Agroécologie 2 min

Irrigation : un outil pour évaluer et encourager les économies d’eau

À Montpellier, les experts des techniques d’irrigation agricole ont établi le premier référentiel comparant les économies d’eau réalisables selon les dispositifs d’irrigation utilisés. Un outil conçu à la demande du Ministère de l’Agriculture qui fait dorénavant référence pour l’instruction des dossiers de subventions relatifs à cette pratique.

Publié le 01 février 2018

illustration Irrigation : un outil pour évaluer et encourager les économies d’eau
© INRAE, WEBER Jean

En France, l’irrigation est une pratique incontournable pour certaines cultures et certaines régions. Face aux pressions qui pèsent sur la ressource en eau, en particulier dans le secteur agricole, des solutions sont mises en œuvre pour l’économiser et mieux la gérer. Un règlement européen dédié au soutien du développement rural1prévoit ainsi que les agriculteurs qui recourent à l’irrigation – soit 15 % des exploitations agricoles en France2 – puissent bénéficier d’une aide financière lorsqu’ils changent de matériel d’irrigation. À une condition : obtenir une économie d’eau de 5 à 25 %, sans baisse de rendement des cultures. Lors du montage du dossier de subventions, les agriculteurs doivent donc annoncer la valeur de l’économie d’eau attendue.

Enrouleur d'irrigation

Mais comment la connaître « a priori » ? C’est là la mission qu’a confiée le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation à Irstea3: mettre au point un outil simple et fiable pour évaluer - au préalable - l’économie d’eau potentiellement réalisable par le changement de dispositif d’irrigation. « Jusqu’à présent, les agriculteurs, les conseillers en irrigation ou les instructeurs des dossiers de subventions utilisaient des valeurs communément admises, issues de dires d’experts. Des valeurs génériques qui ne tenaient pas compte des conditions spécifiques d’irrigation, comme le type de cultures et de sols, le climat ou l’état du matériel en place sur la parcelle », explique Claire Serra-Wittling, ingénieure de recherche au sein de l’unité G-Eau de Montpellier, en charge du projet.

Des données représentatives des contextes agro-climatiques et des systèmes d’irrigation

Culture d'oignons en gouttes à gouttes

Spécialisés dans l’optimisation des techniques d’irrigation, les scientifiques d’Irstea ont rassemblé les résultats d’expérimentations et de suivis de pratiques d’agriculteurs comparant les économies d’eau; menés sur l’ensemble du territoire par divers organismes (chambres d’agriculture et instituts techniques, stations expérimentales, coopératives agricoles, aménageurs du territoire). Ce sont plus de 30 références qui ont ainsi été collectées puis analysées. « Cette base de données offre une bonne représentativité des régions françaises concernées par l’irrigation. Par ailleurs, excepté l’irrigation gravitaire4, elle réunit tous les systèmes utilisés en France métropolitaine, que ce soit pour les grandes cultures (maïs notamment), en arboriculture ou en maraîchage », précise l’ingénieure. Outre comparer les quantités d’eau utilisées entre un matériel ancien ou neuf, et entre différents systèmes d’irrigation, ce travail a permis d’étudier l’impact d’une irrigation menée sans ou avec outils de pilotage (tensiomètres, sondes d’humidité de sol, dendromètres, cartographies des sols…).

Des référentiels fiables désormais disponibles

À partir de l’analyse de ces données, les scientifiques ont élaboré des référentiels fournissant les valeurs d’économies d’eau réalisables selon les systèmes d’irrigation (un mode d’emploi permet de les adapter aux spécificités agro-pedo-climatiques locales). Destinés à être intégrés dans un logiciel facile d’utilisation, ces résultats font désormais référence pour l’instruction des dossiers de demandes de subventions réalisée par les Conseils régionaux et les Directions Départementales des Territoires.

Au-delà, en analysant l’efficacité de l’irrigation de différents systèmes à l’aide du logiciel Optirrig (outil d'analyse et d'optimisation de scénarios d'irrigation, conçu par Irstea), les scientifiques ont défini les origines de l’eau perdue (drainage dû à une trop grande quantité d’eau appliquée, par exemple) et les volumes correspondants. Leur conclusion ? Les pertes d’eau sont réduites non seulement par un changement du dispositif ou de la technologie d’irrigation (réduction de la dérive par le vent, de l’évaporation directe ou de l’évaporation du sol), mais aussi par un changement de conduite de l’irrigation, notamment grâce au pilotage qui vise à apporter la bonne quantité d’eau au bon moment. « Ce constat nous amène à encourager un subventionnement systématique des dispositifs de pilotage, en complément des systèmes d’irrigation eux-mêmes », conclut Claire Serra-Wittling.

Aujourd’hui limités à certaines cultures et au secteur géographique de la métropole, les référentiels vont progressivement intégrer d’autres types de cultures (betteraves, pommes de terre, fruits rouges, fruits à coques…), mais aussi d’autres territoires aux caractéristiques très différentes, comme La Martinique et La Réunion. Parallèlement, à la demande du Ministère de l’Agriculture, l’étude se poursuit afin de déterminer l’impact d’un changement de système d’irrigation sur les coûts – et de fait les économies réalisables- en termes d’énergie et de main d’œuvre. Deux critères décisifs pour le choix d’une technologie ou d’une autre par les agriculteurs. La prochaine version de l’outil ainsi enrichi sera disponible début 2019.

Vers le rapport final

1 Règlement européen n°1305/2013 - Article 46, point 4. Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (FEADER).
2 Source : rapport n°14061 CGAAER -
L’irrigation en France : quelle politique pour l’État ?
3 Irstea est devenu INRAE en janvier 2020
4 L’irrigation gravitaire consiste à inonder les cultures.

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