Alimentation, santé globale 4 min

Optimiser les effets santé de la tomate

Que ce soit sous forme fraîche ou transformée, la tomate est reconnue pour ses effets bénéfiques sur la santé. Encore faut-il mieux caractériser ces effets pour les optimiser. Dans ce but, des équipes d’INRAE et leurs partenaires conduisent des programmes pluridisciplinaires. Parmi les facteurs étudiés : le choix des variétés, les conditions de culture et les procédés de transformation.

Publié le 11 juillet 2022

illustration Optimiser les effets santé de la tomate
© INRAE

 

850 000 tonnes de tomate consommées en France par an, 600 000 produites

Légume le plus consommé en France, la tomate recèle bien des vertus pour notre santé. Faiblement énergétique, riche en fibres, elle contient aussi des caroténoïdes, principalement du lycopène, dont les effets anti-oxydants et anti-inflammatoires sont connus depuis une vingtaine d’années. Elle apporte aussi des minéraux et des vitamines. Mais ces bienfaits pour la santé dépendent de nombreux facteurs. En premier lieu, ils sont liés à la concentration de ces composés bénéfiques, qui dépend elle-même, entre autres, des variétés de tomate et des conditions de culture. Ensuite, les effets de ces composés dépendent de la manière dont l’organisme les assimile, autrement dit de leur bioaccessibilité et leur biodisponibilité 1. Ces dernières propriétés sont influencées, entre autres, par les procédés de transformation de la tomate.

Ce sont tous ces facteurs qui sont analysés à INRAE dans un continuum d’étude production/qualité/santé, donnant lieu à des programmes pluridisciplinaires d’envergure 2.

Apports santé de la tomate
  • Environ 90 à 95 % d’eau selon la variété
  • 2 g de fibres pour 100 g
  • 2,4 g de glucides pour 100 g
  • Riche en caroténoïdes, dont 80 % de lycopène : 50 à 100 mg par kg de tomate fraiche, selon la variété
  • Source de vitamines D, C, E, précurseurs de vitamine A
  • Riches en minéraux (potassium, magnésium)

POURQUOI EST-IL IMPORTANT DE FAIRE LE PLEIN DE VITAMINES, MINERAUX ET AUTRES MICRONUTRIMENTS ?

 A la plancha, en salade, à la poêle : dans cet épisode, Laure et Charlotte cuisinent les légumes afin qu’ils dévoilent les secrets de leurs bénéfices pour la santé. Cet épisode a été préparé avec Emmanuelle Reboul, directrice de recherche en santé et nutrition.

Le lycopène a des propriétés anti-oxydantes et anti-inflammatoires

Le lycopène, principal caroténoïde de la tomate, lui donne sa couleur rouge.

Le lycopène, pris isolément, possède des effets bénéfiques démontrés contre le stress oxydatif en fixant des formes réactives de l’oxygène. En lien avec ces propriétés anti-oxydantes, car empruntant des voies moléculaires en partie communes, le lycopène possède des effets anti-inflammatoires, corrélés chez l’homme à une diminution des risques cardiovasculaires, du syndrome métabolique 3 et de certains cancers. Les travaux de l’équipe de Jean-François Landrier ont contribué à cette caractérisation, en mettant en évidence des effets du lycopène dans des situations d’obésité. L’obésité s’accompagne de la production de molécules inflammatoires dans le tissu adipeux, le foie et les muscles. Ces molécules agissent sur les récepteurs cellulaires à l’insuline, entraînant une résistance à l’insuline et une augmentation de la glycémie 4, facteur de diabète. Chez des souris obèses recevant un aliment supplémenté en poudre de tomate, cette cascade d’évènements est atténuée par l’action anti-inflammatoire du lycopène. La même équipe d’INRAE a également démontré ces effets in vitro, sur des cultures d’adipocytes.

« Ces résultats encourageants chez la souris motivent la réalisation d’une étude clinique chez l’humain, qui devrait débuter en 2024 au Centre d’investigation clinique de la Conception à Marseille. Il s’agira d’observer l’effet de la poudre de tomate incorporée dans l’alimentation chez des personnes prédiabétiques, dans une optique de prévention », annonce Jean-François Landrier.

Différents facteurs modulent les effets santé de la tomate

Poudre et purée de tomate : des produits intéressants

18 kg/an/habitant de tomate consommée en France sous forme transformée, 15 kg/an/habitant sous forme fraîche

La poudre de tomate utilisée dans les études sur la souris ou l’humain représente une forme très intéressante de consommation de la tomate. Elle est pratique à utiliser et potentiellement disponible toute l’année. Elle est déjà abondamment employée en industrie, dans Ies soupes et de nombreuses préparations culinaire. « On sait que le lycopène est davantage biodisponible dans la purée de tomate que dans les tomates fraîches. C’est une molécule relativement stable. Dans le cadre de notre projet TomHealth 2, plusieurs équipes 5 travaillent à l’optimisation du procédé de fabrication de la poudre de tomate, en particulier le séchage, pour en conserver les qualités nutritionnelles », ajoute Jean-François Landrier. Un projet analogue, TomAbility 2, s’intéresse aux propriétés de la purée de tomate.

