Agroécologie 6 min

Des prédicteurs de l'efficience alimentaire identifiés dans le sang du porc

Déterminer l’efficience alimentaire d’un porc en croissance nécessite de mesurer sa consommation alimentaire et d’enregistrer son gain de poids pendant une période de test. Cette méthode est longue, coûteuse, et pas toujours précise quand elle est réalisée sur un groupe d’animaux élevés ensemble. L'identification de biomarqueurs de l’efficience alimentaire permettrait d’obtenir une mesure rapide et accessible à partir d’une seule prise de sang pour chaque animal.

Publié le 20 octobre 2021

illustration Des prédicteurs de l'efficience alimentaire identifiés dans le sang du porc
© INRAE

L'amélioration de l'efficience alimentaire est d’une importance primordiale en élevage aussi bien pour des raisons économiques qu’environnementales. Le calcul de cette efficience repose sur les mesures de la consommation alimentaire et du gain de poids quotidien, ceci durant une période de test de plusieurs semaines, ce qui est long et coûteux ; en élevage commercial, la valeur individuelle n’est souvent déterminée que par une approximation de la mesure à l’échelle du groupe (tous les porcs élevés dans une même case) par manque de capacités à mesurer les consommations alimentaires individuelles. L'identification de prédicteurs fiables (ou biomarqueurs) dans le sang simplifierait grandement cette mesure de l’efficience alimentaire individuelle. Cela permettrait de donner des recommandations de conduites alimentaires pour chaque animal, des éléments objectifs de tri des animaux à des périodes clés, ou d’améliorer les schémas de sélection grâce à des données plus précises et obtenues sur un grand nombre d’animaux.

Afin d’identifier des prédicteurs moléculaires de l'efficience alimentaire, les niveaux d’expression de plusieurs milliers de gènes dans le sang de porcs en croissance ont été mesurés et combinés en arbres de décisions utilisant des algorithmes d'apprentissage automatique (dits de machine learning c’est-à-dire une technologie d'intelligence artificielle permettant aux ordinateurs d'apprendre sans avoir été programmés).

Toutes les données provenaient de porcs de race Large White issus de deux lignées sélectionnées de manière divergente pour le niveau de consommation moyenne journalière résiduelle*, qui constitue une mesure de l’efficience nette d’utilisation des nutriments. Des mesures individuelles de l'indice de consommation alimentaire (IC)** ont également été réalisées pour tous les animaux. Ces données ont été obtenues au cours de trois expériences différentes incluant des porcs à des stades de croissance contrastés (poids corporels variant entre 15 à 115 kg) et recevant des régimes alimentaires différents, et collectées sur des périodes variant de 2 à 9 semaines. La combinaison des trois expériences a donc permis de considérer à la fois une large gamme de variation de valeurs de l’IC (Moyenne = 2,85 ; Min = 1,92 ; Max = 5,00) et une distribution continue de ces valeurs pour un total de 148 porcs. Les niveaux d’expression des transcrits des gènes ont été mesurés dans le sang (~27 000 sondes moléculaires) à l'aide d'une puce à ADN. Des algorithmes d’apprentissage automatique procédant par de multiples combinaisons d’arbres de régression décisionnelle (GTB**) ont été appliqués sur la moitié du jeu de donnés (phase d’apprentissage ; 74 porcs), puis validés sur la seconde moitié (phase de test ; 74 porcs également). Ils ont permis d’identifier la meilleure combinaison de transcrits de certains gènes (ici vingt-cinq) qui permettent de prédire la valeur d’IC avec une très bonne précision : erreur de 8 % sur la valeur vraie mesurée, qualité élevée de la prédiction évaluée à 80 %.

A partir d’un petit nombre de transcrits de gènes mesurés dans le sang et combinés dans un index synthétique, il est donc possible de prédire l’efficience alimentaire individuelle d’un porc, à la place des mesures habituellement effectuées sur une longue période de test. Ces modèles prédictifs pourraient être intégrés dans des applications d'élevage sur mesure.

*La consommation résiduelle est définie comme la différence entre la quantité d’aliment ingéré observée et une valeur théorique calculée selon les besoins d’entretien et de production de l’individu. C’est une mesure souvent proposée en sélection.
**L’indice de conversion alimentaire (IC) est défini comme le rapport entre la quantité d’aliment ingérée et le gain de poids pendant une période de référence. C’est la mesure adoptée dans les élevages commerciaux.
** GTB : Gradient Tree Boosting : algorithme d’apprentissage automatique basé sur des arbres de régression décisionnelle. Après avoir analysé un premier arbre pour sa capacité à prédire la valeur connue du caractère analysé, l’algorithme augmente le poids relatif de chaque observation qu’il trouve compliquée à classer. En revanche, il diminue le poids de celle dont la classification ne pose pas de problème. Ces combinaisons améliorent la prédiction.

Sylvie Andrérédactrice

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Florence Gondret Contact scientifiquePhysiologie, Environnement et Génétique pour l'Animal et les Systèmes d'Élevage

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