Société et territoires Temps de lecture 6 min
PAC, climat et ruminants
L’élevage de ruminants constitue une des principales sources d’émissions de gaz à effet de serre de l’agriculture européenne. Entre autres solutions, l’élevage à l’herbe permet de maintenir des prairies permanentes qui stockent du carbone et représentent un réservoir de biodiversité. Les travaux des chercheurs d’INRAE analysent l’efficacité de la Politique agricole commune actuelle et proposent des améliorations pour encourager le maintien des prairies permanentes.
Publié le 08 mai 2021

Encourager le maintien des prairies grâce à la PAC
Agriculture = 11 % des GES de l’UE, dont
Méthane = 55 % (dont 80 % par les ruminants)
Protoxyde d’azote = 42 %
(dont 72 % via les engrais azotés)
L’élevage des ruminants est l’une des principales sources d’émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’agriculture. C’est pourquoi il est particulièrement questionné dans le cadre de la lutte contre le réchauffement climatique. L’élevage à l’herbe représente un levier intéressant car les prairies stockent du carbone, ce qui compense en partie les émissions de GES, à deux conditions : que la densité animale soit raisonnable et que ces prairies ne soient pas retournées à court ou moyen terme. Et surtout, les prairies permanentes pâturées constituent des réservoirs uniques de biodiversité.
Ce n’est qu’en 2013 que la Politique agricole commune (PAC) a introduit des mesures en faveur du climat, en particulier des paiements pour le maintien des prairies permanentes et une réorientation des Mesures agroenvironnementales (MAE), devenues MAEC (Mesures agroenvironnementales et climatiques, voir annexe).
En Europe,
les prairies ˃ 35 % de la SAU
En Europe, les prairies (temporaires et permanentes) représentent plus de 35 % de la SAU, ce qui en fait un élément central de l’agriculture européenne. C’est aussi le cas en France, mais leur surface diminue de façon continue au profit de l’artificialisation des sols et d’autres cultures, dont les céréales.
Les mesures de la PAC de 2013 n’ont permis que de freiner cette tendance à la diminution des surfaces de prairies.
Les chercheurs d’INRAE proposent des paiements plus conséquents et plus ciblés pour encourager le maintien des prairies permanentes.
Plus globalement, diminuer la production et la consommation de produits animaux (dont de ruminants) en Europe
Depuis 2010, les émissions totales de GES associées à l’élevage européen se maintiennent (1), et les émissions de méthane ont même tendance à augmenter en raison d’un accroissement de la production tirée par les exportations. L’Union européenne (UE) est en effet le premier exportateur mondial de produits animaux, en particulier de produits laitiers (et de viande porcine), et c’est grâce à ces produits que sa balance commerciale est positive dans le secteur agricole (exportations supérieures aux importations). L’UE exporte beaucoup de produits laitiers (principalement vers la Chine), et importe essentiellement des viandes ovine et caprine.
Poids de l’UE dans les exportations mondiales* | Poids de l’UE dans les importations mondiales * |
Produits laitiers : 34,4 % | Produits laitiers : 3,2 % |
Bovins vivants : 21,8 % | Bovins vivants : 0,1 % |
Ovins et caprins vivants : 21,7 % | Ovins et caprins vivants : 0,01 % |
Viande bovine : 3,5% | Viande bovine : 5,8 % |
Viande ovine et caprine : 2,5 % | Viande ovine et caprine : 18,7 % |
* Chiffres exprimés en % de la valeur (en milliards d’euros), 2018.
Diminuer la production en produits animaux (dont celle de ruminants) dans l’UE, alors que la demande mondiale augmente, soulève le risque que cette production soit réalisée dans des pays hors UE moins exigeants sur le plan environnemental, avec des impacts climatiques plus défavorables.
Les européens consomment en moyenne deux fois plus de protéines animales que le reste du monde (hors Etats-Unis)
Un des principaux leviers en faveur du climat consiste donc à agir sur la demande, en diminuant la part de produits animaux dans les régimes alimentaires, en particulier dans certains pays développés qui en consomment en excès. La consommation de viande de ruminants stagne dans l’UE, voire diminue légèrement, mais celle de volailles tend à augmenter.
- Entre les années 1990 et 2010, les émissions de GES associées à l’élevage européen avaient diminué, sous l’effet combiné de deux causes. D’une part, les pays d’Europe Centrale et Orientale qui ont rejoint l’UE dans les années 2000 ont connu, dans la période post-communiste, une diminution de leur cheptel et une baisse de l’emploi d’engrais azotés. D’autre part, la productivité par animal dans l’ensemble de l’UE a augmenté (plus de viande et de lait produits par vache) sans forte augmentation de la production européenne, ce qui fait qu’un même niveau de production a été atteint avec moins de vaches, d’où une diminution des émissions de GES.
Dans le langage courant une prairie permanente est une surface toujours en herbe qui n'est jamais labourée, ni traitée. De telles prairies sont généralement situées en montagne ou en plaine en zone bocagère et donc associées à des haies ou parfois à des talus. Pour la réglementation agricole (PAC), une prairie permanente est une surface restée enherbée sans interruption depuis 5 ans au moins. La notion de « permanence » est donc ici toute relative.
Dans les prairies, le terme "herbe" est souvent utilisé pour décrire l'intégralité de la végétation. De manière plus précise, il s’agit essentiellement de graminées.
Pour en savoir plus : voir le webinaire : PAC, Pacte vert et élevage, 16 septembre 2020