Biodiversité 2 min
Les insectes aquatiques au service de l’agriculture
En se dispersant autour des cours d’eau, les insectes aquatiques créent un flux nourricier dans les écosystèmes agricoles, qui s’étend jusqu’à 50 m autour du cours d’eau. Cette manne peut nourrir une chaine d’organismes terrestres et contribuer à la fertilité des sols, à la pollinisation et la régulation des ravageurs des cultures. C’est ce qu’a démontré le projet Aqualand, conduit par INRAE en 2016-2018.
Publié le 20 janvier 2021
Les écosystèmes aquatiques sont omniprésents dans les paysages agricoles. Par exemple, on compte en Bretagne en moyenne 1 km de linéaire de cours d’eau pour 1 km² de territoire en zone rurale. Dans une démarche de transformation du modèle agricole actuel vers un modèle plus durable, mobilisant les pratiques agroécologiques, il est important de connaitre toutes les potentialités qu’offrent les échanges entre écosystèmes et comment ils peuvent participer au fonctionnement des écosystèmes agricoles. Le projet Aqualand a apporté de premiers éléments en quantifiant, dans des systèmes agricoles intensifs, les apports de matière organique d’origine aquatique générés par l’émergence et la dispersion aérienne d’insectes aquatiques adultes. Il a également étudié dans quelle mesure ces apports pouvaient contribuer à fournir des services écosystémiques pour l’agriculture. Le projet s’est appuyé sur un travail de terrain effectué en 2016 et 2017, portant sur 24 sites d’étude en Ille et Vilaine.
En milieu naturel ou semi-naturel (forêts, landes), les communautés d’insectes aquatiques peuplant les eaux courantes sont particulièrement diversifiées. Les pratiques agricoles impactent l’intensité et l’étendue des flux d’insectes qui émergent et se diffusent à partir des cours d’eau.
Fertilisation des terres agricoles, pollinisation, dépollution des cours d’eau
Les nutriments d’origine aquatique contribuent à la fertilisation des sols. Ils sont significatifs en sortie d’hiver, à un moment où les apports générés par le milieu terrestre sont faibles. De plus, ces apports aquatiques sont particulièrement riches en éléments nutritifs (acides aminés et acides gras). Près des cours d’eau, les insectes aquatiques peuvent constituer une ressource alimentaire essentielle pour les ennemis naturels des ravageurs des cultures - carabes, araignées - et contribuer indirectement à la régulation de ces ravageurs.
Certaines espèces d’insectes aquatiques adultes participent activement à la pollinisation des cultures ou de leurs abords (en particulier les trichoptères, diptères Empididae), et peuvent être plus généralement des proies pour des prédateurs terrestres également impliqués dans la pollinisation comme les chauve-souris et les oiseaux.
Enfin, l’export des rivières par ces émergences d’insectes aquatiques a été estimé dans le cadre du projet à hauteur d’au moins 20 tonnes d’azote par an pour l’ensemble de l’Ille-et-Vilaine. Il s’agit donc ici d’une contribution naturelle significative à l’épuration des cours d’eau, dans une région où les eaux de surfaces sont fortement impactées par les excédents azotés. De tels rendements ne seraient atteints que par des programmes de dépollution à coût très élevé. Ainsi, Aqualand apporte les premiers éléments incontournables pour identifier les services écosystémiques pour l’agriculture qui sont sous l’influence des insectes aquatiques émergeant des cours d’eau. Il permet également de dégager des pistes de recherches à suivre pour quantifier ses services.