illustration Harry Sokol, explorateur du rôle du microbiote dans l’immunité, du patient à la cellule
© INRAE B. Nicolas

Alimentation, santé globale 4 min

Harry Sokol, explorateur du rôle du microbiote dans l’immunité, du patient à la cellule

Harry Sokol est gastroentérologue spécialisé dans les maladies inflammatoires de l’intestin. Passionné depuis toujours par la démarche scientifique, il est également chercheur sur le rôle du microbiote dans l’immunité. La qualité de ses travaux a été reconnue par le conseil européen de la recherche qui lui attribue en 2016 une bourse « Starting Grant ».

Publié le 31 octobre 2016

Un parcours marqué par des rencontres déterminantes

C’est au lycée, alors destiné à suivre un cursus HEC, qu’Harry Sokol a pris conscience de sa prédilection pour la biologie et le raisonnement scientifique. Il s’oriente alors vers des études de médecine dans le but de devenir chercheur en neurosciences. Au cours de ce parcours, il découvre son attachement à la relation avec le patient. L’importance que prend la dimension « soigner les malades » couplée à une passion pour les sujets de l’inflammation et de l’immunité l’amène alors vers la recherche en gastroentérologie. Le choix se confirme lorsque Philippe Marteau, alors un des pionniers des études sur le microbiote dans le milieu médical, le présente à Joël Doré (UMR Micalis Inra-AgroPArisTech), qui l’accueille en DEA. Sa vocation pour la recherche apparait dès lors comme une évidence. Aux côtés de Philippe Langella (UMR Micalis Inra-AgroParisTech), il explore les interactions entre le microbiote et son hôte et identifie, dès 2008, le rôle anti-inflammatoire de la bactérie commensale Faecalibacterium prausnitzii. Ce premier succès majeur constitue un tremplin vers de nouvelles aventures, qui le conduisent à Boston, au sein du laboratoire du professeur Ramnik Xavier (Harvard Medical School et Massachusetts General Hospital). Il y perfectionne sa pratique de laboratoire en immunologie et ses connaissances en biologie moléculaire, tout en s’imprégnant de tout ce que peut apporter un environnement d’une telle excellence en termes de méthode de travail et de raisonnement sur la conduite d’un projet scientifique :« J’y ai appris la science mais aussi une façon de travailler, de raisonner, de repérer les signaux qui montrent qu’il faut persévérer dans une direction, ou, au contraire, en choisir une autre ».

L’exploration du rôle du microbiote dans l’immunité, du patient à la cellule

De retour en France, depuis l’Hôpital Saint Antoine où il exerce comme professeur associé, Harry Sokol construit son projet de recherche sur le rôle du microbiote dans l’immunité. Le groupe qu’il dirige au sein de l’UMR Micalis à Jouy-en-Josas effectue des recherches fondamentales sur l’animal, alors que ses travaux en milieu hospitalier sont fondés sur l’analyse d’échantillons provenant de patients. La complémentarité entre recherche fondamentale et pratique hospitalière fait partie du quotidien du chercheur :« quand plusieurs patients évoquent les mêmes symptômes, le praticien s’interroge et le chercheur génère des hypothèses. Les questions de recherche sont ainsi directement connectées et alimentées par la perception de la maladie dans la vie réelle. En retour, la recherche amène à se questionner sur le rapprochement entre les observations faites sur l’animal et ce qu’il se passe chez l’Homme. Le contact avec les patients permet de vérifier les hypothèses, voire de lancer des essais cliniques ». En pratique, Harry Sokol dirige le premier essai clinique français de transplantation faecale chez des patients atteints de la maladie de Crohn, une initiative directement issue des travaux sur le microbiote, en collaboration avec Joël Doré et Philippe Langella.

En 2016, Harry Sokol a été sélectionné pour recevoir une bourse du Conseil européen de la recherche (ERC Starting Grant) dans le cadre de ses activités de recherche à la fois au sein de l’équipe Avenir de l’Inserm rattachée à l’Université Pierre et Marie Curie et de MICALIS. Ce soutien européen d’un montant de 1,5 millions d’euros sur cinq ans, est destiné à développer des recherches sur les interactions entre le microbiote et le métabolisme du tryptophane, un acide aminé essentiel précurseur de nombreuses molécules ayant des impacts très larges sur la santé, de l’inflammation intestinales aux troubles neuropsychiatriques.

Le rêve de pouvoir soigner les patients atteints de maladies inflammatoires de l’intestin

De par sa double vocation Harry Sokol aspire à faire le pont entre la recherche fondamentale sur le microbiote et le traitement des patients atteints de maladies inflammatoires de l’intestin, et en particulier de la maladie de Crohn. C’est là que se concentre le sens de ses travaux, qui, à terme, pourraient aboutir à l’utilisation de microorganismes de l’intestin ou de molécules qu’ils produisent pour corriger les altérations du microbiote chez les malades, ou, mieux encore, pour éviter le développement de la maladie grâce à une intervention ciblée dans les premières semaines ou premiers mois de la vie.  A l’horizon de cinq ou dix ans, ce rêve sera probablement devenu une réalité. Une innovation que le chercheur, qui a plus d’une corde à son arc, ne manquera pas d’accompagner afin de boucler la boucle du patient à la cellule, et du tube à essai au médicament.

 

Christine JezRédactrice

Contacts

Harry SokolUMR Microbiologie de l'alimentation au service de la santé (INRAE, AgroParisTech)

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