Agroécologie 2 min

Le travail du sol impacte peu le stockage de carbone

La réduction, voire la suppression du travail du sol est l’une des pratiques agricoles souvent mise en avant pour accroître le stockage de carbone dans les sols. Une étude menée par INRAE et Arvalis-Institut du Végétal vient contredire ce paradigme. Fruit d’une expérimentation rigoureuse conduite en Ile-de-France, cette étude montre que le stockage de carbone a été similaire pour trois modes du travail du sol au bout de 41 ans mais qu’il a varié au cours du temps en interaction avec les conditions climatiques.

Publié le 24 octobre 2014

illustration Le travail du sol impacte peu le stockage de carbone
© INRAE

Dans le contexte du changement climatique et de l’augmentation des émissions de CO2 liée à l'activité humaine, le travail du sol serait un paramètre clé pour le stockage de carbone dans les sols cultivés. De nombreuses études affirment que la simplification du travail du sol voire la suppression du labour permet d’augmenter ce stockage. Cette recommandation, soutenue par le Groupement d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC)1, est issue de nombreux résultats obtenus surtout en Amérique du Nord. Cependant des analyses récentes de la littérature scientifique2ont souligné les faiblesses méthodologiques de nombreux travaux, remettant en cause l’importance du travail du sol sur le stockage possible de carbone. Des chercheurs d'INRAE ont analysé les résultats d’expérimentations conduites en France par Arvalis-Institut du Végétal depuis 20 à 41 ans à Boigneville (Ile-de-France) avec une approche originale incluant le calcul des stocks sur une grande profondeur (0-60 cm) et le suivi dans le temps du stock de carbone.

Le stockage de carbone fluctue mais n'est pas modifié sur le long terme dans nos climats

L'analyse a montré que les stocks de carbone du sol pour trois modalités de travail du sol (labour annuel, travail superficiel et semis direct) étaient identiques après 41 ans de ces pratiques en continu. Le travail superficiel a bien augmenté le stock de carbone en surface (0-10 cm) mais l’a diminué d’autant en profondeur (10-30 cm).

En analysant l’évolution des stocks au cours du temps, les chercheurs montrent que la réduction du travail du sol entraîne des phases de stockage ou de déstockage de carbone qui sont dépendantes des conditions climatiques. Les années sèches favorisent le stockage de carbone en travail superficiel, alors que les années humides entraînent un déstockage de carbone par rapport au sol labouré.

Le rythme de stockage n’est donc pas constant mais positif ou négatif, et l’effet à long terme du mode de travail du sol dépend des conditions climatiques, notamment de la pluviométrie. La réduction du travail du sol peut avoir des conséquences sur d’autres services écosystémiques  que celui de la régulation du climat mais ne semble pas efficace pour stocker du carbone en climat tempéré humide.

1 IPCC (2006) Guidelines for National Greenhouse Gas Inventories.

2 Références :

  • Angers D.A., Eriksen-Hamel N.S. (2008) Full-inversion tillage and organic carbon distribution in soil profiles: a meta-analysis. Soil Sci. Soc. Am. J. 72: 1370-1374.
  • Luo Z., Wang E., Sun O.J. (2010)Can no-tillage stimulate carbon sequestration in agricultural soils? A meta-analysis of paired experiments. Agric. Ecosyst. Environ. 139: 224-231.
  • Virto I., Barré P., Burlot A., Chenu C., 2012.Carbon input differences as the main factor explaining the variability in soil organic C storage in no-tilled compared to inversion tilled agrosystems. Biogeochemistry 108: 17-26.

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