Biodiversité Temps de lecture 4 min
Un cyprès avec moins de pollen pour moins d’allergies
Les scientifiques de l’unité de recherche sur l’écologie des forêts méditerranéennes ont fait une découverte qui va ravir tous les allergiques au pollen de cyprès : un mode de reproduction extraordinaire chez une espèce de cyprès, Cupressus dupreziana, et qui a permis de développer une nouvelle variété de cyprès quasi sans pollen !
Publié le 24 avril 2025

L’allergie au pollen de cyprès est en fait causée par différentes espèces de la famille botanique des cupressacées, dont les cyprès font partie mais aussi les thuyas et les genévriers. Elle est fréquente et toucherait environ 13 % des personnes dans les zones à forte présence de ces pollens. Dans les villes méditerranéennes, le pollen de cyprès représente parfois 50 % du total des pollens émis sur une année, toutes espèces confondues. Certaines années, ce pourcentage atteint même 70 % à Aix-en-Provence.
La prévention comme stratégie majeure
Aujourd’hui, les instituts de recherche et de santé mettent en place des mesures de prévention comme l’outil Cartopollen de prévision des émissions de pollen, développé par INRAE, SupAgro et les Agences régionales de santé Languedoc Roussillon et Provence-Alpes-Côte d’Azur. D’autres actions de prévention visent à réduire la quantité de pollen produite, en particulier par la sélection de variétés moins productrices de pollen et donc moins allergènes.
Un cyprès pas comme les autres
Les cyprès, comme la plupart des végétaux, se reproduisent de façon sexuée : les gamètes mâle et femelle fusionnent pour produire un nouvel individu.
Les scientifiques ont fait une découverte étonnante : un cyprès qui se reproduit à partir du pollen seul, sans besoin de fécondation. Nommé cyprès du Tassili, ou Cupressus dupreziana A. Camus, il s’agit d’une espèce menacée dont la population naturelle ne compte plus que 230 individus environ. Ce cyprès se trouve sur le plateau du Tassili N’Ajjer, tout au sud de l’Algérie, où il pleut seulement 30 mm par an. Et pour lui pas besoin de fécondation, car son pollen contient tout le matériel génétique nécessaire (100 % des chromosomes) pour que se développe un embryon normal. Le pollen du Cupressus dupreziana utilise l’organe femelle (futur cône contenant les graines), comme tissu nourricier pour se développer, sans qu’il n’y ait de fusion des noyaux, telle une mère porteuse. Par conséquent, l’embryon est génétiquement identique au parent mâle.
Un « croisement » intéressant
Cette capacité de C. dupreziana à être mère porteuse permet également le développement d’embryons d’autres espèces de cyprès. C’est le cas du cyprès vert (C. sempervirens), qui de manière naturelle pollinise les cyprès C. dupreziana plantés dans son voisinage.

De cette pollinisation résulte des cyprès verts ne contenant cette fois que 50 % des chromosomes et dont la capacité à produire du pollen est de ce fait très fortement perturbée. Moins de pollen, moins d’allergie !
Petit problème : les scientifiques ont observé que beaucoup de cyprès issus de ce « croisement », dépérissaient ou exprimaient de nombreuses tares génétiques. Une forte sélection génétique naturelle et humaine a néanmoins conduit à une nouvelle variété de cyprès nommée Sirocco, en référence au vent du Sahara. Le processus de multiplication pour une mise sur le marché de cette variété est en cours : une nouvelle qui donne le sourire aux allergiques !