Alimentation, santé globale 6 min

Des biomarqueurs de la couleur de la viande bovine mis en évidence

Une analyse des publications scientifiques récentes au niveau international, a permis d’identifier les voies biologiques impliquées dans la couleur de la viande bovine fraîche et de révéler les protéines clés qui pourront servir de biomarqueurs de cette couleur.

Publié le 01 octobre 2020

illustration Des biomarqueurs de la couleur de la viande bovine mis en évidence
© Florent Giffard

La couleur est un critère essentiel à la commercialisation de la viande de bœuf fraîche car elle influence les décisions d'achat des consommateurs et l'attractivité du point de vente.

La myoglobine est un pigment protéique qui contient un atome de fer. Elle est présente dans les muscles des mammifères et elle est responsable de la couleur rouge de leur viande, par opposition à la couleur pâle des viandes blanches (volailles et porc) et de la chair des poissons. L'état d'oxydation ou d'oxygénation de cet atome de fer et/ou le ligand attaché peut déterminer la couleur du pigment. Pour la viande fraîche, cette couleur est violette, rouge ou brune pour le désoxy- (DMb), l'oxy-(OMb) ou la méthyo-globine (MMb), respectivement. La stabilité de la couleur, qui a aussi fait l'objet d'étude, varie au cours du temps, en fonction du packaging, mais aussi selon la forme prédominante de myoglobine présente.

Au cours des deux dernières décennies, les technologies de la « Foodomics » ont été appliquées à la viande pour élucider les bases/mécanismes biologiques de la qualité de la viande, y compris la couleur. En particulier, le développement de la protéomique au cours de la dernière décennie a constitué une étape importante vers une meilleure compréhension des mécanismes biologiques complexes qui régissent la conversion du muscle en viande et les qualités sensorielles qui en découlent.
Jusqu'à récemment, aucune étude détaillée ou critique n'avait été réalisée sur de potentiels biomarqueurs protéiques de la couleur de la viande. Le présent article  présente une synthèse des études protéomiques musculaires récentes permettant de progresser dans la connaissance des voies et des mécanismes biologiques à l’origine de la couleur de la viande de bœuf.


Une méta-analyse sur les études publiées de 2000 à 2020
Une recherche informatisée utilisant plusieurs bases de données bibliographiques (Pubmed.gov (NCBI), Google Scholar, Web of Science -Clarivate Analytics- et Scopus) a été réalisée, en essayant d'identifier toutes les études protéomiques traitant de la couleur de la viande. Les bases de données ont été consultées jusqu’en janvier 2020, pour les études publiées de 2000 à 2020. Les mots-clés utilisés sont "protéomique", "omique", "protéome", "protéine", "biomarqueur" et "couleur", en combinaison avec "viande" ou "muscle". Uniquement les études protéomiques portant sur des échantillons de muscles (viande) ont été prises en compte. Seuls les articles en texte intégral publiés dans des revues à comité de lecture ont été considérés afin de s’assurer de leur qualité méthodologique.
Deux cent trente-neuf articles ont été sélectionnés à partir de cette première recherche documentaire. Ils ont ensuite fait l'objet d'un examen d'admissibilité (méthode PRISMA) en ciblant les études sur la viande bovine uniquement. Les principaux critères d'inclusion/exclusion étaient les suivants : i) analyse du protéome bovin (bœuf) ; ii) uniquement les protéines dont il a été démontré dans l'article qu'elles étaient significativement corrélées (P < 0,05) avec les paramètres de couleur  et iii) les traits de couleur excluant les viandes à pH élevé qui sont la viande de coupe sombre ou la viande DFD (Dark, Firm and Dry, ferme et sèche).

La recherche documentaire  affinée par un travail d’intégromique*
Treize articles de recherche ont été finalement retenus sur la base de ces critères et ont constitué la première base de données sur les biomarqueurs de la couleur de la viande bovine. Cette base  contient des données sur cinq muscles et une liste de 79 protéines significativement corrélées avec les  paramètres de leur couleur. Elle a été soumise à une analyse en plusieurs étapes comprenant des annotations sur l'ontologie des gènes (à l'aide de l’outil ProteINSIDE http://www.proteinside.org/) permettant ensuite une analyse des processus et fonctions biologiques concernées. Les interactions protéine-protéine (interactomique) dans les fonctions biologiques ont été analysées à l'aide de la base de données du service web STRING (http://string-db.org/).

 

Six voies métaboliques gouvernent la couleur de la viande bovine
Au final, ce travail a permis d’identifier six voies impliquées dans la couleur de la viande de bœuf, notamment le métabolisme énergétique, les protéines du choc thermique, le stress oxydatif, les protéines de structure, la voie de signalisation, la protéolyse et l'apoptose.

Les 79 protéines (Genenames) biomarqueurs des paramètres de couleur (l, a, b) issues des 13 articles considérés, regroupées par fonctions biologiques : métabolisme énergétique (n=35), stress oxydant et homéostasie cellulaire (n=9), protéines contractiles et de structure (n=10), protéines chaperonnes et de stress thermique (n=10), transport, signalisation cellulaires et apoptose (n=12), protéolyse (n=3)


L'analyse de la liste des biomarqueurs a montré que certaines protéines, telles que β-enolase (ENO3), la peroxiredoxine 6 (PRDX6), la HSP27 (HSPB1), la phosphoglucomutase 1 (PGM1), la superoxyde dismutase [Cu-Zn] (SOD1) et la μ-calpaïne (CAPN1) ont été fréquemment identifiées comme étant exprimées de manière différentielle et jouant un rôle significatif dans la couleur de la viande de bœuf. β-enolase (ENO3) est en particulier le biomarqueur générique qui ressort indépendamment du type de muscle et des paramètres de couleur considérés.
Cette étude  d'intégromique propose au final  une liste de 27 biomarqueurs robustes de la couleur de la viande de bœuf. Une validation par des méthodes d’analyses à haut débit constituera l’étape suivante de ce travail.

 *les données générées par les OMICS (-omiques) sont colossales et multidimensionnelles. La bioinformatique et les biostatistiques permettent de les intégrer (intégromique) afin de disséquer avec précision leur signification biologique

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