Dossier revue
Bioéconomie

Le bois-énergie, un pilier des énergies renouvelables

Pour remplacer les combustibles fossiles, la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit de doubler la chaleur issue de biomasse entre 2016 et 2028. L’enjeu consiste à atteindre cet objectif tout en préservant l’équilibre de la forêt et ses services écosystémiques. Explications.

Publié le 05 février 2024

Actuellement, les forêts françaises sont majoritairement gérées de façon durable : la récolte de bois est inférieure à l’accroissement naturel de la forêt, ce qui favorise sa fonction de puits de carbone. En effet, une forêt dont la gestion garantit le renouvellement capte plus de carbone qu’une forêt non exploitée. Cependant, le changement climatique affecte la santé de la forêt et menace son potentiel de captation de carbone et les ressources en bois. D’autre part, un constat inquiétant indique que la biodiversité de la forêt décroît depuis plusieurs années, et ce en France comme à l’échelle mondiale.

L’interconnexion entre les filières du bois

La filière bois d’œuvre prélève les troncs pour la charpente, la menuiserie et l’ameublement. Les filières bois-énergie et bois-industrie sont des sous-filières de la filière bois d’œuvre. En effet, elles en utilisent toutes deux des sous-produits et sont donc potentiellement en concurrence. Du fait de ces interconnexions entre filières, développer la filière bois-énergie implique de développer la filière bois d’œuvre, la seule qui soit en elle-même rentable économiquement pour les sylviculteurs. De plus, soutenir la filière bois d’œuvre présente un autre avantage en termes de bilan carbone : les constructions en bois permettent, d’une part de garder le carbone stocké dans le bois (effet de stockage), et d’autre part d’éviter de recourir à des matériaux à forte empreinte carbone comme le béton (effet de substitution). Actuellement, la filière bois d’œuvre est fragmentée, avec un manque d’articulation entre l’amont et l’aval et une difficulté des scieries françaises à traiter les troncs de fort diamètre. De ce fait, de grandes quantités de bois brut pour la construction sont exportées, tandis que les produits finis sont importés, ce qui se traduit par une balance commerciale déficitaire. Une meilleure organisation de la filière du bois d’œuvre est donc à encourager. Elle semble difficile à obtenir à court terme, mais pourrait concerner des volumes importants (source : rapport I4CE, 2022).


Hiérarchiser les usages du bois

Si l’on se place dans la perspective du changement climatique, il faut privilégier le stockage du carbone sur le long terme, ce qui amène à établir une hiérarchisation des usages du bois : favoriser le bois d’œuvre et, pour la filière bois-industrie, privilégier les produits à usage long tels que les panneaux et les isolants, plutôt que le papier et le carton. Avec pour conséquence bénéfique une augmentation en cascade des sous-produits qui peuvent être utilisés pour le bois-énergie. Il faut aussi préserver ce « capital bois » en gérant durablement les prélèvements, en renouvelant la forêt avec une diversité d’essences adaptées au changement climatique et en assurant une protection contre les incendies. Le coût de cet accompagnement actif est estimé à environ 200 millions d’euros/an (source : Cour des comptes, 2020). En termes de gestion, la principale difficulté tient au morcellement de la forêt française, dont 75 % appartiennent à plus de 3 millions de propriétaires privés, ce qui rend difficile une exploitation concertée. Les CRPF (centres régionaux de propriété forestière) incitent à la création de groupements forestiers familiaux, lors de successions, et d’associations syndicales de propriétaires ayant une vision commune de la gestion forestière.