Société et territoires 4 min

Deux parutions qui éclairent le monde de la viande

PARUTIONS A L’HONNEUR - Les Marchés Hebdo, le média de l’alimentaire, a retenu vingt et une personnalités ayant marqué 2019 par leurs actions, leur stratégie ou leur combat dans le secteur agroalimentaire. L’une d’entre elles est Jocelyne Porcher, chercheuse INRAE, pour la cause de l’élevage. Elle a également obtenu le prix de l’Académie de la viande pour son livre Cause animale, cause du capital. L’ouvrage de Patrick Veysset, chercheur INRAE sur la formation et la répartition des gains de productivité en élevage bovin viande est également récompensé par l’Académie de la Viande.

Publié le 06 février 2020

illustration Deux parutions qui éclairent le monde de la viande
© INRAE

L’ouvrage de Jocelyne Porcher Cause animale, cause du capital

Dans cet ouvrage, Jocelyne Porcher, chercheuse INRAE, questionne le point de vue des tenants de l’abandon de régimes alimentaires carnés. Elle met en évidence la collusion d’intérêts historiques et actuels entre la science, l’industrie et la « cause animale » laquelle renvoie de ce fait à tout autre chose qu’à la cause des animaux.

Pour le bien des animaux, celui de la planète et pour préserver notre santé, il faudrait de toute urgence renoncer à l’alimentation carnée voire à tous les produits animaux et, en clôturant dix mille ans de vie commune avec les vaches et les brebis, librement consentir à une agriculture sans élevage. Après des décennies de silence médiatique et politique sur la violence industrielle contre les animaux, pourquoi cette soudaine prise de conscience ? interroge la chercheure.

C’est en reprenant le fil de l’industrialisation de l’élevage depuis le XIXe siècle et ses liens historiques avec la « cause animale » que Jocelyne Porcher analyse la situation actuelle et le développement des start-up de la « viande propre », amie des animaux et des milliardaires. La science et l’industrie, aujourd’hui comme hier, concoctent pour nous « un monde meilleur ». Sommes-nous bien sûrs qu’il correspond à nos désirs ?

Avant d’être chercheuse INRAE, Jocelyne Porcher a été secrétaire, éleveuse de brebis, salariée en porcheries industrielles, technicienne en agriculture biologique. Elle est spécialisée sur l’étude des relations entre l’homme et l’animal. Elle intervient dans de nombreux médias nationaux.

Editions Le Bord de l’Eau - 120 pages, septembre 2019 – 12 euros

 

L’article de Patrick Veysset Formation et répartition des gains de productivité en élevage bovin viande. Qui sont les gagnants et les perdants entre 1980 et 2015 ?

La méthode des comptes de surplus permet d’évaluer l’évolution de la productivité de l’ensemble des facteurs d’une entreprise (consommations intermédiaires, capital, terre, travail) et la répartition des gains de productivité entre les différents agents économiques. Les auteurs ont appliqué cette méthode sur une base de données de 164 exploitations bovins allaitants du bassin Charolais de 1980 à 2015. Sur la période de 36 ans – avec des différences par sous-périodes –, le surplus de productivité globale (SPG) cumulé s’accroît faiblement à un rythme de +0,17 %/an. Ce faible accroissement du SPG est lié à la constante augmentation de la productivité du travail, alors que la productivité des autres facteurs régresse. Les auteurs observent un difficile maintien du revenu des exploitants, une très légère baisse du prix des inputs, des fermages et des frais financiers auxquels s’ajoute une très forte augmentation des soutiens publics directs. L’ensemble de surplus économique cumulé a été capté à 64 % par l’aval de la filière bovine sous forme de baisse de prix et à 22 % par l’aval des autres filières (principalement céréales). Schématiquement on retrouve bien ici le principe de la réforme de 1992 (Mac Sharry) : un transfert du contribuable par les soutiens directs vers le consommateur via la baisse des prix. La stagnation du revenu des exploitants indique clairement qu’ils sont perdants dans cette répartition des gains de productivité malgré l’amélioration de la productivité du facteur travail.

Formation et répartition des gains de productivité en élevage bovin viande. Qui sont les gagnants et les perdants entre 1980 et 2015 ? Patrick Veysset, Michel Lherm, Jean-Philippe Boussemart et Pierre Natier - p. 71-91

Economie rurale n° 361 – Editeur Société française d’économie rurale