Rotations culturales : un levier mondial pour rendement, nutrition et revenus

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Une étude internationale impliquant INRAE et coordonnée par l’Université Agricole de Chine montre que la pratique de rotation des cultures est plus performante que la pratique de monoculture en termes de rendement, de qualité nutritionnelle des produits et de revenus pour les agriculteurs. Des résultats basés sur plus de 3600 données issues de 738 expérimentations réalisées dans des conditions agricoles sur 5 continents, publiés dans Nature Communications.

Publié le 04 novembre 2025

© INRAE - Eric Beaumont

Si la pratique de rotation des cultures est largement adoptée en Europe, notamment pour réguler les maladies, ravageurs et adventices concurrentes des cultures, la monoculture1 domine encore en Afrique et Asie du Sud. Par ailleurs, la monoculture continue du soja est encore parfois pratiquée dans d’autres région, notamment en Amérique du Sud, en réponse à la forte demande des marchés pour ces matières premières agricoles.

Dans une perspective d’accompagnement de la transition des systèmes agricoles à l’échelle mondiale, il est ainsi essentiel de quantifier les avantages et inconvénients des rotations de cultures par rapport aux monocultures, en tenant compte des spécificités des grandes régions agricoles mondiales. Bien que de nombreuses données expérimentales soient disponibles, il n’existait à ce jour pas de synthèse exhaustive et multicritères de l’impact des rotations culturales.

Dans ce contexte, une équipe internationale coordonnée par l’université Agricole de Chine (Pékin) et impliquant INRAE a rassemblé et analysé un jeu de 3 663 données issues de 738 expérimentations agronomiques réalisées en conditions agricoles sur la période 1980-2024 pour quantifier l’impact des rotations culturales sur 3 dimensions essentielles : le rendement des cultures (en moyenne et variabilité), la qualité nutritionnelle des aliments (apport énergétique, protéique et micronutriments) et les revenus des agriculteurs.

+20% de revenus avec la rotation

Cette méta-analyse multicritères montre qu’en moyenne à l’échelle mondiale, toutes combinaisons de cultures confondues, la pratique de rotation culturale augmente de 20% les rendements totaux par rapport aux monocultures continues. Cette augmentation apparait un peu plus élevée lorsque la diversification des cultures implique une culture de légumineuse (par exemple pois, féverole, trèfle, luzerne) par rapport à une situation sans légumineuse (+23% vs. +16%). Les résultats indiquent également que les rendements sont plus stables d'une année à l'autre en rotation qu’en monoculture. S’agissant de la qualité nutritionnelle des aliments, les résultats montrent que les apports énergétiques et protéiques des produits sont plus élevés de 24% et 14% respectivement dans la situation avec rotation culturale. De plus, la rotation des cultures augmente les quantités fournies de micronutriments tels que le fer (Fe), le magnésium (Mg) et le zinc (Zn) de 27 %, 17 % et 17 %, respectivement. Enfin, les données montrent que les revenus des agriculteurs sont augmentés de 20 % en situation de rotations culturales par rapport aux monocultures testées dans les expérimentations agronomiques.

L’étude permet de recommander des rotations culturales spécifiques en fonction du contexte de production, pour les différentes grandes régions agricoles mondiales. En Argentine et au Brésil, la rotation de cultures de soja et de maïs permet d’augmenter les rendements en calories de 118%, la qualité nutritionnelle de 191% et les revenus de 189% par rapport à la monoculture continue de soja. En Afrique de l’ouest et australe, ces gains atteignent respectivement 94%, 91% et 89% avec une rotation de cultures de sorgho et de maïs, par rapport à une monoculture continue de maïs. 

Ces résultats soulignent l’importance et les bénéfices de la rotation des cultures pour la durabilité des systèmes agricoles. Ils soulèvent également la nécessité de mieux comprendre les freins (techniques, structuration des filières et marchés, …) qui limitent l’adoption de la pratique de rotations des cultures dans certaines régions du monde.

Référence

Mudare S., Jing J., Makowski D. et al. (2025). Crop rotations synergize yield, nutrition, and revenue: a meta-analysis. Nature Communications 16, 9552 DOI: https://doi.org/10.1038/s41467-025-64567-9

 


[1] Culture exclusive d’une seule espèce végétale sur une parcelle agricole au cours d’années successives. 

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