Alimentation, santé globale Temps de lecture 5 min
DMLA et alimentation : vers une approche préventive personnalisée
La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie chronique qui affecte la zone centrale de la rétine, ou macula, entraînant une perte progressive et irréversible de la vision. La DMLA est la première cause de malvoyance dans les pays industrialisés chez les personnes âgées de plus de 50 ans. Les traitements actuels ralentissent la progression de certaines formes de la pathologie. Aussi les recherches se concentrent-elles sur des stratégies préventives pour lesquelles la nutrition est centrale. De nombreuses études mettent en évidence un rôle protecteur de la consommation d’acides gras de la famille oméga 3.
Publié le 25 novembre 2025
Prévention de la DMLA : un enjeu de santé publique
La physiologie de la DMLA est complexe. Elle implique plusieurs facteurs, tels que le vieillissement, la susceptibilité génétique et le mode de vie (tabagisme, nutrition). Modifiables, les facteurs liés au mode de vie comme à la nutrition représentent les seuls leviers de prévention de la DMLA, et notamment de ses formes avancées. En effet, de fortes associations entre l’incidence de la DMLA et sa progression vers des stades avancés, et plusieurs nutriments ont été identifiées, notamment avec les acides gras polyinsaturés (AGPI) de la famille oméga-3 comme le DHA (acide docosahexaénoïque). À ce jour, plus de 25 études observationnelles ont montré que la consommation alimentaire régulière de ces AGPI est associée à une réduction de 40 % du risque d’initiation de la DMLA mais aussi de sa progression vers les formes avancées. L’agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) préconise un apport quotidien de 500 mg d’AGPI oméga-3 à longue chaîne (dont le DHA) pour prévenir la DMLA.
Développer des biomarqueurs pour évaluer le risque lié à l’alimentation
Des approches nutritionnelles par un apport supplémentaire en acides gras oméga-3 ont été développées pour prévenir ou limiter la DMLA. Mais l’évaluation de l’efficacité de ces approches se heurte à l’impossibilité de mesurer la concentration en acides gras dans la rétine.
Des chercheurs et chercheuses d'INRAE, de l’équipe Œil & Nutrition du CSGA, et leurs collègues ont identifié un biomarqueur sanguin permettant de prédire le contenu rétinien en acides gras oméga-3. Un brevet protège la méthode détermination du contenu rétinien en acides gras oméga-3. Celle-ci met en œuvre un algorithme de calcul qui permet une corrélation entre le dosage d'au moins un ester de cholestérol dans le plasma sanguin et le contenu rétinien en oméga-3. Ils ont montré qu’une concentration élevée du biomarqueur sanguin est associée à un moindre risque d’avoir une forme avancée de DMLA et que la concentration du biomarqueur augmente après supplémentation en acides gras oméga-3.
Vers une application concrète en santé publique
Les chercheurs se sont engagés dans une démarche de simplification méthodologique du dosage du biomarqueur afin qu’il puisse être utilisé en routine dans un laboratoire de biologie standard. Ils ont développé un kit de prélèvement sur papier buvard et validé le circuit de prise en charge des échantillons du domicile au laboratoire d’analyse. Les analyses ont été élargies à d’autres molécules lipophiles d’intérêt pour la prévention nutritionnelle de la DMLA, comme certaines vitamines (A, D et E) et les caroténoïdes, portant le nombre total de molécules dosées à 21. Ces nouvelles molécules lipophiles, sont pour la majorité associées au régime méditerranéen, caractérisé par une forte consommation d'aliments végétaux et une consommation plus importante de poisson comparée à celle de produits laitiers ou de viande.
En mars 2025 la start-up RetiNov, issue d’une collaboration avec le CSGA, a lancé la commercialisation du dosage du biomarqueur du contenu en AGPI de la rétine aux États-Unis et au Canada. L’estimation biologique du risque de DMLA est couplée à une évaluation précise des paramètres liés au mode de vie, permettant ainsi l’émission de recommandations personnalisées à travers l’interface web Tina®. L’outil s’adresse à la population générale et aux professionnels de santé comme les médecins généralistes, les diététiciens, les nutritionnistes ou les ophtalmologistes. L’outil sera disponible en France après consolidation de l’activité de la start-up en Amérique du Nord.
Tina : une plateforme digitale pour prévenir la survenue de la DMLA
Issue d’un projet en collaboration avec le CSGA, la startup RetiNov propose un service de médecine personnalisée basé sur une plateforme digitale, appelée Tina®, centralisant toutes les étapes de prévention de la DMLA. En complément d’une prise en charge par un ophtalmologiste, cette plateforme permet de prédire, chez un patient, le risque d’apparition de la DMLA ou de sa progression vers les stades avancés, ceci à partir d’un questionnaire alimentaire validé auprès de plusieurs millions de sujets, de paramètres liés au mode de vie, de photos de repas et d’un test sanguin permettant d’évaluer le biomarqueur du contenu rétinien en acides gras oméga-3. Le patient se voit ensuite proposer par Tina® un accompagnement personnalisé en termes d'hygiène de vie afin de l’aider à diminuer son risque en atteignant puis en maintenant un statut optimal vis-à-vis de son biomarqueur et de de son alimentation.
L’équipe Œil & Nutrition du CSGA s’intéresse aux liens entre les métabolismes lipidiques et la santé rétinienne.
Affiliée au Centre des sciences du goût et de l’alimentation - CSGA (INRAE, CNRS, Université Bourgogne Europe, Institut Agro Dijon), elle est dirigée par Niyazi Acar (directeur de recherche INRAE), en collaboration avec Catherine Creuzot-Garcher (PU-PH), cheffe du service d’ophtalmologie du CHU de Dijon. L’équipe étudie le rôle des lipides dans la physiologie de la rétine et dans ses dysfonctionnements en lien avec le développement de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), du glaucome ou encore de la rétinopathie du prématuré.