Changement climatique et risques 3 min

Montée en altitude du risque avalanche avec le changement climatique

COMMUNIQUE DE PRESSE - Les zones de montagnes sont particulièrement touchées par le réchauffement climatique, mais les impacts sur les avalanches sont encore peu connus. Des chercheurs d’INRAE, de Météo France, du CNRS*, et des universités Grenoble Alpes, Genève et de Haute-Alsace ont étudié l’évolution de l’activité avalancheuse sur près de deux siècles et demi dans le Massif vosgien, en combinant analyse de sources historiques, modélisation statistique et climatologie. Leurs résultats, publiés le 25 octobre dans la revue PNAS, montrent une remontée en altitude des avalanches qui se produisent à présent essentiellement aux altitudes les plus élevées du massif. Cette remontée s’est traduite par une division par 7 du nombre d’avalanches, un raccourcissement de la saison des avalanches, et une réduction de leur taille par rapport à la fin du « Petit Age Glaciaire ». Ces résultats montrent également que les massifs de moyenne montagne peuvent servir de sentinelles des impacts du réchauffement climatique.

Publié le 26 octobre 2021

illustration Montée en altitude du risque avalanche avec le changement climatique
© Pixabay

* Les laboratoires CNRS impliqués sont le Centre national de recherches météorologiques (CNRS/Météo France) et le Laboratoire de géographie physique et environnemental (CNRS/Université de Limoges/Université Clermont-Auvergne).

 

Il est désormais bien établi que le changement climatique affecte tout particulièrement les zones de montagne. Les impacts sur la cryosphère (neige, glace, permafrost) sont très importants et bien décrits pour l’évolution des glaciers et l’enneigement. Cependant, les évolutions de l’activité avalancheuse en réponse au changement climatique restent encore peu connues, faute de séries d’observations d'avalanches de suffisamment longue durée et de techniques statistiques capables de rendre compte des nombreux biais inhérents aux rares séries existantes. Cela a notamment été récemment rappelé dans le rapport spécial du GIEC sur l’océan et la cryosphère[1], qui inclut un chapitre spécifiquement dédié aux zones de montagne. L’enjeu en matière de risque est crucial étant donné la dangerosité des avalanches pour les humains et les infrastructures (bâtiments, réseaux de transport et de communication, etc.). Pour y remédier, l’équipe de recherche a étudié l’évolution de l’activité avalancheuse entre la fin du XVIIIe siècle et 2014 dans le Massif vosgien. Les scientifiques ont utilisé une approche pluridisciplinaire innovante combinant analyse du corpus de sources historiques (archives écrites, documents iconographiques, témoignages, etc.), modélisation statistique et climatologie.

Réduction des avalanches et montée en altitude

Grâce à leurs travaux, l’équipe de recherche montre que l’augmentation de température de +1,5°C dans le Massif vosgien entre le milieu du XIXe et le début du XXe siècle (fin de ce que l’on dénomme le « Petit âge glaciaire ») a induit une réduction par sept du nombre moyen d'avalanches par hiver à l’échelle du massif. La taille moyenne des avalanches s’est significativement réduite – la dernière avalanche de taille exceptionnelle[2] a eu lieu en 1952 – ainsi que la durée de la saison durant laquelle les avalanches se produisent (réduction de 23 jours en moyenne). L’analyse de l’évolution de l’enneigement a montré que ces changements sont liés à une réduction nette, à la fin du « Petit âge glaciaire », de l’enneigement aux altitudes basses et moyennes du massif. En conséquence, les avalanches ont maintenant quasiment disparu de ces altitudes dans le Massif vosgien. Aujourd’hui, elles s’y produisent essentiellement aux altitudes les plus élevées (zones de déclenchement avec une altitude minimale de 1200 m environ), même si l’activité avalancheuse reste encore dans ce massif un risque potentiel. 

Cette étude suggère qu’à terme, dans de nombreux massifs montagneux, l’activité avalancheuse va progressivement être restreinte à des altitudes de plus en plus élevées et que ce mouvement s’accompagnera vraisemblablement par une réduction en moyenne de leur taille et de la durée de la saison durant laquelle elles se produisent à mesure que le réchauffement futur réduira l’enneigement. Plus largement, ces résultats montrent que les massifs de moyenne montagne peuvent servir de sentinelles des impacts du réchauffement climatique et aider ainsi à la conception de stratégies d'adaptation efficaces pour l’ensemble des territoires de montagne.

 

[1] Rapport GIEC « IPCC, 2019: IPCC Special Report on the Ocean and Cryosphere in a Changing Climate [H.-O. Pörtner, D.C. Roberts, V. Masson-Delmotte, P. Zhai, M. Tignor, E. Poloczanska, K. Mintenbeck, A. Alegría, M. Nicolai, A. Okem, J. Petzold, B. Rama, N.M. Weyer (eds.)]. In press. » https://www.ipcc.ch/srocc/.

[2] Taille 5 (maximale) sur une échelle à 5 niveaux, développée spécifiquement pour le Massif vosgien, qui correspond à des avalanches qui partent à proximité des crêtes sommitales et descendent jusque dans le fond de la vallée.

Référence

Florie Giacona, Nicolas Eckert, Christophe Corona, Robin Mainieri, Samuel Morin, Markus Stoffel, Brice Martin, Mohamed Naaim, Upslope migration of snow avalanches in a warming climate, PNAS, 2021 118 (44) e2107306118; https://doi.org/10.1073/pnas.2107306118

 

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Service de presse INRAE

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Florie Giacona Unité de recherche ETNA (Érosion torrentielle, neige et avalanches)

Nicolas Eckert Unité de recherche ETNA (Érosion torrentielle, neige et avalanches)

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