Dossier revue
Alimentation, santé globale

Favoriser une dynamique globale des systèmes agricoles et alimentaires : exemples

Publié le 10 janvier 2023

1. Développer des pratiques agricoles efficaces et respectueuses de l’environnement

L'alimentation, tout un système (dessin)

Pour développer des pratiques agricoles efficaces et respectueuses de l’environnement, il faut évaluer les potentiels des terres mobilisables, et déterminer quel sera leur usage.

INRAE et le Cirad ont présenté en 2020 les résultats du programme GloFoodS « Transitions pour la sécurité alimentaire globale », qui a financé 45 projets de recherche, mobilisant plus de 200 chercheurs pendant 8 ans sur des terrains français et internationaux, Afrique francophone et Asie du Sud-Est, notamment. Les travaux ont contribué à mieux comprendre les variations des rendements de production végétales et animales, à évaluer à l’échelle globale les potentiels de terres mobilisables à des fins alimentaires, énergétiques, bio-industrielles, à identifier les procédés et organisations limitant les pertes et gaspillages, et enfin à renseigner les liens entre l’accès des ménages à l’alimentation et les inégalités sociales.

Parmi les objectifs : proposer des systèmes et pratiques de production plus efficaces et respectueux de l’environnement, et limiter les pertes et gaspillages. Ces deux volets de transition jouent sur des innovations dans l’organisation des chaînes de valeur alimentaires, pour une meilleure accessibilité à une alimentation saine et suffisante, via des procédés agroalimentaires plus économes des ressources agricoles.

Par exemple, le projet GloFoodS « Légende » a étudié l’adaptation de l’agriculture à l’urbanisation sur une étude de cas à Madagascar. Les résultats ont montré que l’agriculture urbaine et périurbaine joue un rôle phare pour la sécurité alimentaire : elle approvisionne en produits frais la capitale et couvre la quasi-totalité des besoins de ces populations en œufs et volaille, ainsi qu’une grande partie de leurs besoins en légumes. L’agriculture ne plie donc pas fatalement face à l’extension urbaine, elle se maintient et se développe, grâce à des agriculteurs qui adaptent leurs systèmes de production en introduisant de nouvelles cultures et en se servant d’approches agroécologiques.

Autre exemple de mobilisation du levier de modification des systèmes : le projet GloFoodS « Serena » visait à explorer dans le bassin arachidier du Sénégal les potentiels bénéfices des parcs agroforestiers sur la sécurité alimentaire et sur les moyens d’existence des ménages ruraux, en jouant sur la diversité des paysages agricoles. À l’aide de données de télédétection, de méthodes statistiques et de modélisation, l’étude a montré l’intérêt de la présence d’arbres pour la productivité des cultures, mais jusqu’à un certain seuil : celui où l’arbre entre en compétition avec la culture. Il est donc apparu que les arbres ne peuvent pas renforcer directement les stratégies d’adaptation des ménages en situation d’insécurité alimentaire, mais contribuent à l’amélioration du système de production.

2. Bâtir des systèmes alimentaires résilients et solidaires

En construisant des solutions à tous les niveaux (international, national et local), il est possible de bâtir des systèmes alimentaires résilients et solidaires.

Une des clés : accroître les échanges entre les producteurs et les consommateurs.

Parce qu’il n’existe pas de solution unique, INRAE s’est associé à la FAO pour étudier de nombreuses initiatives à travers le monde visant à produire, partager, vendre et consommer des aliments plus durables. Cette étude, pilotée par Allison Marie Loconto, sociologue, directrice adjointe du laboratoire interdisciplinaire sciences, innovations et société (LISIS) d’INRAE, montre que la résilience des systèmes alimentaires est conditionnée notamment par des innovations pour la relocalisation et la diversification des systèmes alimentaires. Des mesures incitatives peuvent amener à prioriser l’accès aux aliments bénéfiques pour les communautés vulnérables, promouvoir l’agriculture durable, y compris la protection de la biodiversité, et encourager des régimes alimentaires sains et nutritifs. Ce sont, par exemple, la création de réseaux sociaux en Finlande pour faciliter la communication entre producteurs et consommateurs, le développement de « champs-écoles » pour les producteurs ou de « fermes incubatrices » afin que les producteurs puissent tester de nouvelles pratiques sans risque économique en France, ou encore la mise en place, au Brésil, d’un plan de collecte des déchets organiques sur 900 marchés hebdomadaires pour du compost.

Rapprocher producteurs et consommateurs

Le résultat fondamental de ces initiatives est d’accroître les échanges entre les producteurs et les consommateurs, et de modifier la façon dont ils influencent et interagissent au sein de leur environnement alimentaire. Cette étude a fait l’objet d’un ouvrage conçu comme un manuel à destination des acteurs qui souhaitent innover dans les systèmes alimentaires dans lesquels ils sont engagés. Ces types de systèmes alimentaires locaux ont démontré leur résilience pendant la crise de la Covid-19, en Afrique, en Inde ou au Brésil. Ils utilisent tous des pratiques d’agriculture durables basées sur les 10 éléments de l’agroécologie pour produire des aliments vendus sur les marchés locaux et régionaux, assurant ainsi la sécurité alimentaire et l’accès à une alimentation saine et abordable pour les populations défavorisées et les classes moyennes.

3. Stopper le gaspillage à la chaîne

En Europe, 1 aliment sur 5 est perdu ou gaspillé, soit 173 kg par personne chaque année.

En Europe, 1 aliment sur 5 est perdu ou gaspillé, soit 173 kg par personne chaque année. De manière générale, dans les pays développés, les 2/3 du gaspillage alimentaire se produisent du côté du consommateur, le reste étant perdu le long de la chaîne de production. « Dans les pays en voie de développement, la pauvreté pousse de fait les consommateurs à ne pas gaspiller. Les pertes surviennent plutôt aux stades de la récolte, du transport et du stockage. Entrent en jeu les conditions climatiques difficiles, les maladies végétales, les équipements inadaptés et les routes en mauvais état. En Afrique ou en Asie du Sud-Est, les pertes post-récolte en céréales représentent jusqu’à 20 % de la production », précise Barbara Redlingshöfer, ingénieure INRAE à l’unité mixte de recherche SADAPT (Sciences pour l’action et le développement activité produits territoire). Ses travaux proposent de combiner différentes solutions pour réduire les pertes alimentaires. D’un côté, améliorer génétiquement les variétés pour les rendre résistantes aux maladies, optimiser le matériel de récolte et mieux organiser les filières. De l’autre, baisser les exigences des consommateurs quant à l’aspect des produits, des fruits et des légumes notamment. 

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