Biodiversité 3 min
Mais comment fait Drosophila suzukii pour manger tous ces fruits ?
Drosophila suzukii, un insecte ravageur des cultures fruitières, se distingue par sa capacité à se nourrir d'une grande variété de fruits. Une étude récente menée par des chercheurs d’INRAE révèle que cette mouche accumule les composés chimiques des fruits sans les métaboliser, une tolérance qui pourrait lui permettre de s’adapter à différents environnements. Les résultats de cette étude publiés dans la revue eLife pourraient aider à développer des stratégies innovantes pour protéger les cultures contre ce ravageur.
Publié le 29 août 2024
Les insectes phytophages (qui se nourrissent de plantes) se concentrent généralement sur une ou quelques plantes spécifiques. Cependant certaines espèces d’insectes font exception en se nourrissant d'une grande variété de plantes. Tel est le cas de Drosophila suzukii, une petite mouche redoutable qui s’attaque à de nombreuses cultures fruitières, comme les cerises, les raisins, les fraises et les framboises. Capable de se nourrir de nombreuses variétés de fruits, cette espèce est considérée comme généraliste.
Un groupe de recherche, composée de scientifiques INRAE des unités CBGP (Centre de biologie pour la gestion des populations) et SVQV (Santé de la vigne et qualité du vin), a cherché à comprendre comment ces insectes parviennent à digérer et utiliser une si grande diversité de composés chimiques présents dans leurs différents aliments. Les scientifiques ont ainsi comparé la composition chimique de plusieurs fruits avec celle des drosophiles qui les avaient consommés. Les résultats obtenus grâce à une technique avancée, la chromatographie ultra-performante couplée à la spectrométrie de masse, sont particulièrement intéressants. Les mouches accumulent passivement de nombreux composés spécifiques des fruits sans les métaboliser. Cela signifie que D. suzukii n’est pas particulièrement adaptée à chaque fruit qu’elle consomme, elle semble au contraire tolérer une diversité de composés chimiques.
Cette tolérance pourrait conférer à D. suzukii une grande flexibilité, un atout majeur pour exploiter différents environnements. Les chercheurs estiment que cette capacité à utiliser divers fruits pourrait être primordiale pour la survie des populations durant l’hiver, en trouvant des fruits refuges.
L’étude publiée dans la revue eLife, qui combine biologie évolutive et écologie chimique permet de mieux comprendre les relations entre plantes et insectes. Elle pourrait contribuer au développement de nouvelles stratégies de gestion de ce ravageur, véritable fléau pour les producteurs de la filière cerises, en identifiant notamment les fruits refuges.
Référence :
Laure Olazcuaga, Raymonde Baltenweck, Nicolas Leménager, Alessandra Maia-Grondard, Patricia Claudel, Philippe Hugueney, Julien Foucaud (2023) Metabolic consequences of various fruit-based diets in a generalist insect species eLife 12:e84370. https://doi.org/10.7554/eLife.84370