Alimentation, santé globale 5 min

Prédire à faible coût la composition en acides gras de la truite arc-en-ciel

Cette étude a consisté à calibrer la microspectroscopie Raman pour évaluer la composition en acide gras des dépôts adipeux chez la truite arc-en-ciel. La méthode s’avère fiable pour les acides gras omega 3 (EPA et DHA).

Publié le 27 avril 2022

illustration Prédire à faible coût la composition en acides gras de la truite arc-en-ciel
© E. Prado

Le poisson constitue la principale source d’acides gras polyinsaturés à longue chaîne (AGPI-LC) de la série n-3 (ou oméga 3) dans l’alimentation humaine. Les lipides des poissons sont riches en AGPI-LC n-3 tels que l’acide eicosapentaénoïque (EPA; 20:5 n-3) et l’acide docosahexaénoïque (DHA; 22:6 n-3), qui ont des effets bénéfiques sur la santé humaine.

En complément d’approches nutritionnelles, la sélection génétique peut permettre d’obtenir des poissons d'élevage ayant des teneurs plus élevées en EPA et DHA. La chromatographie en phase gazeuse (CPG) est utilisée comme méthode de référence pour l’identification et la quantification des différents types d’AG ; cependant, son coût élevé et la durée des analyses empêchent son emploi dans le phénotypage à haut débit nécessaire aux programmes de sélection. La microspectroscopie Raman*, qui est une méthode non destructive et peu coûteuse permettant l’identification de molécules biologiques a été testée comme alternative.

Chez les poissons, il existe plusieurs sites de dépôt des lipides : le foie, les muscles, les tissus adipeux périviscéral et sous cutané. Le tissu adipeux périviscéral a été choisi dans cette étude, car sa composition en AG est proche de celle de l’animal entier et ce tissu est disponible en quantité suffisante pour effectuer des analyses CPG individuelles. De plus c’est un tissu assez homogène, principalement composé d'adipocytes, et pour lequel les contaminations par la présence de protéines musculaires ou de sang, sont limitées.

Afin d’obtenir une variabilité importante de la composition en acide gras tissulaire, 268 truites ont été nourries avec trois aliments ayant des compositions en acides gras très différentes. L’un de ces aliments était un aliment végétal, totalement dépourvu de farine et d’huile de poisson, et donc d’acides gras oméga 3 à longue chaîne. La composition en AG a été évaluée avec la CPG et des spectres ont été obtenu avec la microspectroscopie Raman. Des méthodes de régression ont été ensuite utilisées afin d’établir une équation de prédiction de la teneur en AG à partir des spectres Raman.

Les meilleures valeurs de R2** validées par recoupement ont été obtenues pour les AGPI totaux, les AGPI oméga-6 et oméga-3 (0,79, 0,83 et 0,66, respectivement).
Pour les AGPI oméga 3 individuels, l'acide α-linolénique (ALA, C18:3 n-3), l'acide eicosapentaénoïque (EPA, C20:5 n-3) et l'acide docosahexaénoïque (DHA, C22:6 n-3) ont obtenu les meilleures valeurs de R2 (0,82, 0,76 et 0,81, respectivement).

Cette étude démontre que la spectroscopie Raman peut être utilisée pour prédire la composition en AGPI des adipocytes de truites et que cette technique peut permettre le phénotypage à grande échelle et à haut débit chez la truite arc-en-ciel.

* La spectroscopie Raman et la microspectroscopie Raman sont des méthodes non destructives d'observation et de caractérisation de la composition moléculaire et de la structure externe d'un matériau, qui exploite le phénomène physique selon lequel un milieu modifie légèrement la fréquence de la lumière y circulant. Ce décalage en fréquence dit l'effet Raman correspond à un échange d'énergie entre le rayon lumineux et le milieu, et donne des informations sur le substrat lui-même. La spectroscopie Raman consiste à envoyer une lumière monochromatique sur l’échantillon et à analyser la lumière diffusée. Les informations obtenues par la mesure et l'analyse de ce décalage permettent de remonter à certaines propriétés du milieu, par la spectroscopie.

** R², ou R-carré est appelé coefficient de détermination, il est utilisé surtout en statistiques pour juger de la qualité d’une régression linéaire

 

Ces travaux sont le fruit d’une collaboration entre le SYSAAF, ScanMAT, l’ISCR, l’IPR, l’INRAE (AgroParisTech, Univ Pau & Pays Adour, PEIMA, Univ. de Rennes 1), l’IRMAR (Agrocampus Ouest, Rennes) et l’entreprise Les Sources de l’Avance (Groupe Aqualande, Roquefort) dans le cadre du projet OMEGA TRUITE (Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, n° PFEA47 0017 FA 1000008)

sylvie André

Contacts

Jérôme Bugeon Contact scientifiqueLaboratoire de Physiologie et Génomique des Poissons (LPGP)

Geneviève Corraze Contact scientifiqueNutrition, Métabolisme, Aquaculture (NuMéA)

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