Alimentation, santé globale

Mise en évidence de modifications du microbiote intestinal lors de transitions vers les maladies cardiométaboliques

Le projet européen METACARDIS (Metagenomics in Cardiometabolic Diseases) coordonné par l'INSERM vise à étudier le rôle du microbiote intestinal dans le développement des maladies cardio-métaboliques, dont les maladies cardiovasculaires. Sébastien Fromentin, scientifique de MetaGenoPolis-INRAE, unité experte en recherche sur le microbiote humain et animal, publie avec les partenaires du projet, dans "Nature medecine", une étude sur une cohorte de 1250 personnes permettant de comprendre le lien entre microbiote intestinal et cardiopathie ischémique.

Publié le 11 avril 2022

illustration Mise en évidence de modifications du microbiote intestinal lors de transitions vers les maladies cardiométaboliques
© MICA unité MGP

Les maladies cardiovasculaires, notamment la cardiopathie ischémique, sont une cause majeure de décès en France et dans le Monde. En 2015, au début du projet, on estimait à 17.7M le nombre de personnes mourant, par an, pour des raisons liées aux maladies cardiovasculaires, soit environ 1/3 de la mortalité totale. Plusieurs facteurs jouent un rôle dans l’apparition de ces maladies : la génétique, l’âge, le genre, une mauvaise alimentation ou le manque d’activité physique.

Une étude transversale à grande échelle pour mieux comprendre le lien entre microbiote intestinal et les maladies cardiovasculaires

La recherche sur le microbiote intestinal et les maladies cardiovasculaires nécessite de mieux prendre en compte l’effet des comorbidités et des traitements.

En effet, de nombreuses études se sont intéressées au rôle du microbiote intestinal dans les maladies cardiovasculaires sans prendre en compte de manière rigoureuse les nombreux facteurs confondants de ces maladies, par exemple les comorbidités et la prise de médicaments à long terme.

C’est pourquoi un élan de recherche Européen s’est créé avec la France, l’Angleterre, l’Allemagne, le Danemark et la Suède pour former le consortium Metacardis.  L’objectif du projet Metacardis est d’investiguer l'impact des modifications du microbiote intestinal dans le développement des maladies cardiovasculaires en prenant compte de l’effet des comorbidités et traitements associés. Ce consortium a permis une caractérisation phénotypique approfondie sur 2000 individus danois, allemands et français : notamment la composition bactérienne intestinale (par identification via des études métagenomiques de type shotgun), les profils métaboliques au niveau du sérum et de l’urine, les habitudes alimentaires ainsi que les marqueurs anthropométriques, les marqueurs inflammatoires et la prise de médicament.

Cette approche innovante n’avait été jamais faite avec ce nombre d’individus et ce niveau de caractérisation.

Dans une grande étude portant sur 1250 sujets issus de la cohorte Metacardis, les chercheurs ont pu mettre en évidence une modification importante du microbiote intestinal et des métabolites lors de la phase de progression vers la cardiopathie ischémique en prenant en compte les traitements médicamenteux et le statut métabolique. Les résultats sont publiés dans le journal Nature Medecine en février 2022.

Les analyses du microbiote intestinal ont pu ainsi être réalisées sur 4 groupes d’individus de la cohorte Metacardis :

- 372 patients souffrant de cardiopathie ischémique à trois stades différents (syndrome coronarien aigu, chronique et avec insuffisance cardiaque),
- 275 individus témoins sains,
- 222 individus présentant des comorbidités dysmétaboliques telles que le diabète de type 2 (T2D) et l'obésité n'étant pas sous l'influence de traitement médicamenteux,
- 372 individus présentant des comorbidités dysmétaboliques telles que le diabète de type 2 (T2D) et l'obésité.

Quelles sont les modifications du microbiote intestinal observées lors de la cardiopathie ischémique ?

  • Dans cette étude, nous avons constaté, au cours de la phase de progression vers la cardiopathie ischémique :
    • Une diminution de la diversité bactérienne,
    • Une modification d'espèces bactériennes présentes et de la production d'acides gras à chaîne courte (AGCC),
    • Une diminution de métabolites protecteurs chez les patients, tel que l’alpha tocophérol, une augmentation de métabolites dérivés de certains acides aminés (du tryptophane et de la phénylalanine). 
  • L’apparition de la maladie s’accompagne de perturbations telles qu’un enrichissement des intermédiaires du triméthylamine (TMA) précurseur du N-oxyde de triméthylamine (TMAO) connu pour moduler le risque de cardiopathie ischémique ;  ainsi que du 4-cresol, produit bactérien de la fermentation colique de la phénylalanine et de la tyrosine et un précurseur de la toxine urémique 4-crésylsulfate.
  • L’aggravation de la maladie, d’un syndrome aigu vers un syndrome chronique jusqu’à une insuffisance cardiaque, s’accompagne de nombreuses altérations métaboliques comme le métabolisme de certains acides aminés (la phénylalanine et de la tyrosine) mais aussi d’une augmentation du potentiel microbien de production des acides aminés à chaîne ramifiée (BCAA).

Quelles sont les retombées de cette étude ?

Cette étude permet de mieux comprendre l'étiologie de la cardiopathie ischémique et d'identifier de nombreuses cibles potentielles de prévention microbiennes et métaboliques, que ce soit lors des phases précédant l’apparition des événements cardiaques mais aussi au cours de l’aggravation de la maladie.

Cette découverte ouvre la voie au développement de nouvelles thérapies pour les maladies cardiovasculaires.

Sébastin Fromentin, scientifique microbiote, reprend dans cette vidéo les différents résultats de l'étude : Microbiome and metabolome features of the cardiometabolic disease spectrum, parue dans le journal Nature Medecine, en février 2022.

Video réalisée par MetaGenoPolis : Unité de recherche d'excellence sur le microbiote humain et animal

METACARDIS PROJECT :

  • MetaCardis:  EU-funded investigation into effects of gut microbiota in cardiometabolic diseases
  • Coordinated byINSTITUT NATIONAL DE LA SANTE ET DE LA RECHERCHE MEDICALE
  • Scientific coordinator: Karine Clément, INSERM
  • Budget : EU contribution 11 999 992 € ; Total cost : 20 387 421  €
  • Partners : 14 partners, 6 countries

 

Laurent MarchéResponsable communication département MICA

Véronique MarracciResponsable communication centre INRAE Jouy-en-Josas

anne-sophie AlvarezResponsable communication unité MetaGenoPolis

CONTACT SCIENTIFIQUE

Sébastien Fromentin Ingénieur de recherche - Scientifique MicrobioteMetaGenoPolis

Le centre

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