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Jean-Yves Pailleux, de l’élevage à l’ergonomie : un chemin de transformation

Après près de quarante ans au service de la recherche publique, Jean-Yves Pailleux, technicien à l’UMR Territoires (INRAE-VAS-UCA), s’apprête à tourner la page. De ses débuts « à fond dans le mouton » à son engagement dans l’étude et l’amélioration du travail en agriculture, il livre un témoignage riche, lucide et profondément humain sur son parcours marqué par l’envie constante de comprendre, d’accompagner et de « laisser la place ». Ce terme marquant, il l’utilise à plusieurs reprises dans le podcast enregistré à l’occasion de sa fin de carrière, occasion également de « laisser une trace ». 

Publié le 27 mai 2025

Du troupeau aux systèmes agricoles : un engagement concret

En 1987, à tout juste 20 ans, Jean-Yves Pailleux rejoint alors l’INRA comme adjoint technique, fort de ses expériences agricoles familiales et saisonnières. Pendant plus de quinze ans, il travaille au sein du domaine expérimental de Redon, mêlant suivi technique des troupeaux, optimisation des systèmes d’élevage et collaboration étroite avec les scientifiques.


« Je pensais être utile. J’avais une place bien identifiée dans le dispositif de recherche », se souvient-il. L’exigence et l’investissement sont importants, parfois au détriment de la vie personnelle. Mais la passion est là, nourrie aussi par une “double vie” : son implication dans la gestion pastorale de l’estive de Manson et sa vie professionnelle au plus près des dispositifs expérimentaux. « Les deux se fécondaient dans un dialogue permanent, précise-t-il, l’une servant de comparaison pour prioriser et pour décider dans l’autre, et vice-versa. »

Prendre du recul : écouter et comprendre les agriculteurs

En 2003, il change de cap en rejoignant une unité de recherche qui s’intéresse entre autres au fonctionnement des systèmes d’élevage. Les brebis laissent place aux enquêtes en ferme et aux entretiens avec les éleveurs, où il apprend l’art d’écouter, de reformuler et de saisir les logiques de travail. De nombreuses questions pour mener à bien ces entretiens se sont vite faites sentir : comment faire en sorte que ces entretiens ne soient pas des discussions de comptoirs ?

Comment être performant, c’est-à-dire comment balayer le plus grand nombre d’items dans un temps court ? Comment écouter pour embarquer la personne qui gérait la ferme, qui travaillait, pour qu’elle se livre ? Mais au fil des rencontres, certaines discussions remettent en question ses certitudes. La prise de conscience est forte : comprendre les difficultés vécues sur le terrain suppose de dépasser les approches techniques.

Formation et transformation : l’ergonomie comme tournant

Dans cette carrière bien remplie, deux jalons marquent le parcours de Jean-Yves : l’obtention de son BTS Productions animales par validation des acquis en 2006, puis une licence professionnelle en ergonomie du travail agricole en 2015. Cette dernière change profondément sa façon de voir les choses et de travailler : « J’ai découvert qu’on pouvait donner une place à ce qui se vit au travail, et que c’est déjà du travail. » De technicien « qui maîtrise la technique », il devient un « technicien travail » - si aujourd’hui ce titre qu’il qualifie d’officieux le fait sourire, il reste néanmoins révélateur de l’évolution de son parcours vers les sciences humaines et sociales.

C’est ainsi qu’en collaboration avec le chercheur Xavier Coquil, il développe des approches innovantes pour accompagner les agriculteurs et ceux qui les soutiennent. Ensemble, ils conçoivent et diffusent des méthodes centrées sur les réponses à la question simple mais essentielle : « Comment ça va dans le travail ? ». Ses interventions contribuent à changer les pratiques d’animateurs et d’accompagnateurs, et à inscrire durablement la qualité de vie au travail dans les réflexions agricoles, en atteste les résultats récents du projet PINSMOI.

S’engager pour les autres

Parallèlement à son activité scientifique, Jean-Yves s’investit dans le syndicalisme, notamment au CHSCT puis à la F3SCT. « Le syndicalisme donne l’opportunité de penser par soi-même et fait grandir », précise-t-il. 


À l’heure du départ, il « laisse la place » avec la satisfaction d’avoir contribué à construire des environnements de travail plus justes, et heureux d’avoir pu « laisser une trace » avec le premier numéro du podcast « Fin de carrière à cœur ouvert » : le podcast qui célèbre les fins de parcours professionnels d’agents du Centre INRAE Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes.

« Fin de carrière à cœur ouvert », le podcast du Centre INRAE Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes qui célèbre les fins de parcours des agents. Ce moment charnière, juste avant le départ en retraite. Un témoignage livré comme un moment fort de transmission, d’émotion et de reconnaissance.

Pour découvrir le témoignage de Jean-Yves : https://mediatheque.inrae.fr/Clermont/embed/public/537167022

Les dates et étapes clés du parcours de Jean-Yves Pailleux

  • 1987 — Entrée à l’INRA comme adjoint technique dans le domaine animal
  • 1988 - 2003 — Technicien au domaine expérimental de Redon : suivi des troupeaux et expérimentations systèmes
  • 2003 — Technicien de recherche au département SAD : travail sur l’étude du fonctionnement des systèmes d’élevage
  • 2006 — Obtention d’un BTS Productions animales obtenu par VAE (validation des acquis et de l’expérience)
  • 2010 — Début de l’engagement bénévole avec Solidarité paysans
  • 2015 — Obtention d’une Licence professionnelle en ergonomie, Université Clermont-Auvergne
  • 2015 - 2025 — Collaboration avec Xavier Coquil sur l’accompagnement du travail agricole au sein de l’UMR Territoires (INRAE, UCA, VAS)
  • Mai 2025 — Départ à la retraite
Sabrina Gasser

Responsable communication du centre Clermont-Auvergne-Rhône-Alpes

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