L’agroécologie : une alliée pour la nature, le climat et l’agriculture en Europe

L’agroécologie est une solution pour lutter contre le dérèglement climatique et la perte de biodiversité. En effet, une méta-analyse à partir de 170 études conduites dans 21 pays européens a montré que les pratiques agroécologiques favorisent la diversité biologique et le stockage du carbone dans les sols, tout en réduisant certaines émissions de gaz à effet de serre. 

Publié le 18 septembre 2025

© Anne Farruggia

L’agriculture contribue grandement au dépassement des limites planétaires : changement climatique, perte de biodiversité et pollution. En particulier, les systèmes qui s’appuient fortement sur le recours aux intrants (engrais de synthèse, produits phytosanitaires, matériel agricole, énergie), contribuent beaucoup aux émissions de gaz à effet de serre et à la dégradation des sols. Existe-il des modèles alternatifs crédibles ? L’agroécologie a-t-elle un rôle à jouer ? Que peut-on réellement en attendre ? L’agroécologie repose sur plusieurs grands principes, parmi lesquels favoriser la diversité des cultures et des espèces, entretenir des sols vivants, réduire la dépendance aux intrants chimiques, et réintégrer l’élevage et les cultures dans des systèmes plus équilibrés. Concrètement, cela peut aller de changements modestes (remplacer les engrais de synthèse par du fumier) à une refonte complète des systèmes d’élevage, par exemple associer plusieurs espèces animales et végétales, imitant ainsi le fonctionnement d’un écosystème naturel.

Dans le cadre du projet Agroecology-TRANSECT, une équipe de chercheurs européens, dont plusieurs de l’UMRH et de l’UREP, a passé au crible 170 études scientifiques, dans l’objectif de mesurer les effets de pratiques agroécologiques sur la biodiversité, le stockage du carbone dans les sols et les émissions de gaz à effets de serre en Europe. Cette démarche, appelée méta-analyse, permet de combiner des résultats dispersés afin d’obtenir une vision globale.

Quels effets sur la biodiversité ?
Les résultats sont encourageants : dans la majorité des cas, les pratiques agroécologiques favorisent la diversité des organismes vivants : insectes pollinisateurs, plantes, vers de terre et micro-organismes du sol. Cette biodiversité accrue n’est pas seulement un indicateur écologique ; elle soutient directement les services rendus par la nature aux agriculteurs, comme la pollinisation ou la fertilité des sols. 
Seuls les systèmes de maraichage (dans la limite des publications recensées, moins nombreuses qu’en grandes cultures et en élevage), ne présentent pas d’effets positifs notables sur la biodiversité lorsque des pratiques agroécologiques sont adoptées, et cela malgré un recours important aux pesticides dans les systèmes conventionnels auxquels ils étaient comparés.

Et sur le climat ?
Cette méta-analyse montre que l’agroécologie permet d’augmenter les stocks de carbone organique dans les sols et de réduire les émissions de protoxyde d’azote (N₂O), un puissant gaz à effet de serre principalement généré par les activités agricoles. En revanche, son effet est beaucoup moins clair sur le dioxyde de carbone (CO₂) et le méthane (CH₄). Parfois, les sols vivants libèrent davantage de CO₂ par respiration, signe d’une activité biologique plus intense. Ceci n’est pas forcément négatif, mais cela limite l’impact sur le résultat net pour ce gaz.

Une stratégie “gagnant-gagnant”
Que l’on passe d’un système conventionnel à un modèle simplement « substitutif » (par exemple, remplacer un intrant chimique par un équivalent organique) ou à un système totalement repensé, les résultats montrent des effets positifs sur la biodiversité et le climat. Dans la plupart des études où sont mesurés à la fois biodiversité et climat, les chercheurs observent des bénéfices conjoints pour la biodiversité et le stockage du carbone dans les sols.

Quelques limites de connaissance nécessiteront toutefois des travaux complémentaires : les effets sur certains gaz comme le méthane restent mal compris et peu d’études permettent d’évaluer le bilan complet des émissions à l’échelle des exploitations. De plus, l’impact sur la productivité et la rentabilité n’a pas été intégré dans cette analyse.

L’agroécologie n’est pas une recette unique, mais un ensemble de pratiques qui doivent être adaptées aux contextes locaux. Adopter l’agroécologie en Europe permet d’améliorer la biodiversité et contribue à atténuer le réchauffement climatique, avec des bénéfices en particulier pour les stocks de carbone dans les sols et la réduction des émissions du protoxyde d’azote. Ces résultats vont dans le sens des objectifs fixés par le Pacte Vert européen et la stratégie biodiversité. Ils rappellent qu’une agriculture plus respectueuse du vivant est possible et bénéfique pour l’ensemble de la société.

Cian Blaix, Bertrand Dumont, Juliette M.G. Bloor, Cecilia Zagaria, Géraldine Fleurance, Frédéric Joly, Olivier Huguenin-Elie, 2026, Agroecological interventions increase biodiversity and the potential for climate change mitigation in Europe, Agriculture, Ecosystems & Environment, Volume 395,109938,  https://doi.org/10.1016/j.agee.2025.109938.

Agroécologie-TRANSECT est un projet de recherche européen visant à explorer la manière dont les pratiques agricoles respectueuses de la nature fonctionnent et se développent dans 10 pays d'Europe et au-delà, et comment nous pouvons les utiliser pour accélérer le changement au profit des personnes, des animaux et de l'environnement.

Sylvie André

rédaction

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Bertrand Dumont

Contact scientifique

UMR Herbivores (UMRH)

Juliette Bloor

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