Alimentation, santé globale 3 min

Des probiotiques de nouvelle génération pour améliorer la santé humaine

Les probiotiques, médicaments ou compléments alimentaires, nous viennent traditionnellement de souches de bactéries lactiques présentes dans les aliments fermentés. Nos travaux envisagent une nouvelle source de probiotiques en s’intéressant au potentiel d’autres bactéries présentes dans notre microbiote. Les études sur les bactéries du genre Faecalibacterium permettent le développement d'applications prometteuses en santé humaine. Les maladies gastro-intestinales, mais aussi obésité, maladies métaboliques ou dépression sont concernées par les traitements probiotiques.

Publié le 17 juillet 2023

illustration Des probiotiques de nouvelle génération pour améliorer la santé humaine
© AbodeStock

Chez l'homme, de nombreuses maladies sont associées à des altérations du microbiote intestinal, à savoir des augmentations ou des diminutions de groupes bactériens spécifiques. Dans nos études, nous avons pris comme exemple le genre Faecalibacterium, qui est la première bactérie commensale potentiellement bénéfique identifiée sur la base de données cliniques humaines. Notre équipe (Sokol H. et al., 2008) a comparé les microbiotes de patients atteints de maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) en rémission ou en rechute. Depuis, de nombreuses études ont souligné que de faibles niveaux de population de Faecalibacterium sont corrélés avec des conditions inflammatoires rencontrées dans le cadre du cancer colorectal et de la dermatite atopique, mais aussi dans d’autres maladies comme la dépression. De plus, la présence relative de ce genre reflète, au moins en partie, l'état de santé intestinal, car Faecalibacterium est en général présent à des niveaux réduits chez les personnes atteintes de maladies ou de troubles gastro-intestinaux. 

Un lien entre faible niveau de Faecalibacterium et maladie

Nous avons passé en revue l'ensemble des connaissances actuelles sur Faecalibacterium. Ce travail a abouti à un article [1] regroupant toutes les dernières avancées scientifiques sur le sujet. 
Nous y décrivons les mises à jour de la taxonomie de Faecalibacterium, qui a évolué d’un taxon monoespèce en un taxon multiespèce au cours de la dernière décennie. Nous explorons ensuite les liens découverts entre l’abondance de Faecalibacterium et diverses maladies depuis la publication des premières études axées sur les MICI (Sokol H. et al., 2008). Des niveaux faibles de Faecalibacterium ont été observés en premier lieu chez des patients atteints de MICI (Sokol H. et al., 2008), puis également chez des patients souffrant de syndrome de l’intestin irritable, d’obésité et de syndrome métabolique et, plus récemment, chez des patients hospitalisés souffrant de Covid-19. Une corrélation a aussi été montrée entre des niveaux élevés de Faecalibacterium et l’efficacité des anti-PD1 et anti-CTLA4 utilisés dans le cadre de l’immunothérapie de patients cancéreux.

Comment moduler ce niveau de Faecalibacterium dans l’intestin ?

La première piste consiste à utiliser une souche de Faecalibacterium comme médicament. C’est la stratégie choisie par Exeliom Biosciences, la spin-off d'INRAE et de l’Inserm créée en 2018. Les niveaux de Faecalibacterium dans le microbiote intestinal peuvent aussi être modulés par le biais de l’ingestion de produits (aliments et compléments alimentaires) contenant des bactéries probiotiques et/ou des prébiotiques qui sont des fibres uniquement digérées par nos bactéries intestinales. 

La figure ci-dessous résume les mécanismes d’action associés aux effets bénéfiques qui ont été attribués au genre Faecalibacterium.

Relations entre le niveau de population de Faecalibacterium dans le microbiote intestinal et l'inflammation du côlon

Relations entre Faecalibacterium dans le microbiote intestinal et l'inflammation du côlon

L'état normal du microbiote contraste fortement avec la dysbiose souvent rencontrée dans les maladies digestives telles que les MICI. L'inflammation intestinale s'accompagne d'une surproduction de dérivés actifs de l’oxygène (O2) ainsi que d'une augmentation des niveaux d'O2, conditions qui favorisent les bactéries anaérobies facultatifs par rapport aux bactéries anaérobies stricts telles que Faecalibacterium. Dans certaines cohortes de patients, l'abondance de F. duncaniae A2-165 diminue alors que celle de F. longum L2-6 qui résiste mieux à l’O2 augmente (Song et al., 2016 ; Zhang et al., 2018).

Conclusion

La compilation des données épidémiologiques et expérimentales soutient fortement l'utilisation possible de Faecalibacterium comme probiotique de nouvelle génération (NGP) ou produit biothérapeutique vivant (LBP) chez l’être humain.

RÉFÉRENCE

1. Martín R., Rios-Covian D., Huillet E. et al. (2023). Faecalibacterium: a bacterial genus with promising human health applications. FEMS Microbiol Rev. 2023 Jul 14, doi.org/10.1093/femsre/fuad039

En savoir plus

Alimentation, santé globale

La césarienne perturbe la barrière intestinale du nouveau-né

COMMUNIQUÉ DE PRESSE - La césarienne est l’une des chirurgies les plus courantes dans le monde, pouvant sauver chaque année mères et enfants. Mais elle n’est pas sans conséquences. Elle perturbe le développement du microbiote intestinal du nouveau-né. S’en suivent des réactions en cascade, aboutissant à une prédisposition à l’inflammation intestinale excessive à l’âge adulte. Les résultats de ces travaux, réalisés en collaboration avec l’université Paris-Saclay, sont parus le 3 juillet dans la revue Microbiome.

04 juillet 2023

Alimentation, santé globale

Quand une bactérie intestinale aggrave le syndrome métabolique et qu’un probiotique le soulage

COMMUNIQUE DE PRESSE - Obésité, diabète et autres complications métaboliques sont autant de pathologies devenues aujourd’hui des questions de santé publique sans que l’on sache complétement en expliquer la prévalence. Une équipe de chercheurs de l’Inra, de Danone, de l’AP-HP, de l’Inserm et de Sorbonne Université vient de mettre en évidence, dans une étude préclinique in vivo, que les troubles métaboliques liés à un régime alimentaire riche en graisses sont aggravés par la prolifération d’une bactérie intestinale pro-inflammatoire, Bilophila wadsworthia qui contribue à détériorer la barrière intestinale. Ces effets sont atténués par une bactérie probiotique, Lactobacillus rhamnosus CNCM I-3690. Ces résultats ouvrent la voie au développement d’approches nutritionnelles et de probiotiques qui ciblent le microbiote. Ils sont publiés le 18 juillet 2018 dans la revue Nature Communications.

07 mai 2020