Changement climatique et risques 3 min

Prévoir l’intensité des sécheresses à partir du débit des rivières

INRAE coordonne un outil opérationnel de prévision des débits des rivières qui aide les services de l’État à anticiper les sécheresses sévères, de manière à prendre les mesures de restriction de consommation d’eau adaptées. Trois questions à Vazken Andréassian, hydrologue à INRAE et directeur de l’unité de recherche impliquée.

Publié le 09 août 2022

illustration Prévoir l’intensité des sécheresses à partir du débit des rivières
© INRAE J.Weber

Quel est l’apport de l’outil développé par la recherche ?

Vazken Andréassian : Suite à des sécheresses sévères, le débit des cours d’eau peut diminuer fortement. Dans certaines régions, cela peut affecter jusqu’à l’accès à l’eau potable, qui doit alors être livrée par camions. Il est donc très important d’anticiper ces situations pour mieux les gérer. Les services de l’État surveillent étroitement les débits des rivières grâce à de nombreuses stations de mesure situées le long des cours d’eau. Les résultats sont consignés dans une base de données nationale (HYDRO).

L’outil que nous avons développé (PREMHYCE 1) permet, à partir de ces données et grâce à la modélisation, d’anticiper l’évolution des débits de rivières à court et à moyen terme. À court terme (entre 15 et 90 jours), cela permet de prévoir le niveau de restriction d’usage de l’eau nécessaire en fonction des débits prévisibles. Ces décisions sont prises par arrêtés préfectoraux (voir la carte actuelle).

Comment fonctionne cet outil ?

V. A. : C’est un site web qui agrège plusieurs modèles de prévisions 2. Les prévisions à court terme (15 jours) utilisent les prévisions des pluies. Au-delà de 15 jours, c’est une approche climatologique qui entre en jeu : les prévisions de débit sont basées sur les relations observées entre le climat et le débit des rivières sur de nombreuses années. Les données qui alimentent les modèles (environ un millier de stations) sont choisies de manière à être représentatives de l’état des cours d’eau et à couvrir tout le territoire. On ne choisit pas par exemple des stations de mesure qui se trouvent juste en aval d’un barrage, dont le débit dépend non pas des pluies mais des lâchers de l’exploitant. Les services de l’État (DREAL 3) reçoivent les prévisions issues des différents modèles, avec leurs incertitudes. Ils analysent ces résultats sur le court et le moyen terme pour informer aux mieux les services des préfectures.

Pourquoi comparer les données des débits de rivières entre 1976 et 2022 ?

V. A. : Ce questionnement revient régulièrement dans les médias. C’est une comparaison fondée, dans la mesure ou 1976 est l’année de la précédente sécheresse comparable à celle de cette année, par son ampleur et sa généralisation à tout le territoire français.

En ce début du mois d’août, la comparaison des données de débits en rivière entre 1976 et 2022 confirme que ces sécheresses sont comparables et de grande ampleur. Celle de cette année est plus marquée dans l’Est de la France, mais un peu moins marquée dans l’Ouest que celle de 1976. Les épisodes de sécheresse sévère surviennent en France de façon récurrente (les précédents datent de 1921 et 1949). Il faut être vigilant car les travaux du GIEC indiquent une augmentation probable de la fréquence de ces sécheresses de grande ampleur, et surtout, il faut anticiper leurs conséquences et agir !

  1. Outil PREMHYCE : voir encadré.
  2. Modèles météorologiques, climatiques et hydrologiques d’INRAE, du BRGM, d’Électricité de France, de l’université de Lorraine et de Météo France.
  3. DREAL : directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement.
Comparaison sécheresses hydrologiques 1976-2022

 

Les partenaires du programme PREMHYCE

PREMHYCE (Prévision des étiages par des modèles hydrologiques, comparaison et évaluation) est un programme de recherche coordonné par INRAE, bénéficiant du soutien de l’OFB et du ministère de la Transition écologique. Il réunit des équipes du BRGM, d’EDF, de Météo France et de l’université de Lorraine. PREMHYCE fournit des prévisions de débit sur plusieurs centaines de points en France, pour des échéances allant jusqu’à 90 jours. 

PREMHYCE se prolonge par un projet de recherche financé par l’ANR, appelé CIPRHES (Chaine intégrée pour la prévision hydrométéorologique des étiages et des sécheresses). Ce projet, coordonné par INRAE, réunit les mêmes partenaires que PREMHYCE. Il développe de nouvelles approches de modélisation hydrométéorologique intégrée pour la prévision des étiages, à partir du prototype développé dans PREMHYCE.  Contact : charles.perrin@inrae.fr.

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