Voies de synthèse des caroténoïdes chez la tomate
Complexité des voies de synthèse des caroténoïdes (lycopène, -carotène et lutéine) chez la tomate.

Autre facteur à prendre en compte : les conditions de culture de la tomate, et en particulier l’effet du manque d'eau, qui devient de plus en plus prégnant dans le contexte du réchauffement climatique. « La tomate est une culture irriguée, que ce soit en plein champ pour les usages industriels, ou en serre/tunnel pour les tomates de bouche. Il est important de connaître l’influence du stress hydrique sur les effets santé de la tomate, ce qui peut permettre d’ajuster les pratiques d’irrigation », indique Nadia Bertin. Certaines études ont montré que ce stress pourrait favoriser la production de caroténoïdes. Cela semblerait d’ailleurs logique quand on sait qu’un des rôles physiologiques des caroténoïdes (voir encadré) est de protéger les cellules végétales contre le stress oxydatif, qui peut parfois accompagner le stress hydrique 6.

Stress hydrique : des effets complexes

Cependant, la situation est plus complexe. D’après Nadia Bertin, les différents travaux, dont ceux de son équipe, montrent que les effets du manque d'eau dépendent de son intensité, du stade auquel il survient dans le développement de la plante et, enfin, du génotype de la tomate testée. Il faut aussi prendre en compte le fait qu’en cas de stress hydrique, les tomates sont moins riches en eau, ce qui induit un effet de concentration des caroténoïdes, sans pour autant que leur synthèse n’ait augmenté.

« Nos travaux nous ont en tout cas permis d’identifier des génotypes de tomate plus riches en caroténoïdes, comme par exemple le cultivar H1311 développé par Heinz. C’est cependant un génotype moins productif en condition de stress. Comme souvent, il faut faire un compromis entre rendement, qualité et résistance au stress. C’est pourquoi il faut bien intégrer toutes ces composantes », conclut Nadia Bertin.

1. Bioaccessibilité : présence du composé dans l’organisme (tractus digestif). Biodisponibilité : présence du composé dans le sang, disponible pour les cellules.

2. Projet ANR TomHealth (2021-2024), coordonné par INRAE, basé sur la poudre de tomate https://c2vn.univ-amu.fr/projet-anr-tomhealth/, projet TomAbility (2019-2022), coordonné par le centre technique agroalimentaire CTCPA, basé sur la purée de tomate https://www6.paca.inrae.fr/sqpov/Projets-Partenariats/Projets/Projets-nationaux-institutionnels/Tomability-2019-2022 .

3. Le syndrome métabolique correspond à un ensemble de troubles liés à la présence d’un excès de graisse à l’intérieur du ventre.

4. La résistance des cellules à l’insuline induit un défaut de captation du glucose dans ces cellules, avec pour conséquence une augmentation de la concentration de glucose dans le sang (glycémie).

5. Equipes du laboratoire GEPEA de l’Oniris à Nantes, CTCPA, UMR Sécurité et qualité des produits d'origine végétale d’INRAE et la société Capsulae.

6. En cas de stress hydrique, la plante se défend en limitant ses pertes d’eau, par la fermeture des stomates, les pores présents à la surface des feuilles. Il s’ensuit une réduction ou un arrêt de la photosynthèse, car le gaz carbonique nécessaire ne peut plus pénétrer dans les cellules foliaires par les stomates. L’arrêt de la photosynthèse induit un stress oxydatif que les caroténoïdes contribuent à atténuer.

Polyvalence des caroténoïdes chez la tomate

Les caroténoïdes participent à un grand nombre de mécanismes physiologiques au sein de la plante, dont la croissance, le développement et la réponse aux facteurs environnementaux. En tant que pigments photosynthétiques, ils contribuent aux processus de photosynthèse. Les couleurs qu’ils confèrent aux fleurs et aux fruits (rouge pour le lycopène, orange pour le béta-carotène) participent aussi à l’attraction des pollinisateurs et des prédateurs.

 

Pascale MollierRédactrice

Contacts

Jean-François LandrierUMR1260 C2VN Center for CardioVascular and Nutrition research

Nadia BertinUR1115 PSH Unité de recherche Plantes et systèmes de culture horticoles

Le centre

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