Société et territoires 3 min
Ménages confrontés aux coupures d’eau : une étude inédite
INRAE publie une analyse sur les difficultés d’accès à l’eau des ménages ayant subi des coupures d’eau. Sa particularité : aborder la problématique du point de vue du vécu des ménages, en se basant sur leurs témoignages.
Publié le 26 juin 2018
La réglementation française garantit le droit à l’eau
Le principe de « droit humain fondamental » attribué à l’eau est reconnu par l’Organisation des Nations Unies depuis 2010. Promulguée en avril 2013 en application de la reconnaissance en 2006 du droit à l’eau en France, la loi Brottes donne la possibilité aux collectivités territoriales ou à leurs groupements de mettre en place des outils pour favoriser l'accès à la ressource en eau. Expérimentée par une cinquantaine de collectivités, celles-ci peuvent définir des tarifs sociaux tenant compte de la composition ou des revenus du foyer, prévoir un soutien financier au paiement des factures d'eau, et ainsi, identifier les solutions les plus adaptées aux différentes situations de précarité des ménages.
En France, les conditions d’applicabilité du droit à l’eau - introduit dans la réglementation par la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2006 - sont expérimentées par une cinquantaine de collectivités dans le cadre fixé par la loi Brottes de 2013.
En parallèle de l’évolution du cadre légal, et notamment de la validation en 2015 par le Conseil Constitutionnel de l’interdiction de couper l’eau aux ménages en situation de factures impayées (loi Brottes), des mouvements de défense du droit à l’eau portés par le milieu associatif se sont mis en place. C’est ainsi que la plateforme d’appel à témoignages « Coupure d’eau : que faire ? » a vu le jour en 2014. Créée par la Coordination Eau Ile de France (CEIDF) et la Fondation France Liberté (FFL) , associations de défense du droit à l’eau, cette plateforme a recueilli, de début 2014 à début 2017, le témoignage d’un millier et demi de ménages ayant subi une coupure d’eau et en quête d’une solution.
Une étude qui contribue à éclairer le débat sur le droit à l’eau
À partir de cette source d’informations inédite, Marie Tsanga, une chercheuse en sciences sociales qui travaille depuis plusieurs années sur l’accès à l’eau des publics précaires et vulnérables, a mené une étude quantitative et qualitative sur les difficultés d’accès à l’eau des ménages en situation de factures impayées et sur leurs modalités de prise en charge par les distributeurs d’eau.
L’analyse des informations recueillies a permis de dégager des enseignements sur les motifs d’impayés des ménages ayant abouti à une coupure ou à une menace de coupure, les profils socio-économiques des ménages et leur composition familiale, la durée de la coupure, les modalités de prise en charge de l’impayé par les distributeurs, le vécu des coupures par les ménages, et leur ressenti de la prise en charge de leur situation d’impayé. Cette analyse apporte de nouveaux éléments de connaissance des situations d’impayé des ménages pauvres et fournit un éclairage à même d’alimenter un retour réflexif sur la prise en charge par les services, de cette catégorie de ménages vulnérables.
Autant d’informations qui peuvent éclairer un certain nombre de questions comme : comment les services publics d’eau font face à cet enjeu de société ? Ou encore : quelle est la nature des difficultés d’accès à l’eau auxquelles sont confrontés ces ménages, qui sont bénéficiaires du droit à l’eau, mais également usagers d’eau censés régler leur facture ou leurs charges locatives de consommation d’eau ? Les résultats de l’étude devraient ainsi alimenter le débat actuel et non clos du droit à l’eau, notamment au regard de la prise en charge des ménages en situation de précarité, et favoriser la mise en œuvre de solutions adaptées.