Biodiversité 10 min

Biodiversité et durabilité des agricultures

Nombreux sont les travaux scientifiques qui tirent la sonnette d’alarme à propos du déclin de la biodiversité. Parce qu’un tiers de la surface terrestre est dévolu à des usages agricoles, l’articulation de l’agriculture et de la biodiversité demeure une préoccupation majeure. Le colloque du 11 avril 2019 a permis d’explorer la prise en compte de la biodiversité par le secteur de l’agriculture et d’illustrer les avancées réalisées tout autant que le chemin qu’il reste à parcourir.

Publié le 22 mai 2019

illustration Biodiversité et durabilité des agricultures
© INRAE

2008, sur fond d’érosion de la biodiversité qu’il convenait de stopper, l’expertise scientifique collective, réalisée par l’Inra, dressait le bilan des connaissances relatives aux impacts de l'agriculture sur la biodiversité et aux services que cette dernière peut rendre à l’agriculture. Explorant les pistes pour mieux l’intégrer dans les pratiques agricoles, elle faisait également le point sur les outils de l'action publique.
Une décennie plus tard, les enjeux de biodiversité (alimentaires, environnementaux, économiques…) sont de mieux en mieux pris en compte dans la production agricole tandis qu’ils soulignent la dépendance des systèmes alimentaires au vivant. Il s’agit plus que jamais de remettre la biodiversité au cœur de la résilience des systèmes agricoles tout en accompagnant les acteurs du monde agricole dans ces évolutions.

Agriculture et biodiversité, des idées et des réflexions qui évoluent

Aujourd’hui, l’impact de l’agriculture sur la biodiversité n’est plus à démontrer. C’est la valeur de la biodiversité comme facteur de production pour les systèmes agricoles qui est devenue le point d’attention. « À l’échelle individuelle, les politiques volontaristes ne suffisent plus », constate Xavier Reboud, directeur de recherche Inra et directeur scientifique adjoint Environnement de l’Inra. Alors que la réglementation et les aides intègrent de mieux en mieux ces questions, il convient d’élargir les échelles d’action, de la parcelle au territoire, tout en synchronisant les acteurs pour que les mesures soient efficaces. Parmi ces acteurs, le consommateur, au travers de ses choix, joue un rôle essentiel.

Agroécosystèmes et biodiversité en pratique

Depuis 10 ans, la reconnaissance de la biodiversité et de ses rôles en agriculture n’a cessé de croître tandis que les connaissances scientifiques progressaient, explique Sandrine Petit-Michaut, directrice de recherche Inra et directrice adjointe de l’unité de recherche Agroécologie.
La caractérisation de la biodiversité, grâce aux outils de la biologie moléculaire notamment, des interactions entre les êtres vivants et de leurs fonctions s’est perfectionnée. Le sol est aujourd’hui, plus que jamais, considéré comme un environnement vivant que le mode de gestion et les pratiques culturales affectent.
Au sein des agroécosystèmes, de la plante au paysage, le pilotage de la biodiversité vise désormais à exploiter l’éventail des conditions et de ressources disponibles et à tirer profit de la complémentarité de leurs caractéristiques. Parmi les travaux de l’Inra, les exemples sont nombreux, qu’il s’agisse d’associer légumineuses et céréales pour mieux gérer les adventices, d’utiliser des mélanges de cultures intercalaires multiservices, de diversifier les couverts pour promouvoir le biocontrôle, de préserver les bordures pour maintenir des organismes auxiliaires ou encore d’implanter des bandes fleuries pour réduire les dégâts de ravageurs…
Au travers de modèles de conception et d’évaluation, des principes de pilotage de la biodiversité sont désormais disponibles. Des systèmes agroécologiques innovants, basés sur la biodiversité, sont également mis en œuvre : dans la plaine de Dijon, la plate-forme collaborative de recherche et d’expérimentation de l’Inra, CA-SYS, teste une diversité de systèmes agroécologies en semis direct ou avec travail limité du sol ; dans la vallée du Rhône, le dispositif expérimental Inra du verger de Gotheron joue avec l’organisation spatiale d’espèces et variétés fruitières afin de réduire l’usage des pesticides en production arboricole.
Et demain ?  De la protection de la nature à la gestion de la biodiversité, le changement de paradigme qui entoure la notion de biodiversité doit continuer d’irriguer les pratiques agricoles en ne négligeant pas le fait que la « révolution culturelle » qui est en marche nous réserve peut-être encore des surprises au vu de la complexité des systèmes mobilisés, des services qui nous seraient encore inconnus, des règles différentes qui régissent chacun des volets des agroécosystèmes… Dans ce contexte où les défis à relever sont nombreux, la mobilisation collective et organisée de tous sera essentielle pour produire des connaissances, concevoir des innovations et accompagner le changement sur fond de choix sociétal et de politiques publiques.

Catherine Foucaud-ScheunemannRédactrice

Contacts

Xavier Reboud UMR Agroécologie (Inra,AgroSup Dijon, Univ. Bourgogne, CNRS)

Sandrine Petit-Michaut UMR Agroécologie (Inra, AgroSup Dijon, Univ. Bourgogne, CNRS)

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