Agroécologie 2 min

Diminution de la vulnérabilité des exploitations laitières en conversion biologique

La période de conversion d’une exploitation vers l’agriculture biologique n’est pas dénuée de risques. Comment les agriculteurs la perçoivent-ils et à quoi est-elle due ? C’est à ces questions qu’ont cherché à répondre des scientifiques du laboratoire Agroécologie Innovations Territoires (AGIR) d’INRAE Occitanie-Toulouse par le biais d’entretiens sur le long terme et d’analyses chiffrées d’éleveurs en conversion.

Publié le 29 octobre 2018

illustration Diminution de la vulnérabilité des exploitations laitières en conversion biologique
© INRAE

La fin des quotas laitiers en 2015 a entraîné une forte variabilité à la baisse du prix du lait, qui a atteint un niveau historiquement bas en 2015-2016. Cela a entraîné une vulnérabilité économique croissante pour nombre d’éleveurs laitiers conventionnels, ainsi fragilisés. A la même période, le marché du lait en agriculture biologique était lui porteur et sécurisant du fait d’une forte demande et de prix payés aux éleveurs plus élevés et stables. Dans des régions comme l’Aveyron, le nombre de conversion en agriculture biologique a alors considérablement augmenté. Ainsi, il y avait dans le département jusqu’en 2015 seulement une quarantaine d’agriculteurs biologiques sur 1200 producteurs laitiers, alors que pendant la seule année 2016, environ 50 fermiers ont décidé de se convertir.

Or, la période de conversion en elle-même n’est pas dénuée de risques. C’est en effet un moment, qui peut durer jusqu’à deux années, où les pratiques sont modifiées sans pouvoir valoriser immédiatement cette transition. Des chercheurs de l’unité Agroécologie – Innovation – Territoires (AGIR) ont mené des entretiens auprès d’un groupe d’agriculteurs ayant entamé un processus de conversion afin de comprendre leur stratégie et de mieux cerner leurs motivations. Ils ont ainsi suivi sur la période 2016-2018 19 élevages laitiers en Aveyron. Pour expliquer le choix de se convertir, il s’est avéré que des facteurs très subjectifs et personnels entraient en jeu : non seulement le gain économique supposé et le meilleur impact environnemental ; mais aussi le fait de pouvoir maintenir une exploitation familiale, d’imaginer de meilleures conditions de travail ou de bénéficier d’un apprentissage collectif et ainsi d’accroître ses compétences personnelles. En somme, les agriculteurs interrogés perçoivent ce « pari sur l’avenir » comme une opportunité de travailler en meilleure adéquation avec leurs valeurs personnelles. Un autre des résultats majeurs de cette enquête est le fait que les agriculteurs concernés considèrent ce modèle agricole comme moins risqué que le conventionnel puisque s’éloignant de la logique d’agrandissement systématique pour faire des économies d’échelles.

Dans une autre étude, menée cette fois pendant 13 années sur 51 fermes déjà converties, ces mêmes-chercheurs ont essayé de savoir ce qui expliquait les différences de vulnérabilité entre élevages biologiques. Les résultats ont montré qu’elles venaient principalement des différences de pratiques d’éleveurs (diversification de l’activité, utilisation des terres, conduite de troupeau …). A l’inverse, les différences d’exposition aux aléas climatiques ou économiques, bien que marquées, expliquaient peu les différences de vulnérabilité entre élevages. Cette fois aussi, le facteur humain est donc central.

Ces travaux, ouvrent la voie à une réflexion sur la diminution de la vulnérabilité des exploitations laitières en conversion biologique, qui demeure importante. Ils offrent également des données pour permettre aux conseillers agricoles et aux décideurs publics de mieux accompagner les agriculteurs.

 

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