Des oursins fossilisés âgés de 30 millions d’années retrouvés sur le domaine du château Couhins !

Le bassin aquitain est constitué d’une succession de couches sédimentaires, qui reposent sur un socle ancien daté du Permo-Trias. L’essentiel de ce bassin est composé de strates du Tertiaire. L’Oligocène inférieur (- 33,9 à - 28,1 Ma, Gradstein et al., 2012) est bien représenté dans cette région. L’ossature de la région bordelaise est constituée de calcaire plus ou moins compact, à faciès marin typique, ayant été utilisé comme pierre de construction, particulièrement pour les demeures de Bordeaux, celles de Libourne ou encore de Saint-Émilion. Son importance structurale est géographiquement considérable, étant présent dans l’Entre-deux-Mers, le Libournais, le Saint-Émilionnais, le Bourgeais, mais aussi dans le Médoc. Au point de vue paléontologique, l’abondance des fossiles issus du calcaire de l’Oligocène inférieur (Rupélien) est très variable selon les niveaux et les sites visités. Certains d’entre eux, alternant calcaires et marnes, ont livré des restes fossiles diversifiés, comme des algues, des coraux, des mollusques, des échinodermes (étoiles de mer et oursins) tandis que d’autres, bioclastiques, c’est-à-dire ayant accumulé des débris d’organismes marins, présentent de nombreux restes de foraminifères, de mollusques de petite taille, mais aussi de vertébrés (dents et otolithes de poissons). En Gironde, les sites renfermant des Echinoidea fossiles sont nombreux. Plusieurs espèces de cette classe ont été découvertes, étudiées et décrites dans des terrains allant stratigraphiquement du Crétacé supérieur au Miocène moyen.

Le domaine du château Couhins sur la commune de Villenave- d’Ornon au Sud de Bordeaux, Grand Cru Classé de Graves, appellation Pessac-Léognan, est depuis le XVIIe siècle, une propriété viticole issue de la fusion du Domaine de la Gravette et du Domaine du Pont de Langon. Plusieurs propriétaires privés se succéderont, avant que le château soit acquis par l’INRA (aujourd’hui INRAE) en 1968. Des travaux de construction et de terrassements réalisés sur le domaine de Couhins entre les années 1981 et 2015 ont offert l’opportunité de révéler une faune d’oursins fossiles significative en nombre de spécimens et intéressante en terme taxinomique.

Quarante-sept spécimens d’échinides fossilisés mis au jour entre les années 1970 et 2015 ont fait l’objet d’une étude minutieuse par une équipe de scientifiques de l’association paléontologique du bassin aquitain. L’examen de cette échinofaune montre que 79 % d’entre elle prospérait dans des sédiments assez grossiers, en milieu marin aéré, plutôt littoral. En effet, il y a environ 30 millions d’années, Couhins était recouvert par une mer chaude. Le recensement des échinides découverts sur le domaine montre aussi l’existence de quatre espèces différentes réparties en quatre genres. Deux de ces espèces apparaissent comme fréquentes à Couhins (Echinolampas subsimilis et Eupatagus ornatus), tandis que les deux autres sont bien plus discrètes (Parmulechinus agassizi et Agassizia souverbiei). L’échinofaune de Couhins est inédite et décrite ici pour la première fois. Elle vient d’une part, compléter la longue liste des sites renfermant des échinides de l’Oligocène inférieur en Gironde et d’autre part, confirmer les principales observations des échinologistes du XXe siècle, notamment sur les associations de populations d’oursins du Rupélien.

Références :
Journal ATURIA – N°104 – juillet à septembre 2023