Société et territoires Temps de lecture 2 min
Enjeux éthiques de l’évaluation des impacts de la recherche publique agronomique
Le 9e et dernier avis du comité d’éthique Inra-Cirad, publié en 2016, traite de l’évaluation des impacts de la recherche publique agronomique. Cette évaluation contribue à l’expression de la responsabilité sociale et environnementale pour les instituts de recherche publique.
Publié le 17 mai 2016

Le comité d’éthique Inra Cirad a mené une réflexion sur l’évaluation des impacts de la recherche agronomique à la demande des présidents des deux organismes. Il s’agit du dernier avis produit par ce comité, qui vient désormais de s’élargir à l’Ifremer.
Rendre compte des impacts socioéconomiques des activités d’organismes de recherche finalisée est légitime puisque ces organismes ont été créés pour produire des connaissances qui répondent à des défis économiques et sociétaux. Or les méthodes disponibles aujourd’hui pour évaluer l’impact rencontrent trois limites majeures. Tout d’abord l’évaluation concerne principalement les impacts économiques, ensuite l’attribution de l’impact est problématique du fait qu’il résulte d’interactions complexes, enfin le le temps pour qu’une recherche se transforme en impact peut dépasser 30 ans, ce qui limite l’utilisation des résultats de l’étude pour le management de la recherche.
Des méthodes différentes expérimentées à l’Inra et au Cirad
Le Comité d’éthique s’est appuyé sur les expériences en cours dans les deux établissements. L’Inra a mis au point la méthode « analyse des impacts de la recherche publique agronomique » (Asirpa), et mis en œuvre par ailleurs une approche en termes de rentabilité interne de la recherche. Ces deux approches s’appuient sur le regard externe des pairs, y compris à travers la publication des résultats de l’évaluation dans des revues spécialisées dans ce domaine. Au Cirad, le programme ImpresS (Impact of research in the south) associe, en amont, des partenaires du Sud à la co-construction de la méthode, puis, sur un mode participatif, les acteurs de l’innovation aux phases de confrontation, collecte, mesure et validation des résultats de l’évaluation.
Ne pas séparer production de connaissances et effets sur la société
Un enjeu central de cette réflexion a été de ne pas séparer caricaturalement la recherche comme production de connaissances et la recherche dans ses effets sur le monde, les humains et la société, et d’avancer vers la prise en compte des impacts qu’elle induit dans la définition même de la connaissance. Pour le Comité d’éthique, il importe que l’évaluation des impacts de la recherche constitue un enrichissement conceptuel qui n’altère en rien la liberté de chercher et la créativité en recherche. Elle lui semble ajouter une réflexion sur la responsabilité des chercheurs et des collectifs de recherche, et une incitation plus forte à définir et mieux expliciter les raisons des choix d’une conduite de recherche.
Une expression de responsabilité sociale et environnementale
Évaluer les impacts de la recherche conduit à élargir la vision de la performance des travaux de recherche, en interrogeant l’utilité de la connaissance, et sa transformation en innovation pour contribuer à répondre aux défis sociétaux, comme à ceux du développement durable.
Parce que l’évaluation des impacts de la recherche est fondée sur un jugement, le Comité prône la mise en œuvre de l’exercice dans un cadre pluridisciplinaire, dans une démarche d’expertise participative et dans une logique d’enrichissement pour l’ensemble des parties. L’évaluation des impacts réels de la recherche constitue l’une des expressions de la responsabilité sociale et environnementale des établissements de recherche et doit se réaliser à différents temps par rapport au déroulé du processus de recherche (avant, pendant et à différents temps après la recherche).
L’avis adresse 6 recommandations qui soulignent l’intérêt de s’appuyer sur les Alliances nationales de recherche pour l’évaluation de l’impact, de conduire l’expertise des impacts collectivement, et de solliciter la contribution des parties-prenantes. Elles encouragent à développer une « culture de l’impact » dans les organismes.
Note du président de l'Inra :

Évaluer ses impacts, une expression de la responsabilité sociale et environnementale de la recherche publique.
À l’occasion de la publication en 2016 du 9e avis du comité d’éthique Inra-Cirad sur les enjeux éthiques de l’évaluation des impacts de la recherche agronomique, François Houllier, PDG de l’Inra de 2012 à 2016, souligne l’engagement de l’Inra dans ce domaine, qui s’attache à évaluer ses impacts non seulement économiques mais aussi environnementaux, sociaux, politiques et territoriaux.