Les acariens oribates, témoins invisibles de la santé des sols

Sous nos pieds, une biodiversité cachée et foisonnante agit pour la fertilité des sols. Parmi elle, les acariens oribates jouent un rôle clé en décomposant la matière organique et en révélant l’état de santé des écosystèmes. Dans les vignobles méditerranéens, leur observation permet de mesurer l’effet des pratiques agricoles et souligne combien un couvert végétal permanent favorise des sols plus vivants et plus équilibrés.

Publié le 03 septembre 2025

© INRAE, Anne-Sophie WALKER

Dans les sols, de minuscules organismes vivants travaillent sans relâche pour maintenir l’équilibre et la dynamique des écosystèmes. Parmi eux, les acariens oribates occupent une place importante. Ils participent à la décomposition de la matière organique et au recyclage des nutriments, deux processus essentiels pour la fertilité des sols. Leur sensibilité aux changements environnementaux en fait aussi de bons indicateurs de la santé des sols.

Chez ces acariens, la carapace rigide, appelée exosquelette, protège leur corps et facilite leurs mouvements. Pouvant mesurer moins d’un millimètre, ils vivent dans le sol, la litière, la matière organique, ou encore parmi les mousses et lichens. Ils représentent environ 40 % des microarthropodes vivant dans le sol. Ils se nourrissent de débris végétaux, de champignons et d’algues, contribuant directement au recyclage de la matière. Les oribates broient et digèrent partiellement la matière organique, et la transforment en une ressource plus facilement utilisable par les microbes accélérant ainsi le processus de décomposition.

Une équipe de recherche internationale, composée de chercheurs français et étrangers des universités d’Algoma au Canada et de São Paulo au Brésil, a récemment étudié dans des vignobles méditerranéens, l’effet des pratiques agricoles sur ces communautés. Les chercheurs ont comparé des sols de vignobles conventionnels et biologiques, avec ou sans couverture végétale (permanente ou temporaire) entre les rangs, à des sols naturels de garrigue servant de référence. Plus de 7 500 acariens ont été collectés afin d’analyser leur abondance, leur diversité et leur richesse.

Les résultats obtenus montrent que les écosystèmes naturels abritent des communautés bien plus riches que les sols cultivés. Cependant la présence d’une couverture végétale permanente entre les rangs de vigne favorise des communautés proches de celles des sols naturels. À l’opposé, les sols nus ou seulement temporairement couverts accueillent moins d’individus et présentent une diversité réduite. Les différences entre vignobles biologiques et conventionnels apparaissent plus discrètes : l’abondance et la richesse varient peu, mais la diversité est légèrement plus élevée en agriculture biologique.

Ces observations, publiées dans la revue Applied Soil Ecology, confirment que les acariens oribates sont de précieux alliés pour suivre l’impact des pratiques agricoles sur la biodiversité des sols et pour favoriser la restauration écologique. En maintenant une couverture végétale et en limitant les intrants chimiques, les viticulteurs peuvent préserver la diversité du sol et renforcer la résilience de leurs parcelles.

Référence : Thais Juliane Do Prado, Lucas L. Godoy, Carlos Barreto, Halima Rajoul, Marie-Stéphane Tixier, Anne Merot, Denise Navia (2025) Biodiversity of oribatid mites as a tool to monitor soil health in the agroecological transition: Digging deeper into French Mediterranean vineyards. Applied Soil Ecology, 214, pp.106358. https://doi.org/10.1016/j.apsoil.2025.106358

Arnaud RIDEL

Rédacteur

Département Santé des Plantes et Environnement

Contacts

Denise Navia

Chercheuse

Centre de Biologie pour la Gestion des Populations (CBGP)

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