Biodiversité 4 min

Vers des résistances du tournesol au mildiou plus durables

Le mildiou est une maladie du tournesol qui peut conduire à une perte quasi-totale de rendement en cas d’attaques graves. Grâce à un long travail de valorisation des ressources génomiques naturelles et au développement de nouvelles technologies de génotypage, les équipes du Laboratoire Interactions-Plantes-Microorganismes (INRAE-CNRS) d’Occitanie-Toulouse, travaillent à mieux comprendre le mécanisme d'infection afin de renforcer l’immunité du tournesol au champ.

Publié le 10 décembre 2018

illustration Vers des résistances du tournesol au mildiou plus durables
© INRAE

Le mildiou du tournesol un parasite à forte pathogénicité        

Le mildiou du tournesol est causé par l’oomycète pathogène Plasmopara halstedii, parasite ressemblant à un champignon. La résistance du tournesol au mildiou est conférée par des gènes de résistance appelés Pl, dont 22 ont été identifiés et sont utilisés dans les variétés cultivées pour les protéger naturellement de cette maladie dévastatrice. Cependant, au cours des 50 dernières années, l’utilisation à grande échelle de quelques gènes Pl dans les variétés de tournesol a conduit à l'apparition de nouvelles souches (pathotypes) de mildiou plus virulentes et a rendu les résistances existantes inefficaces. Il est donc important d'identifier chez le tournesol un éventail de gènes de résistance aussi large que possible qui soient efficaces contre plusieurs pathotypes de mildiou, afin de les combiner ou de les alterner dans les variétés cultivées pour garantir leur efficacité et améliorer leur durabilité au champ.

Identifier et comprendre les facteurs de virulence*

 Entre le mildiou (agent pathogène) et le tournesol (plante hôte), s’instaure un dialogue moléculaire souvent qualifié de « course aux armements ». L’agent pathogène possède en effet des facteurs de virulence, appelés « effecteurs », que la plante « apprend » à reconnaitre et contre lesquels elle développe des résistances ciblées, par un mécanisme d’évolution adaptative. Lorsqu’un effecteur est ainsi « démasqué », il déclenche chez la plante une réaction de résistance contre le pathogène.

La première approche des travaux menés, est basée sur la recherche des facteurs de virulence du mildiou dont les séquences génomiques sont les plus conservées entre les différentes souches, et qui sont donc potentiellement essentiels à son développement chez le tournesol. Trente de ces facteurs de virulence conservés ont été caractérisés : plus de la moitié d’entre eux jouent véritablement un rôle dans la virulence puisqu’ils suppriment une immunité basale de la plante, le rôle de l’autre moitié n’est pas encore élucidé. La localisation de l’expression de ces 30 effecteurs a été réalisée dans les cellules de tournesol, dans laquelle ils ciblent différents compartiments cellulaires.

Ils ont ensuite été utilisés pour leur capacité à être reconnus chez des lignées de tournesol, en déclenchant des réactions de morts cellulaires localisées appelées réponses hypersensibles (HR) qui sont caractéristiques de la résistance de la plante à l’infection. Cinq effecteurs sur les 30 étudiés déclenchent des HR dans des lignées de tournesol portant des résistances à large spectre, dont certaines non encore publiées.

Pour l'un de ces effecteurs conservés du mildiou, nous avons pu identifier la région précise du génome du tournesol qui porte le gène de résistance du tournesol à cet effecteur et ainsi proposer un couple de gènes avirulence (facteur de virulence démasqué par la plante) / résistance encore jamais décrit chez le tournesol. La réponse spécifique à de tels effecteurs permet de différencier les résistances du tournesol entre elles, en particulier quand elles sont très proches sur le génome du tournesol. Cette approche simplifie et accélère la localisation génomique de nouvelles résistances au mildiou.

Dix nouveaux gènes de résistance cartographiés**         

La seconde approche est la caractérisation chez le tournesol de nouvelles sources de résistance au mildiou à large spectre, efficaces contre au moins 16 pathotypes de mildiou ayant des modes de virulence variés, et donc contre toute attaque de mildiou en Europe.

Ces résistances ont été découvertes chez des espèces sauvages de tournesol, ou chez des espèces d’Helianthus apparentées et ont été introduites par croisement dans des lignées de tournesol cultivées (Helianthus annuus). Les gènes responsables de ces résistances ont été cartographiés sur le génome de référence du tournesol, grâce à des  puces à ADN Axiom® de haute densité permettant de déterminer les variations génétiques entre les différents tournesols. Ainsi 10 nouveaux gènes de résistance ont été identifiés et différenciés en fonction de leur position sur le génome, de leur espèce d’origine, et de la réponse hypersensible à un effecteur de mildiou.

Cette première cartographie à grande échelle sur le génome du tournesol a permis de localiser dix gènes Pl publiés mais aussi d'identifier dix nouveaux gènes de résistance au mildiou à large spectre et donc potentiellement durables.

Optimiser l’immunité du tournesol

L’utilisation d’effecteurs conservés chez tous les pathotypes de mildiou de virulence variée et donc jouant probablement un rôle important pour l’agent pathogène, permet de découvrir des gènes de résistance du tournesol qui seront plus durables.

L’utilisation de ces résistances dans le cadre d’une agriculture raisonnée, en les combinant ou en les alternant au niveau des parcelles ou des années de culture devrait limiter l'impact du pathogène. A la clef, la construction de systèmes de culture et d’itinéraires techniques moins risqués pour les producteurs.

Ces travaux ont été menés par les équipes de recherche du laboratoire interactions-plantes-microorganismes (LIPM), notamment les équipes de génétique et génomique du tournesol et de bioinformatique, la plateforme génome et transcriptome (GET-Plage), la plateforme de génotypage et séquençage Gentyane et le laboratoire de Génétique Diversité Ecophysiologie des Céréales du centre Auvergne – Rhône-Alpes.

 

Contacts

Laurence GODIARD Contact scientifiqueLaboratoire des Interactions Plantes Micro organismes (LIPM)

Felicity VEAR Chargée de missionLaboratoire des Interactions Plantes Micro organismes (LIPM)

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