Biodiversité Temps de lecture 2 min
Espèces envahissantes aquatiques : un nouveau modèle pour mieux les contrôler
COMMUNIQUÉ DE PRESSE - Les espèces envahissantes sont particulièrement problématiques dans les milieux aquatiques. Les gestionnaires des parcs naturels manquent d’outils pour définir leur stratégie de lutte. Sur la base de travaux parus dans Science of the Total Environment, des chercheurs d’INRAE proposent un nouvel outil. En couplant des estimations des bénéfices, coûts et impacts des actions de contrôle, ils ont établi un critère d’évaluation de l’allocation des efforts de contrôle aux zones à traiter en priorité, sous une contrainte budgétaire donnée.
Publié le 05 avril 2023

Nos parcs naturels1 sont sous la menace d’espèces exotiques envahissantes. Qu’elles soient d’origine animale, végétale ou microbienne, elles constituent des sources majeures de dommages aux activités humaines et à la biodiversité des écosystèmes terrestres ou aquatiques. Ces derniers étant les plus vulnérables.
La jussie en est un exemple. Cette plante aquatique est présente depuis les années 1990 dans le parc naturel régional de Brière en Loire-Atlantique. Son évolution est suivie régulièrement dans l’ouest de la France depuis 2012.
Mais un élément manque aux gestionnaires de milieux aquatiques : un outil associant évaluation des dommages, coûts du contrôle et propagation spatiale et dynamique. En effet, l’évaluation des moyens financiers à affecter au traitement des zones envahies nécessite la mise en place d’une règle de décision basée sur un critère coût-bénéfice, débouchant sur une mise en priorité des zones et/ou espèces à traiter.
Des chercheurs d’INRAE ont d’abord mis au point de nouvelles techniques d’évaluation des dommages. Un premier travail a consisté à poser les bases d’un critère de choix reposant sur l’optimisation de la répartition spatiale des efforts de contrôle de la jussie. Il est construit sur la base d’une comparaison entre les coûts de chantiers de traitement de zones envahies (arrachage mécanique, traitement chimique ders herbiers, etc.). Ces données ont été complétées par une étude de terrain évaluant les dommages évités grâce au contrôle.
Résultats ? Pour des budgets annuels inférieurs à 120 000 €, il est pertinent d’investir la totalité du budget sur une seule zone envahie du parc. Un résultat contre-intuitif au vue de la pratique actuelle visant à favoriser des traitements moins poussés sur l’ensemble des zones.
Alors que les budgets annuels de contrôle varient entre 117 000 € et 123 000 € sur le parc naturel régional, l’étude montre que des investissements bien plus conséquents (au moins d’un facteur 4) seraient nécessaires d’un point de vue socioéconomique, et seraient justifiés au vu de leurs bénéfices2 comparés au coût des politiques de contrôle. Cette recherche se poursuit actuellement en collaboration avec les gestionnaires du parc naturel régional, dans le but de développer un outil opérationnel d’aide à la décision basé sur des données actualisées d’invasion et de chantiers de contrôle.
Un projet financé par l’Onema (devenu l’OFB) lancé en 2012, permet d’assurer un suivi régulier de la jussie. La présence de cette espèce envahissante est majoritaire dans de nombreux milieux de l’ouest de la France. Regroupant des économistes et des écologues d’INRAE et d’AgroCampus Ouest, ce projet a fait le constat de l’absence d’un outil à base de modélisation qui associerait une évaluation des dommages causés par la jussie, des coûts de son contrôle et une modélisation spatiale et dynamique de sa propagation.
1 Au nombre de 58, les parcs naturels régionaux ont pour vocation d’asseoir un développement économique et social du territoire, tout en préservant et valorisant le patrimoine naturel, culturel et paysager. La richesse des parcs réside dans la transversalité dont ils font preuve, en intégrant les enjeux de biodiversité à leurs projets de territoire.
2 Par exemple, bénéfices liés au maintien d'activités récréatives, pêche, élevage, circulation sur les canaux, etc.
Référence
Courtois P., Martinez C., Thomas A. et al. (2023). Spatial priorities for invasive alien species control in protected areas. Science of The Total Environment, 878, 162675, https://doi.org/10.1016/j.scitotenv.2023.162675