Sécheresses : partager les ressources en eau et les préserver

Qu’est-ce qu’une sécheresse ? Comment mieux les prévoir et les gérer dans un contexte de changement climatique ? Agriculteurs, en particulier irriguants, consommateurs, industries… utilisent l’eau. Peut-on évoluer vers des usages plus sobres, mieux préserver et partager les ressources ? Le point sur les connaissances et les outils disponibles.

Qu’est-ce que la sécheresse ?

La sécheresse est un déficit anormal, sur une période prolongée, d’une (au moins) des composantes du cycle de l’eau terrestre. Lorsque la pénurie d’eau est structurelle, on ne parle plus de sécheresse mais d’aridité. Un déficit en eau dans les milieux impacte les écosystèmes naturels et agricoles, arbres, plantes, animaux et microorganismes… mais aussi toutes les activités humaines : agriculture, production d’eau potable, usages récréatifs (piscines, tourisme…), production d’énergie, activités industrielles.

On distingue plusieurs types de sécheresses :

La sécheresse météorologique,

qui correspond à un déficit prolongé de précipitations.

La sécheresse édaphique,

 Les éléments du bilan hydrique au niveau d’une culture
Éléments du bilan hydrique au niveau d’une culture.

c’est-à-dire du sol, dite aussi sécheresse agricole car elle résulte d’un manque d’eau disponible dans le sol pour les plantes et pour la photosynthèse. Elle affecte toute la production végétale, et indirectement la production animale. On l’estime à partir d’un bilan hydrique (précipitations, évaporation et évapotranspiration par les plantes) et de la réserve utile des sols (RU). Avec le changement climatique, ces épisodes sont plus fréquents et plus intenses. Les cultures sont différemment pénalisées : ce sont en général les cultures de printemps qui souffrent le plus dans les systèmes non irrigués. En 2011, en raison de la précocité de la sécheresse, ce sont les prairies, les fourrages et certaines céréales qui ont le plus souffert. Un dispositif de veille d'INRAE permet de faire des prévisions sur l'impact de la sécheresse en cours sur les rendements.

« Un sol en bon état peut stocker temporairement de l’eau qui est soit à disposition des plantes (flux d'eau verte), soit transférée vers des nappes souterraines ou des cours d’eau (flux d'eau bleue). Pour préserver ces fonctions essentielles des sols, on recommande de les couvrir par de la végétation, celle-ci pouvant être vivante (culture, enherbement) ou morte (résidus de culture, copeaux de bois). » Isabelle Cousin

La sécheresse hydrologique

Schéma propagation entre types de sécheresse
Sécheresse : des risques en cascade (Van Loon, 2015).

correspond à un déficit de débit des cours d’eau (étiage), à des niveaux bas des nappes ou des retenues, sur une période pendant laquelle les débits ou les niveaux sont très inférieurs à la moyenne. La sécheresse hydrologique a des conséquences sur l’eau comme milieu de vie et comme ressource : les écosystèmes aquatiques sont impactés par les sécheresses ; des pénuries d’eau peuvent affecter la vie économique. Une attention grandissante est portée à la fréquence et à la durée des périodes d’assec (sans écoulement) et à l’intermittence des cours d’eau. Les conséquences écologiques et économiques de la sécheresse hydrologique peuvent être aggravées par une concentration des polluants qui dégradent la qualité de l’eau.

En cas de sécheresse, des « arrêtés sécheresse » peuvent être prescrits par les préfets pour une durée limitée et un périmètre déterminé. Priorité est donnée au secteur de la santé, à la sécurité civile, à l’approvisionnement en eau potable et à la préservation des écosystèmes aquatiques. Quatre niveaux sont définis (vigilance, alerte, alerte renforcée, crise) qui sont assortis de mesures de limitation des prélèvements.

La canicule correspond à une période de très forte chaleur. Il existe un lien physique entre canicule et sécheresse : les températures élevées accentuent la sécheresse des sols. En retour, la plus faible quantité de vapeur d’eau dans l’air favorise son échauffement.

Découvrez le portail DRIAS-Eau, les futurs de l'eau

dont INRAE est partenaire. DRIAS-Eau propose un ensemble de projections hydrologiques (débit des cours d’eau, évapotranspiration, humidité des sols…) en climat futur, basées sur les différents scénarios du GIEC. Il permet de visualiser, sous forme de cartes, l’évolution de la ressource en eau au plus près des territoires, à court, moyen et long termes.


 

Cycle de l’eau, prévision et partage de la ressource… le tour de la question avec nos dossiers

Le changement climatique exacerbe les tensions autour de l’eau, avec des excès (inondations) ou des carences d’eau (sécheresses estivales mais également de plus en plus souvent hivernales) plus fortes. La gestion de l’eau est centrale pour faire face à ces changements et s’y adapter durablement. Elle doit prendre en compte tous les usages (agricoles, ménagers et industriels) et mobiliser la concertation pour mieux préserver et partager ce bien commun.

S’adapter dans la vie quotidienne

La production d'eau potable représente en moyenne 26 % de la consommations d’eau en France. En moyenne, 80 % de l’eau potable arrive chez les consommateurs, le reste retourne au milieu naturel à cause de fuites liées à des défauts dans les réseaux. Dans certains territoires, les fuites sont très importantes, pouvant atteindre voire dépasser 50 % de l’eau acheminée. Les usages industriels consomment quant à eux 16 % de l’eau. Quels diagnostics, quelles solutions pour optimiser ou réduire nos consommations, et éviter les pertes ?

Focus - Stocker l’eau ?

Si le meilleur stockage est dans les sols et les nappes phréatiques, sous nos pieds, que penser des retenues, notamment collinaires, et des réserves alimentées par pompage (« bassines ») ? Avant tout projet de stockage, il faut commence par discuter le projet pour le territoire concerné : Pour quels usages ? Peut-on les diversifier ? Quels emplois et valeur ajoutée créés ? Quelles autres régions en bénéficieraient ? Quels impacts sur les milieux et la biodiversité ? Répondre à ces questions dans une démarche de concertation permet de raisonner de tels aménagements.

Stratégies d’adaptation pour l’agriculture et la forêt

L’agriculture irriguée compte pour environ 58 % de la consommation d’eau en France. En 2020, en France, 6,8 % des surfaces agricoles ont été irriguées, soit plus de 1,8 million d’hectares. Les légumes, les vergers, le soja, le maïs et les pommes de terre sont les cultures qui demandent le plus d’eau. Le maïs représente un tiers des surfaces irriguées ; les légumes et fruits réunis représentent 15 % du total des surfaces irriguées.

Pour faire face aux changements en cours, les stratégies d’adaptation envisagent l’eau comme un facteur de sécurisation (et non de maximisation) des productions. Qu’est-ce qu’on irrigue ? Où ? C’est l’ensemble de notre système alimentaire et sa capacité à évoluer qui sont aussi questionnés.

L’adaptation concerne également les productions non irriguées qui doivent être gérées de manière à réduire leurs besoins en eau aux périodes où elle fait défaut. La gestion forestière est également concernée car les sécheresses aggravent la vulnérabilité à d’autres risques comme les feux de forêts.