Agroécologie Temps de lecture 2 min
Des plantes et des bactéries collaborent depuis plusieurs millions d’années pour bénéficier de l’azote présent dans l’air
Des chercheurs d’INRAE et du CNRS identifient chez neuf espèces de plantes symbiotiques des gènes qui permettent l’établissement de la symbiose fixatrice d’azote de l’air présents chez leur ancêtre commun de près de 90 millions d’années ! Cette découverte ouvre de nouvelles voies, pour que des plantes d’intérêt agronomique puissent, grâce à la biologie de synthèse, bénéficier de cette aptitude qui permettrait ainsi de réduire l’utilisation d’engrais chimique dans les sols.
Publié le 26 janvier 2024

Les plantes se nourrissent généralement de nutriments azotés provenant du sol. Cependant, certaines espèces de plante, comme le haricot et la luzerne, ont développé une capacité unique : elles peuvent utiliser l'azote présent dans l'air pour leur croissance. Cette aptitude résulte d'une collaboration vieille de plusieurs millions d'années avec des bactéries du sol. Ces microorganismes symbiotiques jouent un rôle clé en échangeant des signaux et des nutriments de manière très précise avec les plantes.
Dans une étude publiée dans la revue Nature Plants, des chercheurs d’INRAE et du CNRS ont comparé les génomes de neuf espèces de plantes symbiotiques appartenant à des branches phylogénétiques distinctes. En cherchant les points communs de ces génomes, les scientifiques ont réussi à identifier les gènes qui étaient probablement déjà exprimés dans l’ancêtre commun à toutes ces espèces il y a plus de 90 millions d’années. Ces gènes sont principalement impliqués dans la reconnaissance des signaux symbiotiques bactériens, la formation des nodules (fixateurs d’azote) et l’infection des bactéries dans les tissus racinaires.
L'étude a également révélé que les gènes impliqués dans la formation de structures permettant l’accueil intracellulaire des bactéries ont évolué indépendamment dans deux branches de légumineuses auxquelles appartiennent la luzerne et le mimosa pudique. Des gènes codant des peptides, aux propriétés vraisemblablement antimicrobiennes, ont émergé dans les deux cas, suggérant un rôle dans la régulation du développement de leurs symbiotes et probablement la stabilisation de ces interactions plantes-bactéries à l’échelle évolutive.
En comprenant le programme symbiotique ancestral et celui qui en a dérivé au cours de l’évolution, les scientifiques ouvrent la voie à des approches de biologie de synthèse. Ces méthodes pourraient permettre de générer de nouvelles symbioses fixatrices d’azote chez les plantes d’intérêt agronomique qui n’en bénéficient pas comme des céréales telles que le blé ou le maïs. Cela permettrait de réduire l’utilisation d’engrais, contribuant ainsi à une agriculture durable et tout autant productive.
RÉFÉRENCE
Libourel, C., Keller, J., Brichet, L. et al. Comparative phylotranscriptomics reveals ancestral and derived root nodule symbiosis programmes. Nat. Plants 9, 1067–1080 (2023). https://doi.org/10.1038/s41477-023-01441-w