiques. Dans les territoires subissant fréquemment des déséquilibres entre l’eau disponible et les consommations, un classement en zone de répartition des eaux (ZRE) permet d’abaisser drastiquement les seuils de déclaration et d’autorisation des prélèvements (art. R211-71 du Code de l’environnement). Puis la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (LEMA) a institué en 2006 des volumes prélevables par usage (par an ou parfois par période) à partir d’études hydrologiques et hydrogéologiques, complétées par des analyses des besoins des secteurs économiques.

Depuis 2015, les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) sont les déclinaisons opérationnelles de la gestion quantitative de l’eau des SAGE. Ils proposent une démarche de concertation pour l’ensemble des parties prenantes sur les enjeux quantitatifs de l’eau d’un territoire en tension (services d’eau potable, irrigants, industriels, producteurs d’énergie, acteurs du tourisme, de la navigation, de la pêche, acteurs de la protection de l’environnement). Ils visent à identifier les voies et moyens d’atteindre les objectifs fixés dans le SAGE, en intégrant les effets du changement climatique. Un guide d’aide à la réalisation d’analyses économiques et financières des projets de territoire de gestion
de l’eau (PTGE) à composante agricole a été publié par INRAE en 2019.

Ce guide aborde notamment l’identification des actions et des scénarios pour le PTGE, et les principes de l’analyse économique et financière dans le PTGE, avec un zoom sur les méthodes d’analyse économique et financière pour les usages agricoles.

https://agriculture.gouv.fr/les-projets-de-territoire-pour-la-gestion-de-leau-ptge-au-service-dune-agriculture-durable 

D’autres moyens de concertation sont développés par INRAE. C’est ce qu’on appelle l’ingénierie de la participation sur le terrain, utilisée par les acteurs. INRAE a pu tester ces méthodes de décisions-actions. Il s’agit par exemple de jeux de rôles sérieux type Cooplage (« Coupler des Outils Ouverts et Participatifs pour Laisser les Acteurs s’adapter pour la Gestion de l’Eau ») qui permettent, sur la base d’une ressource en quantité limitée et finie, et à partir du projet de développement économique et social d’un territoire, d’imaginer différents scénarios d’usage de la ressource et de rechercher un consensus parmi les différents acteurs.

http://www.g-eau.fr/index.php/fr/productions/methodes-et-outils/item/888-l-approche-cooplage  

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16. Comment fonctionne un réseau d’eau potable, du prélèvement à la sortie du robinet ?

En France, l’eau du robinet provient à 66% des nappes souterraines (sources, puits, forages) et à 34% des eaux de surface : cours d’eau, lacs*. L’eau doit toujours être plus ou moins traitée selon la qualité de la ressource.

Avant de couler au robinet du consommateur, l’eau parcourt un réseau de conduites parfois long de plusieurs centaines de kilomètres. En France, la longueur cumulée des réseaux d’eau potable avoisine 900 000 kilomètres, soit plus de 22 fois la circonférence de la Terre.

Ce patrimoine, estimé à 100 milliards d’euros, s’agrandit en moyenne de 3.500 kilomètres par an en métropole (données CGDD du MTE) du fait de la densification des zones urbaines et littorales.

Air d’alimentation de captage : zone en surface sur laquelle l’eau qui s’infiltre ou ruisselle alimente le captage.

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17. Existe-t-il beaucoup de fuites d’eau dans les réseaux ? Comment peut-on faire pour les résorber ?

La problématique des fuites dans les réseaux d’eau concerne directement l’approvisionnement en eau potable des foyers et l’adaptation des villes face à la raréfaction de la ressource.

Cette problématique est encore plus importante dans certains territoires où seul 1 litre sur 3 parvient jusqu’au robinet. Sur 5,5 milliards de m3 prélevés* chaque année en France pour assurer l’alimentation en eau potable, plus d’un milliard de m3 d’eau est perdu dans les réseaux de distribution. Le rendement de nos réseaux est ainsi de 80% et son taux de renouvellement de seulement 0.67% en moyenne nationale.

Les travaux d’INRAE sur les réseaux d’eau potable menés à Bordeaux et Strasbourg concernent tant leur sécurisation (contamination de l'eau accidentelle ou volontaire) que la lutte contre les fuites.

Ainsi INRAE a élaboré un guide en 3 volumes, sous l’égide de l’OFB et en partenariat avec l’Astee (Association scientifique et technique pour l’eau et l’environnement ), pour aider les services publics de l’eau à améliorer les réseaux d’eau potable sur la base d’actions et de fiches individualisées, en fonction de la situation locale propre.

