Alimentation, santé globale 2 min

Jardins partagés : vers des modes de vie plus durables ?

COMMUNIQUE DE PRESSE - De nombreuses villes implantent des jardins partagés sur leurs territoires, espérant ainsi améliorer la santé des citadins tout en contribuant au développement durable. Mais quel est l’impact de la pratique de cette activité sur les jardiniers? Pour répondre à ces questions, des chercheuses d’INRAE ont suivi 66 nouveaux jardiniers dans des jardins partagés à Montpellier. Et leurs résultats, publiés le 26 novembre 2020 dans BMC Public Health, sont surprenants : après une année de pratique, leurs habitudes de consommation et leurs attitudes en lien avec la durabilité n’ont pas réellement changé. Ils ont donc poussé leur enquête pour comprendre ces résultats.

Publié le 18 mai 2021

illustration Jardins partagés : vers des modes de vie plus durables ?
© Christophe Maitre - INRAE

Est-ce la participation à un jardin qui a encouragé l’adoption de comportements plus sains et durables ? Ou bien, est ce que ces comportements préexistaient ?

Cultiver ses choux, ses carottes et ses fraises non loin de la maison après le travail ou le weekend. Un scénario qui fait de plus en plus d’adeptes parmi les Français1. Nous sommes de plus en plus nombreux à prendre part à des associations qu’on appelle « jardins partagés ». Qu’ils soient totalement partagés ; c’est-à-dire que tous les jardiniers cultivent la même parcelle ; ou incluant des parcelles individuelles, ces jardins offrent la possibilité à chacun de cultiver son bout de terre. Les chercheurs du monde entier se sont intéressés à ce phénomène de société grandissant. Leurs résultats suggèrent que la participation à ces jardins partagés est associée à une consommation plus importante de fruits et légumes et à plus d’activité physique, mais aussi à un meilleur bien-être mental et à plus de lien social. Néanmoins, une revue systématique de la littérature sur le lien entre jardin collectif et santé, réalisée par l'équipe et publiée le 17 mai 2021 dans Nutrition Reviews, souligne les limites des études existantes. En particulier ces dernières sont principalement « transversales » - c’est-à-dire qu’elles observent les jardiniers à un moment donné. Or, ce type d’étude ne permet pas d‘établir de relation de causalité. Est-ce la participation à un jardin qui a encouragé l’adoption de comportements plus sains et durables ? Ou bien, est ce que ces comportements préexistaient à l’entrée au jardin (et avaient peut-être même contribué au choix d’intégrer un jardin collectif) ?

A la fin de l’année d’enquête, sur les 66 néo-jardiniers, 16 avaient abandonné le jardin en cours. Les jardiniers les plus actifs (56%) venaient en moyenne une fois par mois au jardin.

C’est ce qu’ont voulu savoir des chercheuses en Santé Publique & Nutrition d’INRAE. Elles ont pour cela suivi pendant un an (2018), 66 jardiniers novices, inscrits dans un des jardins partagés de Montpellier. L’évolution de leurs modes de vie, à l’entrée dans le jardin puis an après la première saison d’activité, a été comparée à un groupe de 66 volontaires non pratiquants. Ces derniers ont été recrutés parmi les participants de l’enquête Mont’Panier 2 et ressemblaient aux jardiniers novices (âge, sexe, revenus, structure du foyer …) mais ne participaient pas à un jardin partagé Pour leur étude, les chercheuses ont évalué les trois dimensions de la durabilité : santé, environnement et économie. A la fin de l’année d’enquête, sur les 66 néo-jardiniers, 16 avaient abandonné le jardin en cours. Les jardiniers les plus actifs (56%) venaient en moyenne une fois par mois au jardin. Les scientifiques n’ont pas observé d’effet de la première année de jardinage sur la durabilité des pratiques alimentaires des foyers (qualité nutritionnelle, impact environnemental et coût des approvisionnements alimentaires). Elles ne notent pas non plus d’évolution de leur activité physique, de leur bien-être mental, leur lien social, ou encore leur connexion à la nature. Mais alors comment expliquer un tel résultat, apparemment en contradiction avec la littérature scientifique ?

Pour le comprendre, les chercheuses ont mené des entretiens approfondis avec plusieurs jardiniers en fin de l’étude. Une réponse est souvent revenue : bien que novices en jardinage, ces personnes étaient déjà sensibilisées à l’impact de leur mode de consommation sur la planète et leur santé. Intégrer un jardin était une étape de plus dans leur mode de consommation plus responsable. Par ailleurs, beaucoup se sont trouvées dépassées et découragées par leur manque de connaissances pour entretenir un potager. A cela s’ajoutant les contraintes liées à une vie active, elles ont alors diminué leur investissement dans cette nouvelle pratique, faute d’accompagnement pour apprendre à cultiver son jardin.

Cette étude montre les limites des jardins partagés en France et invite à réfléchir à de nouvelles formes plus adaptées qui faciliteraient la participation et l’intégration d’un public non "pré-sensibilisé". 

 

1L'Unep (L’Union Nationale des Entreprises du Paysage) réalise régulièrement des enquêtes sur des échantillons représentatifs de la population concernant les attentes des Français en matière d'espaces verts. Selon une enquête plus récente de l’UNEP (2019), 73% des Français, qu’ils jardinent ou non, considèrent le jardinage comme une source de plaisir (Unep & Ifop, 2019). Parmi les différentes formes de jardinage, les jardins potagers seraient particulièrement enviés (Figure 6) (UNEP & IPSOS, 2011). Selon les résultats de l’enquête européenne EQLS (European Quality of Life Survey), la proportion de foyers cultivant des fruits et légumes pour leur propre consommation a augmenté dans la plupart des pays d’Europe (+6% dans l’UE-15 entre 2003 et 2007) (Church et al., 2015).

2Mont’Panier est enquête conduite dans le cadre du projet Surfood-Foodscapes. Menée sur un échantillon de 500 ménages représentatif de la population Montpelliéraine, l’objectif est d’étudier les relations entre l’environnement alimentaire urbain et les pratiques alimentaires des mangeurs.

 

Références :

Marion Tharrey, Nicole Darmon, Urban collective garden participation and health: a systematic literature review of potential benefits for free-living adults, Nutrition Reviews, 2021;, nuaa147, https://doi.org/10.1093/nutrit/nuaa147

Tharrey, M., Sachs, A., Perignon, M. et al. Improving lifestyles sustainability through community gardening: results and lessons learnt from the JArDinS quasi-experimental study. BMC Public Health 20, 1798 (2020). https://doi.org/10.1186/s12889-020-09836-6

 

20210518_CP Jardins partagés, vers des modes de vie plus durables.pdfpdf - 783.37 KB

Service presse INRAE

Contacts scientifiques

Nicole Darmon Unité mixte de recherche « MOntpellier Interdisciplinary research center on Sustainable Agri-food systems » (MOISA)

Marion Tharrey Unité mixte de recherche « MOntpellier Interdisciplinary research center on Sustainable Agri-food systems » (MOISA)

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