Agroécologie 6 min

Cohabiter avec des bovins dans un système herbager : les ovins ont beaucoup à y gagner !

L’association de bovins et d’ovins dans un système d’élevage allaitant herbager permet d’augmenter le niveau de production global tout en réduisant le niveau d’utilisation des intrants (concentrés, antiparasitaires) pour les ovins. Pour ces derniers, elle permet aussi d’accroître les performances économiques et environnementales et de diminuer le niveau de compétition entre animaux et humains pour les ressources alimentaires.

Publié le 06 juillet 2023

illustration Cohabiter avec des bovins dans un système herbager  : les ovins ont beaucoup  à y gagner !
© INRAE

Favoriser la biodiversité au sein des agroécosystèmes est un principe mis en avant par l’agroécologie. L'association de plusieurs espèces animales en est une des déclinaisons, testée ici pour accroître la multi-performance globale du système d’élevage. Pour cette étude, les scientifiques de l’UMRH et de l’UE Herbipôle ont associé des ovins à des bovins (40-60% des unités de gros bétail (UGB) respectivement) dans un système d’élevage allaitant herbager mixte (MIX) et ont comparé ses performances à celles d'un système spécialisé bovin (BOV) ou d'un système spécialisé ovin (OV). Les trois systèmes étaient conduits en agriculture biologique, avec un chargement identique, des surfaces et des animaux initialement similaires. L'expérience a été menée pendant quatre campagnes (2017-2020) en zone de moyenne montagne. Les surfaces étaient exclusivement constituées de prairies permanentes. Les mises-bas ont eu lieu à la fin de l’hiver. Les veaux ont ainsi été élevés au pâturage à partir de l'âge de 3 mois jusqu'au sevrage en octobre, puis engraissés en bâtiments avec de l'enrubannage, jusqu’à l’abattage à l’âge de 12-15 mois. Les agneaux ont été élevés au pâturage dès l'âge d’1 mois ; ceux qui n’étaient pas prêts pour l’abattage à la fin de la saison de pâturage ont été finis en bergerie avec une ration à base de concentré. La décision de complémenter les femelles adultes avec du concentré était basée sur l’obtention d’une note d’état corporel cible à des périodes clés du cycle de reproduction. La décision de traiter les animaux contre les parasites était basée sur un seuil de niveau d’excrétion fécale d’œufs de parasites. Au-delà de l’association des deux espèces animales (en pâturage mixte ou séquentiel selon le différentiel de niveau de besoins nutritionnels entre les 2 espèces), la gestion intégrée du parasitisme a reposé sur le pâturage des repousses après fauche par les agneaux en finition et l’attention donnée à l’état corporel des mères en fin de gestation pour favoriser le poids des jeunes à la naissance et la quantité de lait ingérée.

Les scientifiques ont comparé différentes performances des systèmes d’élevage : zootechniques, économiques (produit brut, charges, marges, revenus), environnementales (émissions de gaz à effet de serre (GES), consommation d'énergie, niveau de compétition entre animaux et humains pour l’accès aux ressources alimentaires (feed-food competition).

L'association des deux espèces a bénéficié à l’atelier ovin, avec plus de viande produite par UGB ovine (+17.1%) et une proportion plus élevée d’agneaux finis à l’herbe dans le système MIX que dans le système OV, grâce à une vitesse de croissance des agneaux plus élevée. La productivité des brebis a été plus élevée dans le système MIX que dans le système OV. La consommation de concentrés par les ovins a été plus faible dans le système MIX que dans le système OV (-17,8% de concentrés utilisés par UGB), de même que le nombre de traitements anthelminthiques. L’association d’ovins et de bovins a donc amélioré l’efficience de l’atelier ovin. Elle a également permis de meilleures performances des femelles adultes (poids et état corporel à des périodes clés du cycle de reproduction) et un meilleur développement des femelles de renouvellement, éléments importants pour la résilience des animaux et du système. Les performances économiques et environnementales ont été plus élevées dans le système MIX que dans le système OV (+10,0% et +47,5% de marge brute et de revenu par UGB, malgré des coûts de clôtures supérieurs ; - 10,9 % d’émissions de GES et -15,7 % de consommation d'énergie). La compétition feed-food a été réduite de 47,2 %. Ces résultats sont expliqués à la fois par l'amélioration des performances des animaux et par la réduction de l’utilisation des intrants.

Dans l’atelier bovin, il n’y a pas eu d’effet de la mixité sur la productivité des vaches, les performances des veaux, les caractéristiques des carcasses et viandes et le niveau des intrants utilisés. Cependant, le gain de poids des vaches pendant la saison de pâturage a été plus élevé dans le système MIX que dans le système BOV. Il n'y a eu d’effet de la mixité ni sur la quantité de viande produite par UGB, ni sur les performances économiques et environnementales de l’atelier bovin. Malgré de bonnes performances animales et de bonnes propriétés nutritionnelles et sensorielles de la viande, l’atelier bovin a enregistré des performances économiques médiocres, en raison de difficultés pour vendre les jeunes bovins, dont le poids de carcasse était jugé insuffisant par les acteurs du marché.

Dans un système d'élevage allaitant basé sur l'utilisation de prairies permanentes, cette étude pluriannuelle à l’échelle du système d’élevage a montré que l'association de bovins et d'ovins dans une proportion de 60-40% d'UGB, respectivement, présentait des avantages pour l’atelier ovin en termes de performances zootechniques, économiques, environnementales (émissions de GES et de consommation d'énergie) et de compétition feed-food.

L’analyse des résultats se poursuit, notamment sur la qualité de la viande d’agneau et sur l’évolution de la composition floristique des prairies. Ce système a été mis en place dans une ferme expérimentale située à une altitude ne permettant pas le pâturage hivernal. Or, on peut penser que les avantages de l’association de bovins et d’ovins allaitant pourraient être amplifiés en plaine où les ovins peuvent pâturer pendant l'hiver (contrairement aux bovins).

 

Sylvie Andrérédaction

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Sophie Prache Contact scientifiqueUMR Herbivores

Marc Benoit Contact scientifiqueUMR Herbivores

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