Découvrir le guide : https://www.inrae.fr/actualites/guide-reduire-pertes-deau-potable

*5.5 milliards de m3 prélevés, 0.5 perdu ou utilisé à l’amont de la distribution (fonctionnement des installations de traitement), 5 distribués dont 4 consommés et 1 de fuites.

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18. Comment évalue-t-on le coût de l’eau ?

Le service de distribution d’eau potable consiste à pomper l’eau, à la traiter pour la rendre potable, puis à l’acheminer jusqu’au robinet des ménages. Une fois l’eau utilisée, celle-ci doit être collectée, traitée et assainie avant d’être rejetée dans le milieu naturel (service d’assainissement). Ces deux services nécessitent la construction et la maintenance d’un ensemble d’infrastructures (stations de pompage et de traitement, canalisations, etc.) ainsi que de l’électricité, des produits chimiques, du personnel pour les faire fonctionner. Ces coûts sont répercutés sur la facture du consommateur.

Outre les coûts liés au bon fonctionnement des services, la consommation d’eau engendre des coûts indirects pour les autres usagers et pour l’environnement. Lorsqu’un ménage consomme de l’eau au robinet, il prélève dans la ressource (eaux souterraines ou eaux de surface) et contribue à la dégradation de sa qualité. Pour tenir compte de l’impact des consommations d’eau sur l’environnement (d'un point de vue quantitatif et qualitatif), on a ajouté sur la facture des redevances prélèvement et pollution.

Le prix de l’eau varie entre les territoires car les services de distribution et d’assainissement sont gérés au niveau local (communal ou intercommunal) et les coûts varient d’un service à l’autre. Les redevances sont établies par les agences de l’eau et varient aussi d’une agence à l’autre.

Ce principe que l’eau doit être payée à son juste prix, c’est-à-dire que le prix facturé aux usagers doit couvrir le coût de mise à disposition de l’eau au domicile et les coûts indirects causés aux autres usagers et à l’environnement, émane d’une règlementation européenne. C’est ce principe qui régit la tarification de l’eau en France.

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19. Qu’est-ce que la tarification progressive de l’eau ?

On estime à 149 L en moyenne par jour la consommation d’eau potable d’un Français, soit une consommation domestique de 54,3 m3 par habitant et par an.

En France, les factures d’eau des ménages sont généralement composées d’une part fixe ou abonnement, qui ne dépend pas du volume d’eau consommé, et d’une part variable qui est calculée en fonction des m3 consommés.

Aujourd’hui, cette part variable est le plus souvent facturée à un prix qui reste le même quel que soit le nombre de m3 consommés.

Un passage à une tarification progressive impliquerait que le prix du m3 change au-delà d’un certain volume consommé.

Un exemple de tarification progressive

  • Prix du m3 pour toute consommation inférieure ou égale à 15 m3 : 1 € par m3.
  • Prix du m3 pour toute consommation supérieure à 15 m3 : 1,50 € par m3.

Ainsi, un ménage qui consomme 25 m3verrait sa facture s'établir comme suit : 15 x 1 + (25-15) x 1,50 = 30 € (les 15 premiers m3 consommés sont facturés 1 € par m3 et les 10 m3 suivants sont facturés à 1,50 €).

La tarification progressive est souvent décrite comme un instrument utile pour répondre à plusieurs objectifs :

  • Incitation à réduire les gaspillages en faisant payer plus cher les m3 d’eau consommés au-delà d’un certain seuil.
  • Couverture des coûts en appliquant un tarif subventionné aux premiers m3 et en faisant payer un prix supérieur au coût de mise à disposition au-delà d’un certain seuil. On parle alors de subventions croisées des gros consommateurs vers les plus petits.
  • Équité car on suppose que les petits consommateurs sont les ménages aux revenus les plus modestes alors que les gros consommateurs sont les ménages les plus riches. On parle parfois de « tarification sociale ».

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20. Étudie-t-on les usages de l’eau des Français à l’échelle du foyer ?

INRAE travaille sur ces questions à partir d'enquêtes par questionnaire à des échelles géographiques restreintes (une métropole, un service d'eau par ex.). L’objectif est de mieux appréhender la perception et la compréhension qu'ont les ménages français des enjeux autour de l'eau potable, en lien notamment avec les effets du changement climatique sur la disponibilité qualitative et quantitative de la ressource. L’enjeu des études croisées en microsociologie et économie est aussi de mieux caractériser les pratiques d'économie d'eau et leur diffusion.

https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/etude_eau.pdf

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