Réduction de l’éclairage urbain : concilier besoins de la biodiversité et des habitants

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Pour la première fois, INRAE, le MNHN, AgroParisTech et La TeleScop ont livré, à l’échelle d’une métropole, une analyse croisée des besoins de réduction lumineuse de 6 groupes d’espèces et de l’acceptabilité des habitants face aux changements d’éclairage public. Réalisée dans la métropole de Montpellier Méditerranée, l’étude a abouti à la production d’une carte croisant les besoins de la biodiversité et des habitants. Cette carte identifie différentes zones où les actions sur l’éclairage public sont mutuellement bénéfiques et celles où des compromis sont nécessaires. Les résultats, publiés dans Nature cities, montrent qu’une politique d’éclairage nocturne adaptée spatialement à l’échelle de la rue voire du lampadaire permet de concilier les besoins de la biodiversité et les attentes des citoyens, notamment en termes de sécurité. Les scientifiques ont développé l’application web SustainLight qui compile les résultats sous forme de carte interactive pour aider les décideurs de la métropole dans leurs politiques locales d’éclairage.

Publié le 23 juin 2025

© Jilin1 CGsatellite/La TeleScop

La pollution lumineuse a augmenté ces dernières années, notamment du fait de l’expansion urbaine, de la prolifération des sources de lumière artificielle et du passage à la technologie LED qui permet d’éclairer davantage pour un même coût. Les lumières nocturnes perturbent de nombreuses espèces, qu’elles soient diurnes ou nocturnes : perturbations des cycles jour-nuit, des comportements reproductifs, alimentaires, d’orientation… Elle impacte également la santé humaine, entre autres en perturbant les cycles de sommeil. Cependant, les débats autour de l’éclairage public sont majoritairement dans une logique de « tout ou rien », en privilégiant soit les attentes des résidents, soit la biodiversité, et se cristallisent autour de l’extinction des lumières urbaines. La métropole de Montpellier Méditerranée émet une pollution lumineuse qui peut être problématique en raison de sa proximité avec le Parc national des Cévennes. Dans cette étude, les scientifiques développent une analyse spatiale des besoins des espèces en matière de réduction de la pollution lumineuse et de l’acceptabilité des habitants face aux changements d’éclairage de l’espace public.

Cartographier les besoins de la biodiversité en lien avec les attentes des habitants

À partir d’images satellites à haute résolution, les scientifiques ont cartographié la pollution lumineuse de la métropole. Ils ont ensuite évalué les besoins de 6 groupes d’espèces (oiseaux, 2 groupes d’insectes, 2 groupes de chauves-souris, amphibiens) sur la connectivité[1] du paysage nocturne à partir d’imagerie satellitaire, de savoirs locaux et des inventaires des naturalistes en lien avec 3 associations (la LPO, l’OPIE et le groupe des chiroptères du Languedoc-Roussillon). Ce travail leur permet de classer les points lumineux (lampadaires) selon leur urgence à réduire la pollution lumineuse. Parallèlement, l’équipe de recherche a mené une enquête auprès de 1 148 habitants de la métropole pour comprendre leurs préférences en matière d’éclairage urbain selon différentes situations. En croisant besoins de la biodiversité et des citoyens, ils ont pu localiser les zones où des actions sur l’éclairage public seraient mutuellement bénéfiques et les situations où des compromis restent nécessaires. 3 situations sont observées :

  • Des quartiers, contenant des enjeux forts pour la biodiversité, qui peuvent bénéficier de réductions rapides de la pollution lumineuse avec le soutien des habitants.
  • Des quartiers en zones urbaines centrales avec des enjeux écologiques modérés, et dans lesquels certaines mesures de réduction de l’éclairage semblent être mieux reçues que des extinctions (par exemple le changement de couleur, la réduction de l'intensité, l’ajustement de la directivité des luminaires).
  • Des quartiers à forts enjeux écologiques, mais dans lesquels on observe une forte résistance du public aux mesures d’extinction. Dans ce cas, il est possible ici aussi d’adopter des mesures de réduction, qui peuvent être très efficaces pour réduire l’impact sur la biodiversité. Ces mesures peuvent être accompagnées d’actions de sensibilisation pour informer les résidents des effets de la pollution lumineuse.

Tous les résultats sont intégrés sous forme de carte interactive sur l’application web SustainLight (en anglais), destinée aux décideurs et citoyens pour explorer différentes situations et les aider dans les choix d’éclairage public pour la métropole Montpellier Méditerranée. 

[1] La connectivité écologique fait référence au mouvement sans entrave des espèces animales et végétales à travers l’environnement. 

Référence

Tardieu L. et al. (2025). Planning sustainable urban lighting for biodiversity and society. Nature cities 2, 518–531 DOI : https://doi.org/10.1038/s44284-025-00245-7


cp_eclairage-urbain-concilier-besoins-biodiversite-habitantspdf - 491.17 KB

Contact scientifique

Léa Tardieu

UMR TETIS - Information spatiale au service des territoires et de l’environnement (INRAE, AgroParisTech, Cirad, CNRS, Université de Montpellier)

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