Produire des légumineuses dans des territoires d’élevage : un levier pour accroître la durabilité et l’autonomie des systèmes agricoles ?

Produire des légumineuses dans des territoires d’élevage : un levier pour accroître la durabilité et l’autonomie des systèmes agricoles ?

Aujourd’hui la France est dépendante des importations de protéines végétales pour nourrir son cheptel : environ 3,5 millions de tonnes de soja sont importées chaque année, dont l’immense majorité est génétiquement modifiée. Pour améliorer l’autonomie protéique à l’échelle des régions françaises, une solution est de produire localement des légumineuses comme le pois, la féverole ou la luzerne, qui sont des plantes riches en protéines et qui peuvent se substituer au soja importé. Même si leur capacité à fixer l’azote de l’air permet de faire des économies d’engrais à long terme, les légumineuses sont encore peu présentes en France car peu rentables à court terme.

Une équipe de l’UMR SMART-LERECO, en collaboration avec l’UMR SAS,  a étudié les leviers potentiels pour augmenter la production de légumineuses et leur utilisation en alimentation animale afin d’évaluerr les impacts économiques et environnementaux d’un telle augmentation. L’originalité de ces recherches, basées sur une modélisation des exploitations de l’Ouest de la France (Bretagne et Pays de la Loire), est de prendre en compte les complémentarités culture-élevage à l’échelle territoriale à travers des échanges de légumineuses entre exploitations céréalières et d’élevage. Pour cela, une augmentation importante de la production de légumineuses dans l’Ouest a tout d’abord été modélisée.

Les résultats montrent qu'une production élevée de légumineuses n'est pas suffisante pour améliorer les performances environnementales dans les exploitations, car les légumineuses ne sont pas suffisamment utilisées en alimentation animale. Pour remédier à cela, une augmentation de la demande en produits animaux sans OGM a été modélisée.

Les résultats  montrent que le développement d’une filière différenciée "sans OGM" est efficace pour accroître l'utilisation des légumineuses. Toutefois, du fait de l’importance des productions animales dans l’Ouest, la majorité des légumineuses utilisées sont toujours importées et l’autonomie en protéines n’est pas améliorée dans la région. Ces résultats ont été obtenus en faisant l’hypothèse du maintien d’une forte présence de l’élevage sur le territoire sans réduction des effectifs d’animaux.

Partenaires : ces recherches ont été menées au sein de l’UMR SMART-LERECO, en collaboration avec l’UMR SAS.

Financement : ces recherches ont été cofinancées par les régions Bretagne et Pays de la Loire, ainsi que le Fonds européen agricole pour le développement rural 2014-2020 (PEI 16.1), à travers le projet SOS-PROTEIN.

Publications associées :

• Jouan J, Ridier A, Carof M (2020) SYNERGY: a regional bio-economic model analyzing farm-to-farm exchanges and legume production to enhance agricultural sustainability. Ecological Economics 175:106688. https://doi.org/10.1016/j.ecolecon.2020.106688
• Jouan J, Ridier A, Carof M (2020) Legume production and use in feed: analysis of levers to improve protein self-sufficiency from foresight scenarios. Journal of Cleaner Production 123085. https://doi.org/10.1016/j.jclepro.2020.123085

Valorisation économique et environnementale des complémentarités culture-élevage à travers la production locale de légumineuses

Approche par modélisation de l’Ouest de la France

Thèse présentée et soutenue le 21 février 2020 par Julia JOUAN

Cette thèse de doctorat porte sur les complémentarités culture-élevage permises par les légumineuses, dans la région de l'Ouest de la France. Une évaluation économique et environnementale de ces complémentarités est réalisée depuis l’échelle de l’exploitation agricole jusqu’à celle de la région.Le principal apport de cette thèse est l’élaboration d’un modèle bioéconomique SYNERGY qui modélise les échanges locaux de cultures (dont les légumineuses) et d’effluents entre des exploitations de grandes cultures et des exploitations d'élevage. Ce modèle prend en compte l’effet précédent des légumineuses et comprend des rations alternatives avec ces cultures riches en protéines. Les principaux résultats de simulation montrent que les aides couplées aux légumineuses accroissent leurproduction mais n’engendrent pas une meilleure valorisation des complémentarités techniques. Un moyen d’accroître l'utilisation de légumineuses en alimentation animale est de labelliser les produits animaux sans OGM. Cependant, les échanges locaux simulés restant faibles, les légumineuses sont en grande partie importées de l’extérieur de la région. Ainsi, les résultats économiques et environnementaux ne sont pas améliorés à l’échelle régionale et l'autonomie en protéines diminue. Enfin, à l’échelle des filières, nous montrons que les échanges de légumineuses engendrent des coûts de transaction élevés, peu réduits par les contrats existants. Le développement de marchés valorisant les ressources locales pourrait encourager la culture de légumineuses.

https://www.researchgate.net/publication/339973668_Economic_and_environmental_benefits_from_crop-livestock_complementarities_through_local_legume_production_A_modelling_approach_for_western_France

Synthèse de doctorat :
https://www.researchgate.net/publication/339973668_Economic_and_environmental_benefits_from_crop-livestock_complementarities_through_local_legume_production_A_modelling_approach_for_western_France