Alimentation, santé globale 2 min

Rongeurs et pathogènes : un monde d’interactions

Le projet européen BiodivERsA-BioRodDis, piloté par INRAE, porte sur liens biodiversité-santé, et en particulier à l’influence de la biodiversité sur la dynamique des pathogènes, en forêt et dans les parcs urbains. Les scientifiques s’intéressent en particulier aux rongeurs, susceptibles de véhiculer une importante variété d’agents pathogènes à l'origine de maladies chez l'Homme.

Publié le 30 juin 2020

illustration Rongeurs et pathogènes : un monde d’interactions
© AdobeStock

Les petits rongeurs qui peuplent les forêts et les parcs urbains sont susceptibles de véhiculer une importante variété d’agents pathogènes (bactéries responsables de la maladie de Lyme, de leptospiroses...), sans présenter de symptômes chez les rongeurs mais être à l’origine de maladies chez l’Homme. Ils sont notamment porteurs sains d’hantavirus, qui peuvent provoquer de graves maladies chez l’humain (maladies pulmonaires, fièvres hémorragiques…). La contamination s’effectue par les voies respiratoires, lors de l’inhalation de particules virales en suspension, provenant de la salive ou des fèces des rongeurs. Les cabanes de chasseurs,où ces animaux se réfugient durant l’hiver, constituent ainsi un réel danger pour les chasseurs qui y pénètrent, plusieurs mois après les avoir fermées.

Liens entre biodiversité et santé

Plus la diversité d’hôtes est importante dans un milieu donné, et moins les risques de contamination par un pathogène sont importants

Dans le cadre du projet européen BiodivERsA-BioRodDis, piloté par INRAE, les scientifiques s’intéressent aux liens biodiversité-santé, et en particulier à l’influence de la biodiversité sur la dynamique des pathogènes, en forêt et dans les parcs urbains. De précédentes études se sont intéressées à l’existence d’un « effet dilution », qui prévoit que plus la diversité d’hôtes est importante dans un milieu donné, et moins les risques de contamination par un pathogène sont importants, celui-ci, en théorie, rencontrant moins facilement son hôte. Mais on sait désormais qu’un même hôte est fréquemment infecté massivement par plusieurs pathogènes à la fois. Les chercheurs souhaitent donc vérifier si l’on retrouve cet effet dilution, en observant l’ensemble des agents pathogènes qui circulent dans des populations de petits rongeurs. Ils vont également s’intéresser au microbiote intestinal qui peut conférer une certaine résistance ou tolérance aux pathogènes. Les nombreuses espèces de cette flore pourraient se transmettre entre rongeurs, notamment via les excrétas. Dans quelle mesure la diversité de cette flore est-elle partagée entre rongeurs ? Peut-elle protéger les animaux des infections et participer à réduire la circulation des pathogènes ? Les scientifiques utilisent aussi des modèles de prédiction du changement climatique, afin de mesurer son impact sur les niches écologiques des rongeurs et des pathogènes. A terme, l’ensemble de ces données permettra de mieux appréhender la nature des pathogènes qui circulent dans les forêts et parcs urbains et de transférer cette connaissance au public.

Combiner conservation de la biodiversité et limitation du risque infectieux

Le projet BiodivERsA-BioRodDis s’inscrit plus largement dans la démarche One Health de par sa forte dimension transdisciplinaire et sociologique. Il s’agit d’analyser dans quelle mesure les professionnels de santé et les personnes qui fréquentent ces lieux (professionnels de la forêt, des parcs, particuliers profitant de ces espaces pour usage récréatif...) connaissent les risques qui y sont associés. Ceci permettra de mettre en place des campagnes de prévention plus ciblées et plus efficaces. En conclusion, ce projet devrait participer à la définition et à la mise en place de stratégies « gagnant-gagnant », combinant conservation de la biodiversité et limitation du risque (danger et exposition) infectieux.


Voir la rubrique "One Health, une seule santé"

Philippe FontaineRédacteur

Contacts

Nathalie Charbonnel Centre de Biologie pour la Gestion des Populations

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