Alimentation, santé globale 5 min

L’arginine, un complément nutritionnel prometteur pour améliorer la lactation

La supplémentation du régime alimentaire de la mère en arginine pendant les périodes de gestation et de lactation favorise la production de lait dans un modèle animal.

Publié le 01 juin 2022

illustration L’arginine, un complément nutritionnel prometteur pour améliorer la lactation
© Adobe Stock

Malgré la recommandation de l’Organisation Mondiale de la Santé en faveur d’un allaitement exclusif des nouveau-nés pendant au moins 6 mois en raison de ses bénéfices santé, le taux d’allaitement reste faible en France. Une cause majeure de l’arrêt prématuré de l’allaitement est une production insuffisante de lait pour subvenir aux besoins de l’enfant. L’arginine, utilisée en nutrition animale pour augmenter le poids des portées, apparait comme un complément nutritionnel prometteur pour stimuler la production de lait maternel. Des scientifiques de l’unité PHAN (INRAE -Nantes Université) ont réalisé une étude afin de tester l’effet de cette supplémentation alimentaire des mères en arginine sur leur production de lait, pendant les deux fenêtres d’intervention possibles durant la période périnatale : la gestation et la lactation.

Améliorer l’incidence de l’allaitement en favorisant la production de lait maternel par supplémentation en arginine du régime alimentaire de la mère…

L’étude repose sur l’utilisation d’un modèle de rate allaitant des portées nombreuses (12 ratons/mère au lieu de 8 ratons habituellement) et donc présentant des difficultés à répondre à la demande en lait des petits. La production de lait a été mesurée par la méthode d’enrichissement à l’eau deutérée, utilisant un composé traceur non toxique (deutérium), et préalablement adaptée au laboratoire Phan sur de petits animaux comme les rongeurs.

L’étude a montré que la supplémentation alimentaire des rates en arginine favorisait une augmentation de 20% de la production de lait maternel et un gain de poids des petits de 9%, lorsque la supplémentation était effectuée à la fois pendant la gestation et la lactation. Ceci suggère que l’arginine intervient dès la gestation, lors de la mise en place de la lactation. Cette amélioration de la production de lait des mères était également associée à une augmentation de 20% de la concentration en acides gras totaux du lait maternel et de 49% du flux d’acides gras de la mère à sa portée. En parallèle, la consommation alimentaire des mères augmentait de 17%. Du point de vue métabolique, plusieurs gènes impliqués dans la synthèse des lipides (lipogénèse) et la régulation de leur métabolisme étaient surexprimés jusqu’à 2,8 fois dans la glande mammaire des rates allaitantes nourries avec un régime supplémenté en arginine, pendant la gestation et la lactation. La concentration en leptine plasmatique, hormone sécrétée par les adipocytes, était également plus élevée (+39%) chez les mères supplémentées. Aucun effet néfaste n’a été observé ni sur les mères, ni sur la descendance à l’âge adulte.

…pendant la gestation et la lactation !

Ces résultats suggèrent que la supplémentation en arginine, pendant la gestation, pourrait favoriser la mise en place de réserves énergétiques et la maturation des cellules épithéliales mammaires, en stimulant l’expression des gènes impliqués dans la lipogenèse. Ces réserves seraient ensuite mieux remobilisées et mieux utilisées par la glande mammaire pendant la lactation, notamment sous l’action de l’hormone de croissance GH et de la prolactine, et permettraient l’augmentation de la production de lait et son enrichissement en lipides. L’augmentation de la consommation alimentaire des mères pendant la lactation pourrait finalement constituer une réponse à l'augmentation de la production de lait et ainsi permettre de couvrir leurs besoins énergétiques.
L’arginine pourrait représenter un complément nutritionnel prometteur pour stimuler la lactation, sous réserve d’études complémentaires afin d’évaluer l’innocuité métabolique de ce complément, à la fois sur la mère et sur sa descendance à long terme. Une étude clinique pourrait ensuite être envisagée pour évaluer les effets de l’arginine chez la femme allaitante.

Mécanisme d’action de l’arginine au niveau de la glande mammaire

PARTENAIRES SCIENTIFIQUES : ONIRIS NP3, Plateforme spectrométrie masse CRNH-OUEST

FINANCEMENT : cette étude a été réalisée par l’UMR PhAN dans le cadre d’une thèse Cifre en partenariat avec l’entreprise Laboratoire France Bébé Nutrition.

PUBLICATION ASSOCIEE Thomas Sevrin, Charlène Sirvins, Agnès David, Audrey Aguesse, Alexis Gandon, Blandine Castellano, Dominique Darmaun, Clair-Yves Boquien, Marie-Cécile Alexandre-Gouabau 2021 Dietary Arginine Supplementation during Gestation and Lactation Increases Milk Yield and Mammary Lipogenesis in Rats Get access Arrow. The Journal of Nutrition, 151 (8), 2188–2198. https://doi.org/10.1093/jn/nxab152

 

En savoir plus

Alimentation, santé globale

L'alimentation des enfants racontée aux parents

Cherchant à en savoir un peu plus sur l’alimentation du bébé à l’adolescent, l’auteur a retracé l’expérience de son enfance. Il a alors passé cette trame romancée au crible de la science en allant interroger des chercheurs de différentes disciplines. Accompagné et guidé dans sa démarche par une chercheuse, il raconte ainsi cette tranche de vie qu’il livre aux apprentis parents d’aujourd’hui et de demain.

19 février 2020

Alimentation, santé globale

Une alimentation maternelle déséquilibrée affecte le système digestif de la descendance

COMMUNIQUE DE PRESSE - Une carence en protéines chez la femelle en gestation est associée à des anomalies digestives durables pour la descendance. En étudiant le lien entre malnutrition périnatale et système digestif chez le rat, une équipe de chercheurs de l'Inserm en collaboration avec l’Inra et l'Université et CHU de Nantes a découvert des anomalies fonctionnelles digestives chez les ratons et une réponse inadaptée au stress. Bien que ce travail ait été mené chez l'animal, il démontre une fois de plus l’incidence du stress périnatal sur la santé de l’adulte et interpelle sur les conséquences de carences involontaires ou provoquées par des régimes restrictifs pendant la grossesse. Ces travaux sont publiés dans The FASEB Journal.

23 avril 2020