Alimentation, santé globale 2 min

Mieux comprendre les risques de toxicité de la versicolorine A

La versicolorine A est un contaminant alimentaire émergent peu connue et non réglementée à ce jour. Afin d’évaluer son potentiel impact sur la santé, des scientifiques du laboratoire de Toxicologie alimentaire (Toxalim) du centre INRAE Occitanie-Toulouse et de University of Navarra (Espagne) étudient la toxicité de cette mycotoxine dès de faibles concentrations.

Publié le 29 octobre 2024

© INRAE

L’aflatoxine B1 (AFB1) est le cancérogène naturel le plus puissant connu à ce jour, dont la toxicité découle de sa structure chimique particulière. Cette toxine est naturellement produite par des mycotoxines des genres Aspergillus, qui contaminent les produits agricoles et alimentaires tels que les céréales, les fruits secs et graines oléagineuses et les épices, principalement dans des régions chaudes et humides des pays d’Afrique, d’Asie et d’Inde. Le respect des bonnes pratiques agricoles ainsi qu’une surveillance stricte par des tests réguliers, du champ à l’assiette, sont donc essentiels pour minimiser les risques de contamination. En Europe, l’exposition aux mycotoxines est faible en raison d’une surveillance et d’un contrôle stricte. La mise sur le marché des produits alimentaires est règlementée : ils ne doivent pas dépasser le taux de 4 µg/kg d’aflatoxines totales.

Lors de la biosynthèse de l’aflatoxine B1, d’autres composés organiques ayant une structure similaire sont produits, notamment une toxine appelée versicolorine A. Bien que cette molécule soit identifiée comme pouvant compromettre l’intégrité des génomes et que sa présence soit confirmée dans les aliments, sa toxicité était peu documentée, notamment à faible concentration. Des scientifiques du laboratoire Toxalim ont donc étudié les risques que présente cette mycotoxine en réalisant différents tests biologiques (test des comètes, test d’Ames ou test des noyaux) sur des cultures in vivo.

Les résultats montrent que cette toxine, induit des mutations ponctuelles et des lésions pré-mutagènes de l’ADN, ainsi que des dommages chromosomiques dans les cellules intestinales. Néanmoins les voies de réparation de l’ADN étant activées lors de l’exposition à cette toxine, les dommages induits n’affectent pas la viabilité cellulaire, et ce même à des concentrations très faibles.

D'un point de vue mécanistique, sa toxicité partage certains aspects avec celle de l'aflatoxine B1, mais semble présenter une toxicité particulière.

Des effets même à faible dose

Les résultats de cette étude confirment que la versicolorine A est mutagène et génotoxique (qui induit des dommages à l’ADN) à de très faibles concentrations, dix fois inférieurs à ce qui était attendu. Étant capable d'induire des mutations ponctuelles, des aberrations chromosomiques et des lésions pré-mutagènes de l'ADN, cette toxine pourrait être à la source de cancers. Des recherches supplémentaires sont donc nécessaires pour mieux comprendre l’impact de la versicolorine A sur la santé en caractérisant plus en détail sa génotoxicité et en étudiant sa potentielle cancérogénicité.

 

Référence :

Carine Al-Ayoubi, Maria Alonso-Jauregui, Amaya Azqueta, Julien Vignard, Gladys Mirey, Ophelie Rocher, Olivier Puel, Isabelle P. Oswald, Ariane Vettorazzi, Laura Soler, 2023. Mutagenicity and genotoxicity assessment of the emerging mycotoxin Versicolorin A, an Aflatoxin B1 precursor, Environmental Pollution, Volume 335, 122276 ; doi: 10.1016/j.envpol.2023.122276 ; ISSN 0269-7491

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