Biodiversité 3 min
L’apport de l’IA pour identifier les abeilles exposées aux pesticides
COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Des chercheurs d’INRAE et de l’université de Mexico ont utilisé les données d’activité de vol d’abeilles mellifères et un modèle d’intelligence artificielle afin de concevoir un outil performant de toxicovigilance. Les résultats de cette étude publiée dans la revue Ecological Informatics permettraient d’alerter sur les risques dus à l’exposition aux pesticides neurotoxiques de populations d’abeilles mellifères.
Publié le 11 juillet 2024
Les abeilles mellifères, pollinisateurs majeurs des plantes cultivées ou sauvages, sont fréquemment exposées à de nombreux pesticides chimiques dans l’environnement. Cette exposition régulière affecte leur comportement et leur santé[1], ce qui peut conduire à la perte de colonies. Un des défis pour la recherche actuelle est d’évaluer efficacement et précisément l’impact des pesticides sur ces abeilles.
Pour cela, des dispositifs performants sont aujourd’hui utilisés par les scientifiques afin de surveiller l'activité des abeilles butineuses. Placés à l'entrée de la ruche, ils permettent de mesurer plus particulièrement les caractéristiques liées au vol. Pour cela les chercheurs identifient les abeilles avec des puces RFID (radio frequency identification) ou des étiquettes QR codes fixées au thorax.
Des études précédemment réalisées ont montré que plusieurs pesticides neurotoxiques, à des expositions sublétales (doses de pesticides n'entraînant pas de mortalité chez l’abeille), réduisent en moyenne de 25 % l’activité de vol quotidienne des abeilles mellifères. Ce constat a ainsi été retenu par les chercheurs de l’étude comme un indicateur de la présence de pesticides neurotoxiques dans l’environnement.
Un classement avec une précision de 99 %
Les chercheurs d’INRAE et leurs collègues de l’université de Mexico ont pour la première fois recueilli et traité avec un modèle d’intelligence artificielle les données d’activités de vol d’abeilles mellifères. Les résultats obtenus leur ont permis de classer les performances de vol des abeilles et déterminer ainsi, en fonction du nombre de vols et du temps passé hors de la ruche à chercher de la nourriture, si les abeilles avaient été exposées ou non à des pesticides chimiques.
Pour cette étude, 42 092 enregistrements de vol de 1 107 abeilles témoins et 1 689 abeilles exposées aux pesticides ont été analysés par l’équipe de recherche. La précision de classification du modèle utilisé atteint 99 %, avec une collecte de 25 jours de données d'activité.
L’extrême précision des résultats obtenus souligne les performances hautement prédictives des modèles d'intelligence artificielle pour la toxicovigilance. Cette nouvelle technologie, qui doit être encore testée sur le terrain, pourrait potentiellement fournir des données en temps réel pour l'évaluation des risques liés aux pesticides chez les abeilles mellifères.
[1] Henry M., Béguin M., Requier F. et al. (2012). A Common Pesticide Decreases Foraging Success and Survival in Honey Bees. Science, DOI : https://doi.org/10.1126/science.1215039
Ce dossier aborde l’essentiel des enjeux de recherche autour des abeilles à travers de nombreuses disciplines, en passant par l’écologie, la toxicologie, la génétique ou encore la sociologie.
Reference
Olivares-Pinto U., Alaux C. et al. (2024). Using honey bee flight activity data and a deep learning model as a toxicovigilance tool. Ecological Informatics, DOI : https://doi.org/10.1016/j.ecoinf.2024.102653